Le sport est une grande affaire pour ceux qui ne le pratiquent pas.
- 28.02.2004
« Oh, Gustav était donc un moldu. Évidemment, tu n’iras pas faire des choses de sorcier avec un moldu, mais avec une sorcière, tu peux totalement te permettre des choses moldues. Je ne sais pas trop, tout dépend de ce qu’elle aime, mais un repas, une balade, ça peut suffire, tu sais. » Faire des choses moldues avec une sorcière… J’imagine que j’ai au moins l’avantage qu’Erin ne semble pas avoir de mépris particulier pour ce monde dont je viens, mais je ne suis pas vraiment satisfait. J’ai l’impression que cela me ramène encore une fois au statut de mon sang – le né moldu, qui fait des choses de moldus, qui invitent les sorciers à des activités toutes moldues… Mais le fait est que je ne connais pas vraiment ce monde – je n’y suis pas resté après Poudlard. Je ne sais pas ce que font les jeunes sorciers quand ils vont en rendez-vous, s’ils ont vraiment des activités différentes des moldus, si finalement cela ne changera rien pour une fois… Je me souviens, en revanche, d’une jeune sorcière – je devais être en sixième année – qui avait trouvé cela trop choquant que je ne connaisse pas son groupe préféré pour accepter de venir boire un chocolat avec moi à Pré-au-Lard. Je crois que je suis terrifié à l’idée de déplaire à Erin pour ce même genre de raison. Je finirai bien par trouver – je suppose. Il faudrait déjà que je commence par lui écrire et que je vois si elle a effectivement envie de me revoir. Si elle ne le voulait pas ? Est-ce que c’est bien le moment de me torturer avec cela ?
M’épancher sur ma propre vie romantique me pousse à questionner Mara sur la sienne. « Oh tu sais, moi et les relations… Ça va, ça vient, je ne m’attache pas, parce que… Parce que je n’aime pas m’attacher. Ceci dit, je n’ai eu personne depuis l’accident, à croire que les accidentées, ça n’attire pas plus que ça. » Je lève un sourcil – j’ai peine à la croire. C’est qu’elle est particulièrement charmante, et que son caractère allie les plus grandes qualités des Pouffsouffle sans manquer de… comment le dirais-je poliment ? De flamme. Je n’ai pas le temps de l’accuser de me servir des sornettes, qu’elle continue – et il me semble presque la voir rougir sous le ridicule de son déguisement. « Mais maintenant que tu poses la question, il y a… cet homme. On s’est rencontré pour des raisons professionnelles, mais je ne sais pas, il est… Il a ce truc. Et… C’est pour ça que j’hésite à aller à la foire de demain, parce qu’il m’a invitée. Je crois que c’est un rendez-vous, mais je ne suis pas sûre. Tu penses que je devrais y aller ? » Je ne prends même pas le temps de me réjouir de son mauvais score aux fléchettes – je ne suis pas le seul à le laisser déconcentrer de toute évidence. « Mara ! Et après tu oses me dire que tu n’attires pas depuis ton accident. Je veux touuuuut savoir. Il s’appelle comment ? C’est quoi, ce truc, comme tu dis ? » J’ai l’impression de me revoir adolescent avec Adele ou Lizzie. J’ai la curiosité de ma maison, cela ne fait aucun doute. « Pardon. » Je ris en m’excusant – mais qu’elle en soit certaine, je ne la laisserai pas s’en tirer comme ça. Je lui ai nommée Erin, j’attends au moins qu’elle me renvoie la politesse. Je récupère les fléchettes, large sourire aux lèvres, au moins cela a chassé mes doutes et mes angoisses. « En tout cas, à la façon dont tu l’évoques… Je dirai que tu peux au moins lui laisser une chance ? Qui sait, ça peut être sympa… Et puis, si ça l’est pas, j’y serai moi aussi au Bazar. Un signe de toi, et je vole à ta rescousse sans attendre. » Et comme pour illustrer ma promesse, ma première flèche tombe en plein dans le mille. Je l’ai rattrapée, ou pas loin, non ? « Enfin, si ton soupirant fait quatre têtes de plus que moi, je trottinerai sans doute timidement à ta rescousse plutôt. » J’ai été un idiot, jeune homme. Je me souviens que ma fierté m’a poussée à toutes sortes de bêtises – je me souviens notamment m’être battu avec un imbécile bien plus massif que moi qui avait trouvé drôle de se moquer que je tenais la main à un jeune homme. L’amoureux n’avait pas trouvé cela si romantique – nous ne nous étions pas revu après qu’il m’ait accompagné aux urgences pour faire recoudre l’arcade que l’idiot avait ouverte. J’ai passé l’âge de me montrer si téméraire, et ce serait un terrible exemple à montrer aux enfants – mais je suis certain que je trouverai bien un moyen de l’aider si cela devait être nécessaire. Mes deux autres fléchettes volent, pour m’offrir un simple onze et quatorze – j’ai un air très satisfait alors que je me tourne vers elle pour saisir ma bière. « Je t’ai rattrapée ! »
« I don't care if you fall off your broom as long as you catch the Snitch first. »
Je n’ai pas l’habitude de m’épancher sur ma vie amoureuse, du moins, pas avec les personnes qui ne sont pas de mon proche entourage. J’apprécie Lemony énormément, mais on ne peut pas dire qu’il soit mon meilleur ami et je suis certaine qu’il ne prendrait pas cette affirmation pour une insulte. Je n’ai d’ailleurs jamais rien de bien intéressant à raconter car je suis souvent très désintéressée par les hommes que je séduis et qui me séduisent. Si cette fois-ci, j’accepte d’en parler, c’est parce que Lemony n’a pas hésité à partager ce qu’il avait sur le cœur à ce sujet. Et puis, ça tombe plutôt bien puisque j’ai récemment rencontré quelqu’un qui ne m’a pas laissée indifférente. Il faut croire que je n’ai pas une conversation sans que je n’évoque l’homme mystérieux aux boucles couleur corbeau.
Lemony me questionne au sujet de cet homme en question, son nom, ce truc que j’ai mentionné, il dit vouloir tout savoir, mais je ne suis pas sûre de pouvoir tout évoquer. Même si le fait qu’il soit un loup garou n’est pas un secret d’état d’après ce que j’ai compris, je ne pense pas nécessaire de le mentionner dans ce cas précis.
« Il s’appelle Malachy… On s’est rencontré à la boutique. Il venait me voir pour des raisons professionnelles et nous sommes allés chez Florian. Et… Je ne saurais pas dire quel est ce truc, il dégage quelque chose, un certain charme, et j’ai juste l’impression que c’est une personne avec qui je pourrais bien m’entendre, sans oublier qu’il est indubitablement séduisant. »
Peut-être que cette rencontre me monte à la tête parce que rien de bien intéressant ne se passe dans ma vie depuis plusieurs mois. Je lui dois au moins ça, d’avoir mis un peu de lumière, un peu de vie dans mon quotidien qui se veut si morne. Comme ça, peu importe où ça nous mène, je n’aurai aucun regret d’avoir rencontré Malachy. Lemony propose que je lui laisse une chance et je pense que c’est la meilleure des solutions. A vrai dire, si j’hésite depuis tout ce temps, ce n’est pas parce que j’ai peur de lui, mais parce que j’ai peur d’avoir des sentiments, j’ai peur de ce que je ressens qui ne m’est plus arrivé depuis au moins Poudlard, je crois bien. Je ne peut m’empêcher de rire lorsqu’il propose de se charger de lui si jamais ça se passe mal.
« Je t’enverrai mon patronus si besoin, oui. Je ne pense pas qu’il soit dangereux – même si se fier aux apparences est une mauvaise chose – j’ai plus peur de ce que je pourrais ressentir à la fin de ce dit rendez-vous... »
Je ne sais pas pourquoi j’ai autant d’appréhension avec un tel sentiment que l’amour. Mes parents ont toujours été un couple exemplaire, qui s’aimaient malgré leurs différences. Peut-être ai-je peur de ressentir le vide que mon père ressent depuis la mort de ma mère. Je l’ignore…
Je n’avais même pas réalisé que Lemony avait lancé ses fléchettes. Suite à mon échec, son tir en plein dans le mille me laissa bouche bée.
« Comment oses-tu ? Quand je dis qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Ton premier coup c’était pour m’induire en erreur, avoue-le ! »
Je dis ça sur le ton de la rigolade, évidemment. Je me saisis des fléchettes à mon tour, ne me laissant pas déconcentrer cette fois-ci. Ma fléchette n’atteint pas le centre de la cible, mais elle se place plutôt bien, seulement, les deux autres scores se veulent moyens. Alors même si je repasse devant, étant donné le potentiel de mon ami, il va pouvoir me dépasser bien facilement.
« Si je peux te donner un conseil. A moins que cette chère Erin soit une pro des fléchettes, ne l’invite pas à y jouer lors de votre rendez-vous ! Tu ne voudrais pas l'éblouir autant dès le premier rendez-vous... »
Perdre aux fléchettes après un match, entre amis, c’est une chose, mais perdre lors d’un rendez-vous amoureux, c’est bien trop frustrant.
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