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J'voudrais voir le monde à l'envers [Lemony]
 :: Salon de Thé & Bar à chats :: SAISON 1 :: RP

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Dim 7 Juin - 13:32
J'voudrais voir le monde à l'envers@Lemony AndersonErin


17 février 2004

Tes mots flottent entre vous. Fugaces, intangibles. Éphémères, comme le sont tous les mots prononcés. Et pourtant si lourds. Lourds de sens, lourds de conséquences. Lourds de ces souvenirs qui te hantent. Le silence s’attarde, jusqu’à ce qu’il le brise d’un soupir. Balayant son impuissance d’un refus catégorique qui te fait relever les yeux vers lui. Comment ça, « Pas bien fait ? ». une vague de colère te saisit à la gorge, envahit ton palais de son amertume, chassant la fraîcheur du poisson. De quoi parle-t-il ? A-t-il seulement idée de ce qu’il a évité ? De ce qui aurait pu lui arriver ? Échapper à l’humiliation, la haine, la souffrance… La prison. Qu’aurait-il fait de plus, du fond de la geôle qu’on lui destinait, sinon subir l’intolérable, revivre en boucle les pires instants de son existence ? À quoi bon ? Quel glorieux but aurait servi sa douleur ? Sa mort, même, peut-être ? N’y a-t-il pas eu assez de disparus, assez de familles endeuillés, pour qu’il se flagelle de n’avoir pas ajouté son nom à la liste innombrable des victimes de cette guerre insensée ?
Pourtant, tu pourrais comprendre cette culpabilité du survivant qui hante tes nuits. Instinctivement, tes doigts cherchent ton ventre, frôlent la laine de ton pull dans un geste réflexe, à peine amorcé et sitôt avorté. Et comme chassée par le souvenir de tes propres pertes, ta colère s’évanouit, aussi vite qu’elle était venue, pour redevenir mélancolie.

Tu le laisses t’expliquer qu’il avait cette possibilité – cette chance, aurais-tu dit. Plaisantant à moitié sur le fait qu’un e-mail aurait suffit à le localiser. Sur ce point, tu ne peux que lui donner raison : les sorciers, et surtout les sangs-purs qui se mêlent si peu au monde non-magique, n’ont pas conscience de la puissance des technologies moldues. Aucun des Brigadiers attachés à la recherche des nés-moldus n’avait la moindre envie de faire du zèle en ce sens et les rares qui partageaient cet idéal odieux n’auraient jamais été jusqu’à s’abaisser à utiliser autre chose que de la magie pour parvenir à leurs fins. Merlin merci, tu n’as pas fait partie de cette équipe et si secrète sur ta vie privée, tu t’es bien abstenue de dévoiler que tu connaissais suffisamment le fonctionnement d’internet pour espérer retrouver la trace des fuyards. Et c’est sans doute ce qui lui a permis de s’en tirer – comme de nombreux autres qui ont eu le bon sens de filer dès qu’ils ont senti le vent tourner.
Le bon sens. Tu en reviens toujours à ça, ne pouvant chasser la réponse de Lemony de ton esprit. Aussi, après quelques secondes, tu ne peux t’empêcher d’y revenir, chassant ses excuses d’un haussement d’épaules. « Tu as bien fait de partir. » Chaque mot, chaque syllabe se détache distinctement sur ta langue, ton regard vrillé au sien pesant de toute sa gravité. S’imaginer rester, sans possibilité d’agir, quitte à mourir en martyr… Tout ça pour pouvoir dire « J’étais là, je suis resté… » Ce serait un comportement parfaitement absurde. Envisageable peut-être chez ces têtes brulées de Gryffondor, et encore. « Adele aussi est partie, tu sais. Pas pour les mêmes raisons, mais elle est partie. Fuir… » Tu cherches tes mots, réfléchissant à la meilleure façon de formuler ce qui, au fond, semble vraiment le tracasser. Ta voix se fait plus douce, plus tendre, sans rien céder au sérieux du message. « Fuir pour sauver sa vie, ça n’a rien de lâche, Lemony. C’est peut-être même la plus grande bravoure qui soit. Savoir reconnaître son impuissance. »

L’espace d’un instant, tes doigts hésitent à traverser la table pour chercher les siens, lui apporter un peu de réconfort, de soutien. Mais sachant le rôle que tu as tenu dans ce théâtre morbide auquel il a échappé de justesse, un tel geste te semblerait porteur de tant d’hypocrisie que tu ne peux t’y résoudre. Aussi tu te contentes de les laisser errer sur le manche rutilant de la fourchette d’acier venue remplacer tes baguettes. Dans un profond soupir, tu tentes d’expulser tout ça. La guerre, les souvenirs, ta culpabilité… Vos retrouvailles valent mieux que ça. « Tu as raison, on ne devrait pas parler de tout ça. » Tout sentiment de faim t’a désertée, chassé par le poids des images évoqués, mais tu te forces pourtant à t’emparer de l’un des derniers morceaux sur le plateau, appréciant ta mobilité retrouvée grâce aux couverts familiers. « C’est plutôt sympa, oui ! À vrai dire, je ne suis pas très fan de poisson, en général. » Sitôt cet aveu échappé, il te semble voir passer une lueur d’inquiétude dans les yeux de Lemony, et tu t’empresses d’ajouter, avant qu’il n’ait l’occasion de s’en vouloir de t’avoir amenée ici. « Enfin, plus précisément, grandir près de la mer, ça rend parfois exigeant sur la qualité de tout ce qui en vient, alors ce n’était pas notre premier choix. » Du bout de ta fourchette, tu pousses vers lui le dernier sushi. « Généralement, on va plutôt à l’indien qui est un peu plus haut dans la rue. Pour le coup, nous y sommes plus connues que Dumbledore lui-même ! On y va… je ne sais pas. Au moins trois fois par semaine ? » Tant et si bien que vous avez fini par y abandonner une batterie de tupperwares, pour éviter au gérant de se ruiner en barquettes aluminium. « Je te ferais découvrir la prochaine fois. » L’implicite de cette phrase te fait monter le rouge aux joues une fois de plus, et tu lui adresses un sourire timide. « Enfin, si tu veux ? »

Tu tentes de noyer ta gêne dans ton verre d’eau, cherchant là un semblant de contenance. À boire trop vite, tu manques de t’étouffer, et c’est le visage plus enflammé encore que tu hoches la tête. « Oui et non. Son père nous a aidé à le trouver, mais c’est surtout que les loyers dans le Londres sorciers sont… rédhibitoires quand on a pas encore de salaire, et comme on s’est installées ici juste après Poudlard, c’était la seule option envisageable. À l’époque, ça m’inquiétait un peu – de devoir utiliser de l’argent moldu, notamment – mais au final j’aime bien ce quartier. Ça permet de déconnecter un peu du monde sorcier. Pour aller boire un verre sans croiser de collègues, par exemple. Enfin, même si ça ne m'arrive jamais, d'habitue !  » Douce Helga, il ne manquerait plus qu'il te voit comme un pilier de bar... « Et d’aller au cinéma, oui. On le fait parfois, quand Adele est là. En décembre, on est allées voir la fin d’une trilogie qu’on attendait impatiemment. Le Seigneur des Anneaux, je ne sais pas si tu connais ? Enfin si, je suis stupide, tu connais forcément. Il paraît que ça vient d’un livre en plus, alors je suis certaine que tu as dû les lire ! »

Du coin de l’oeil, la serveuse semble vous observer et tu tentes de te convaincre que c’est plus par professionnalisme que par curiosité pour votre conversation. Le plateau désormais vide attire immanquablement son attention et tu la vois se diriger vers vous, parmi les tables désormais vides. « Tu veux commander autre chose ? Ou qu’on aille ailleurs ? Ça peut être chez nous, si tu veux, au moins on aurait plus à s’inquiéter de ce que les moldus peuvent entendre. » La proposition t’est venue spontanément, et il n’a pas fallu plus d’une secondes à tes joues pour s’empourprer encore. Fixant la carafe vite comme espérant disparaître à l’intérieur, tu balbuties. « Je… enfin… C’est comme tu veux. »

Lemony Anderson

Lemony Anderson
Super vilain
hiboux : 536
Jeu 3 Sep - 14:56

J'voudrais voir le monde à l'envers
« Tu as bien fait de partir. » Elle insiste. Chaque son est détaché du précédent, elle est catégorique. Elle l’a vécue, cette guerre, et de l’intérieur. Elle a vu ce qui se passait, elle parle en connaissance de cause. Je me pince les lèvres sans rien dire. Je n’ai pas envie de me battre avec elle. Je me suis déjà battu aujourd’hui, et j’ai gagné, en quelque sorte. Victoire bien amère. Je n’aurais pas dû lui parler de cela, j’ai souffert à distance, elle y était… C’était égoïste de ma part. Nous ne tomberons pas d’accord sur ce sujet, et il ne serait pas correct de ma part de lutter avec elle pour la convaincre. « Adele aussi est partie, tu sais. Pas pour les mêmes raisons, mais elle est partie. Fuir… » J’acquiesce, très discrètement, sans rien dire. Je n’ai rien à dire. Ça me surprend, un peu. J’imaginais qu’Adele se serait battue, dès les premières secondes, et jusqu’au bout. Je la visualisais bien, au milieu de la bataille de Poudlard, à casser des têtes… Je suppose que malgré moi, j’ai encore une vision trop romantique de ce qu’a été cette guerre. « Fuir pour sauver sa vie, ça n’a rien de lâche, Lemony. C’est peut-être même la plus grande bravoure qui soit. Savoir reconnaître son impuissance. » Je me mords la lèvre. Ne répond pas Lemony, s’il te plaît, ne dis rien. Mes pensées s’entrechoquent sans que je n’arrive vraiment à les suivre. Je ne suis pas d’accord avec elle. J’ai passé ma vie à fuir, et je ne veux plus fuir. Et ça n’est pas lâche. J’étais lâche avant, quand je préférais m’en aller, quand je préférais me taire… Et puis d’abord, comment peut-on savoir que l’on est impuissant ? A quel moment peut-on être certain qu’il s’agit d’un constat absolument rationnel et réel, que ce n’est pas nos peurs, nos instincts qui nous poussent à agir ? Est-ce que je suis impuissant, en ce moment ? Pour Rogue, pour Poudlard, pour ma mère ? Est-ce que je peux faire quelque chose, agir, améliorer les choses, essayer au moins ? Je crois que j’ai été lâche moi, quand je suis parti pour l’Allemagne en quatrième vitesse en abandonnant tout et tout le monde plutôt que d’utiliser mes connaissances et mes contacts moldus pour aider, j’ai été lâche quand j’ai laissé mon père placer ma mère dans cet hôpital moldu sans au moins vérifier auprès d’un médicomage, j’ai été lâche quand je ne me suis pas opposé au renvoi de ces élèves parce que j’avais peur pour mon poste… Je n’ai pas bien fait de partir, et ça n’a rien de courageux. Les mots restent dans ma tête, je ne les lui dis pas. Elle a l’air… Dévastée. Je n’aurais jamais du aborder ce sujet.

Changer de sujet, passer à quelque chose de plus léger. Retrouver une vieille amie. C’est fou, que je n’ai pas pu m’empêcher de mettre le sujet sur la table : ça ne me ressemble même pas. Ce doit être l’alcool. Avec Lizzie, je suis devenu une sorte de ninja du sujet, évitant tout ce qui, de près ou de loin, peut le lui rappeler. Ce n’était pas aimable de ma part de ne pas avoir la même délicatesse avec Erin. Plus léger, donc. Le temps, le quartier, la nourriture. Est-ce que le repas lui plaît, pour commencer, et comment se fait-il qu’elle ne soit jamais venue jusque-là. « C’est plutôt sympa, oui ! À vrai dire, je ne suis pas très fan de poisson, en général. » Je manque de m’étouffer avec mon nigiri. Mais quel idiot je fais ! Et je ne lui ai même pas demandé avant… Mais pourquoi je l’ai emmenée ici ? J’aurais au moins pu lui poser la question… C’était déjà le cas à Poudlard ? Je ne sais plus, je ne mangeais souvent avec elle, mais je fouille ma mémoire à la recherche d’un souvenir qui aurait pu me guider. « Enfin, plus précisément, grandir près de la mer, ça rend parfois exigeant sur la qualité de tout ce qui en vient, alors ce n’était pas notre premier choix. » Elle repousse vers moi le dernier sushi, et je lui adresse un sourire un peu mal à l’aise. Entre ça et le précédent sujet de conversation, j’ai l’impression de cumuler les bourdes ce soir. Je devrais peut-être m’indigner qu’on puisse ne pas apprécier les sushis, bien sûr – surtout que les produits sont ici de bonne qualité, mais je croque plutôt dans mon sushi pour m’éviter une nouvelle maladresse.  Mon sourire devient plus franc déjà quand elle évoque le restaurant indien dont elle est une habituée. Je me demande si c’est le même qu’il y a quelques années… En reposant mes baguettes, j’essaie de me faire une image mentale du lieu pour mieux le lui décrire « Je te ferais découvrir la prochaine fois. » Je relève les yeux vers elle, le cœur battant. « Enfin, si tu veux ? » J’ai oublié ma description, ça me fait juste chaud au cœur de l’entendre me le proposer, que ce soit si naturel que je puisse revenir, qu’elle soit si, si… Est-ce qu’elle rougit légèrement, ou est-ce que c’est l’alcool ? « Avec plaisir. » Pourquoi je me sens si léger et si lourd en même temps tout d’un coup ? Je passe une main dans mes cheveux et relance la conversation sur le quartier, les activités qu’elle y fait. Elle y est depuis la fin de Poudlard. C’est amusant, ça. J’aurais pu la croiser, à l’époque. Je me demande si les gens que je venais voir dans ce quartier y vivent encore… Elle va au cinéma aussi, avec Adele bien sûr. Ma mâchoire manque de se détacher tant mon sourire s’étend quand elle évoque le Seigneur des Anneaux. « Oui, bien sûr que je connais ! J’ai les livres si tu veux, je pourrais te les prêter – ils sont à Poudlard à la disposition des élèves, mais j’ai l’impression que les étudiants n’ont pas très envie de lire des fictions moldues. Tu les as aimés, ces films ? » Si je m’attendais à parler de ça avec une sorcière… Bien sûr, si je devais en parler avec quelqu’un, ce serait avec elle, ou avec sa cousine. J’aurais pu parler des livres avec Orion aussi. J’ai aimé ces films, moi. Je les ai vus avec mon père, dont Tolkien est peut-être l’auteur préféré. J’ai partagé ça avec lui, je peux partager ça avec elle… Je me sens plus léger, presque excité, en fait. Il me faut d’ailleurs un certain temps avant de voir que le regard de la jolie rousse est tourné vers la serveuse qui semble attendre en nous détaillant. Ah oui, on a fini de manger. « Tu veux commander autre chose ? Ou qu’on aille ailleurs ? Ça peut être chez nous, si tu veux, au moins on aurait plus à s’inquiéter de ce que les moldus peuvent entendre. Je… enfin… C’est comme tu veux. » Elle semble gênée. J’aimerais à cet instant la prendre dans mes bras et lui dire de ne pas l’être, j’aimerais la rassurer. Cette simple pensée me fait rougir à mon tour. Je n’aurais pas dû boire autant. Je boirai bien encore. Tout ceci n’a aucun sens. J’inspire. « Avec plaisir Erin. Je vais payer du coup, et on y va ? » Je me lève à l’arrivée de la serveuse, portefeuille déjà en main. Elle me fait signe de régler au bar en débarrassant nos affaires. En me déplaçant, je note combien manger m’a fait du bien : le sol tangue moins sous mes pas. Cependant, je ne me sens pas vraiment en état de transplaner pour autant – j’ai l’impression que cela me vaudrait de me désartibuler sans aucun doute. Bah, ça ira forcement mieux à un moment… Je laisse un pourboire assez conséquent pour la serveuse – j’ai encore peur qu’elle nous ait entendu tout à l’heure et retourne vers Erin lui offrir mon bras. « Et bien, je te suis. »

L’air s’est encore rafraichi alors que nous passons la porte, et je frissonne dans mon manteau. « Ça va, le froid et tout ? » Je me souviens de ses mains glacées… Elle a les boutons de chemises au moins, cette fois. Mes doigts à moi souffrent déjà plus de ne plus être protégés magiquement de cette nuit. Mais j’ai l’impression que cela me fait du bien, quelque part. « Alors euh… La cohabitation se passe bien avec Adele ? Vous êtes juste toutes les deux ou il y a d’autres personnes ? Je veux dire… Tu as dit qu’elle était partie à un moment, tu as déjà vécu avec quelqu’un d’autre du coup ? Une colocataire ou euh… » Je remercie la nuit de dissimuler un peu le rouge que je sens monter à mes joues. Si elle demande, je lui dirais que j’ai froid. Non, si elle demande, je pense que j’irai m’enterrer sous la neige quelque part. Merde. Je me sens vraiment idiot ce soir…

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Sam 5 Sep - 9:27
J'voudrais voir le monde à l'envers@Lemony AndersonErin


17 février 2004

Lemony n'est pas d'accord. Tu peux le voir à ses sourcils froncés, au pli de son front, à ses lèvres serrées. Et pourtant, tu n'en démordras pas. Il ne sait pas ce que c'était. Pourtant, d'une manière un peu surprenante, malgré la gravité du sujet, votre désaccord te tire un sourire. Parce qu'il est facile, si facile de lire sur son visage que c'en est presque déconcertant. Était-ce déjà le cas, à l'époque ? Parvenais-tu à lire sur ses traits comme dans les pages des grimoires que vous compulsiez ensemble ? Sans doute, oui.
Tes souvenirs s'envolent vers cette époque révolue, vers Poudlard et la bibliothèque où vous vous retrouviez si souvent. Et l'ébauche de ton sourire se fait plus large. Définitivement, oui. La fierté lorsqu'il arrivait avec son dernier O en date. L'excitation à l'annonce d'une nouvelle technologie moldue dont ils parlaient des heures durant, Adele et lui. La frustration aussi, parfois, quand il couvait d'un regard sombre la dernière conquête de ta cousine et que tu devinais une nouvelle rivalité amoureuse entre eux. Et son air concentré quand il fixait la même page de longues minutes durant pour en mémoriser chaque information, relevant de temps à autre ses lunettes sur son nez, ses yeux bleus parcourant les lignes inlassablement, ses lèvres en articulant les mots sans un bruit.
Chacune de ces scènes te revient avec une acuité toute particulière, malgré l'alcool. Ou grâce à lui ? Il serait amusant de penser qu'en bonne Écossaise, le whisky puisse décupler tes capacités et tes sens, comme ceux de Spiderman – n'y a-t-il pas un autre film de prévu pour cet été d'ailleurs ? Il faudra que tu poses la question à Adele ! À la voir s'enthousiasmer aussi bien pour la culture sorcière que moldue, tu songes parfois que c'est une véritable chance d'avoir grandi avec un pied dans chaque monde, comme elle. Ni avec ces œillères qui caractérisent la majorité des sorciers, ni déracinée comme à pu l'être Lemony qui te parle maintenant de Tolkien avec enthousiasme.

Le retour de la serveuse et ta proposition maladroite t'empêchent de répondre. Et après qu'il ait réglé votre note et que le froid hivernal vous ait englouti de nouveau dans un dernier bruit de carillon, tu as encore le sentiment d'être rouge dragoncelle... Et ce bras qu'il t'offre si naturellement, son inquiétude concernant le froid ne font qu'empirer la situation. Ne reste qu'à espérer que cet émoi restera invisible dans la lumière fade des lampadaires. « Non, ça va, je n'ai pas froid grâce à toi. Enfin, je veux dire... » Dragoncelle, te voilà de plus belle ! Tu secoues vaguement ton poignet libre – l'autre ayant déjà trouvé son chemin vers lui – pour désigner les boutons de manchette qu'il t'a si élégamment prêtés, avant d'en revenir à des sujets moins périlleux.
« En fait, pour Le Seigneur des Anneaux, j'ai déjà essayé de les lire, après avoir vu le premier film, mais je n'ai pas réussi à rentrer dedans, le début est un peu long... » Ou comment, une fois de plus, risquer de doucher son enthousiasme... Et si tu disais simplement oui, Erin ? « Mais il faudrait que je réessaye, parce que j'ai vraiment adoré les films, oui. » reprends-tu rapidement.
« Et c'est une super idée de les mettre à portée des élèves, je suis sûre qu'ils y viendront ! Après tout, il suffit qu'un seul se montre curieux et le bouche à oreille fera le reste. »

Les quelques minutes de marche vous amènent déjà devant la lourde porte de l'immeuble, que tu déverrouilles d'un tour de clef, comme les moldus. Hors de question de sortir ta baguette en pleine rue sans raison. Et les deux étages te laissent tout loisir de répondre à sa dernière question. « Oui, ça se passe bien, on a trouvé un bon équilibre et elle est souvent en déplacement, du coup... Ça nous permet de ne pas être tout le temps ensemble. Par contre, depuis peu nous avons un nouveau locataire, j'en avais marre de passer mes soirées toute seule quand elle est retenue pour le boulot. Il est hyperactif, désobéissant et je n'ai jamais réussi à l'empêcher de venir dans mon lit mais il sait y faire pour que je lui pardonne... » Sur le palier silencieux, tu sors cette fois ta baguette pour chuchoter un « Alohomora! » discret, auquel tu joins un nouveau tour de clef.

Contrairement à son habitude, l'appartement est silencieux. Immobile et endormi. C'est à peine si un livre s'extirpe encore de temps à autre de ses congénères, dans un frottement léger évoquant un bâillement, pour aller se replacer plus confortablement sur l'étagère d'à côté. Curieux mélange de technologies moldues dont témoignent la cafetière et la console de jeu, et du monde de la magie comme ces dizaines objets aux armoires rouges et or ou jaunes et noires – d'ordinaire en pleine guerre d'occupation, pour le moment rendus à un cessez-le-feu nocturne – ou le porte-manteau qui vous tend ses bras endormis, sur lequel tu suspends ta cape avant de retirer tes bottes. Tu t'avances prudemment dans l'appartement, sur la pointe des pieds, cherchant des yeux la terreur des lieux que tu finis par découvrir sur ton lit, justement. Boule de poils blancs marquée de quelques taches rousses et noires enroulée sur ton oreiller. Tu le désignes à Lemony d'un geste, en chuchotant « Je te présente Suíl. » Puis, en douceur, tu refermes la porte pour isoler le fauve.

« Tu veux boire quelque chose du coup ? Whisky ? Jus de citrouille ? » On t'aurait imaginée nerveuse, pourtant le calme feutré des lieux, de ce chez-toi que tu aimes tant, t'apaises et tes gestes sont doux, mesurés tandis que tu sors les différentes bouteilles, ainsi que des verres, désignant à Lemony le canapé sur lequel tu le rejoins bientôt.
Mais du reste de la soirée... Tu ne conserves plus guère de souvenirs. Incapable de dire si vous avez parlé des heures durant encore, ni à quel moment vous vous êtes endormis, bien que le niveau fort raisonnable des bouteilles suggère qu'il n'était pas si tard que ça. Tout ce dont tu gardes l'image, c'est ce réveil en douceur au matin, pelotonnée contre lui, ta tête sur son épaule... Puis le sursaut de panique en apercevant les premières lueurs du jour clamant que vous étiez l'un et l'autre en retard. Et enfin ce regard bleu, si bleu, disparaissant dans une nuée de flammes vertes.

Lemony Anderson

Lemony Anderson
Super vilain
hiboux : 536
Dim 6 Sep - 21:47

J'voudrais voir le monde à l'envers
« En fait, pour Le Seigneur des Anneaux, j'ai déjà essayé de les lire, après avoir vu le premier film, mais je n'ai pas réussi à rentrer dedans, le début est un peu long... » J’hoche la tête, sérieusement. Je sais que c’est un reproche que beaucoup de personnes font à ces œuvres, et je sais aussi que j’ai un rapport trop personnel à Tolkien pour avoir sur celui-ci un avis pleinement objectif. Comment cette histoire pouvait-elle paraître longue au garçonnet que j’étais quand elle était contée avec autant de passion par mon père. Une des rares choses qui savaient éveiller quelque chose chez lui, avec son travail, et ma mère. « Mais il faudrait que je réessaye, parce que j'ai vraiment adoré les films, oui. Et c'est une super idée de les mettre à portée des élèves, je suis sûre qu'ils y viendront ! Après tout, il suffit qu'un seul se montre curieux et le bouche à oreille fera le reste. » Je souris, un peu fier je dois l’admettre. Je trouve aussi que c’est une idée importante, pour pousser les étudiants à s’intéresser au monde moldu. « Oh, j’ai bien une curieuse. Mais la littérature de fiction moldue n’est pas une passion commune à beaucoup d’élèves. » Ou peut-être que si, mais ils ne le disent pas ? Et si ces livres étaient en libre accès en dehors de ma salle de classe ? Lemony, tu penses trop.

**

Il me reste de cette fin de soirée quelque chose de brouillon, dans un coin de ma tête. Un souvenir chaud, agréable, mais étrangement cotonneux. Marcher en lui tenant le bras pour aller jusque chez elle. Parler de sa vie avec Adèle, de leur cohabition. Je n'ai jamais réussi à l'empêcher de venir dans mon lit mais il sait y faire pour que je lui pardonne. Ce pincement au cœur, le froid de la rue, Erin à mon bras. Arriver chez elle. Le colocataire n’était qu’un chat, le whisky était bon, elle était juste à côté de moi sur le canapé, et je ne me souviens même plus vraiment de ce dont nous parlions, le Seigneur des Anneaux, les films, les jeux, les références moldues, partout dans l’appartement. A quel moment est-ce que je me suis endormi ? Comment j’ai pu m’endormir ? Rien que son appartement. Voir la magie agiter les lieux, la voir baguette à la main, et voir derrière elle télévision et console, cafetière tout ce qu’il y a de plus moldue… Pouvoir aller, simplement, d’une discussion à l’autre, sans gêne, sans mépris, sans colère, dériver entre les deux mondes entre lesquels je m’étais toujours senti partager jusque-là. Perdre la notion du temps. Et puis, elle, juste elle… Erin.

**

J’ai mal à la nuque, j’ai dormi assis dans une position qui me laisse pressentir que mon dos va me faire souffrir un moment, et j’ai mal au ventre et la tête trop épaisse. Qu’est-ce que je… Refaire la journée d’hier, repasser la bande. Papa, Emma, le piano, les martinis, Maman, Papa, le bar… Erin. Je la sens appuyée contre moi, sa tête sur mon épaule. J’ouvre un œil, la chevelure est rousse, l’appartement toujours aussi accueillant, le chat toujours aussi endormi dans un coin. Je sens mon cœur battre dans ma poitrine, je ne veux plus bouger. Depuis combien de temps est-ce que je n’avais pas ressenti ça ? Est-ce que cela me manquait ? En tout cas je pourrais jurer que cela me manquera, dès l’instant où je sortirai de ce canapé. Il y a bien une petite voix dans ma tête qui tente de me raisonner, mais je l’ignore. Quelques instants de plus. Juste quelques instants. Je referme les yeux, mais la voix se fait plus forte, elle passe au dessus de mon euphorie et de ma gueule de bois. Lemony, il fait jour. Il fait jour. Bordel ! J’ouvre les yeux, soudain presque paniqué. Je suis sûr que ce n’est rien. Ma montre est au poignet du bras contre lequel la rouquine s’est appuyée, et je ne veux pas la réveiller. Peut-être que si je déplace mon bras comme cela ça ne la fera pas bouger ? Je ne sais pas ce qui l’a réveillée, si c’est mon geste maladroit ou le bond de panique que j’ai fait en voyant l’heure. Rogue va me clouer au pilori si je suis en retard et que j’ai la gueule de bois. Je tourne la tête vers elle, et ses yeux verts sont ouverts et tournés vers moi. Juste quelques instants de plus ? « Bonjour, Erin. » Je ne suis pas certain des excuses que je bafouille, mais j’imagine qu’elle sent l’inquiétude dans ma voix car il ne se passe pas longtemps entre cet éveil et le moment où je suis devant sa cheminée, vêtements en vrac, ma poudre de cheminette dans les mains. Je voudrais rester pour un café, lui dire combien cela m’a fait plaisir de la revoir, lui demander si elle fait quelque chose, bientôt, rester encore un peu. Au lieu de ça, je lui adresse un sourire presque gêné, debout dans la cheminée. « Merci. » Ma voix est un murmure, et je n’arrive même pas à lire sur ses traits si elle l’a entendu. « Poudlard. »

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