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When I last saw you laughing – Charlie & Georgia
 :: Salon de Thé & Bar à chats :: SAISON 1 :: RP

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Georgia R. Harris

Georgia R. Harris
MODÉRATRICE
hiboux : 304
pictures : When I last saw you laughing – Charlie & Georgia - Page 2 B5097c269a0f90ad90c06e5cda963512817b5f34
Ven 17 Avr - 19:07
When I last saw you laughing
Georgia Harris & @Charles Weasley
True colors - Cyndi Lauper

Février 2004

Il ne dit rien, Charlie, alors que les mots se déversent à flots. Il ne dit rien, alors que les derniers trébuchements de pensées résonnent dans le salon, qui lui paraît soudainement trop froid, trop triste. Il ne dit rien, alors que ses yeux sont plantés dans les siens, et qu’elle tremble de tout ce qu’elle vient de lui lâcher. Il ne dit rien, parce qu’il la regarde, et ça la fait trembler. Il a ce regard de ceux qui comprennent, ce regard trop sérieux, de ceux qui écoutent. Qui écoutent vraiment. Alors son long soupir, Georgia ne le prend pas mal, pas comme certains qu’Andrew avait l’habitude de pousser, quand elle l’agaçait à essayer de dire ce qu’elle pensait, pas comme ceux de James, même, en cinquième année, qui la préférait au lit que dans la vie. C’est un soupir profond, d’homme qui réorganise ses pensées, qui cherche par où commencer. Georgia ne le quitte pas des yeux, puisant dans ce regard certain pour ne pas craquer, pas totalement. Si sa gorge est nouée, ses yeux sont, cette fois, plus dépassés que mouillés.

Elle frissonne à ses premiers mots, se trouvant triste à avoir l’air si malheureuse. Elle n’est pas comme ça, d’habitude, promis Charlie – laisse-lui te montrer comme c’est une fille pétillante, une fille qui amuse, une fille qui ramène le sourire. Pourtant, les mots qui suivent gomment toute cette envie qui lui est retombée dessus de ne lui montrer que sa plus belle facette. Georgia chasse l’émotion qui lui monte aux yeux d’un clignement de cils, inspirant profondément, se perdant plus dans son regard. Être respectée pour qui elle est. Même quand on la pointe du doigts, fille des alcoolos de la maison briquée ? Même quand on chuchote qu’elle n’est pas une vraie sorcière, qu’elle a dû tuer des sorciers pour attraper leurs pouvoirs ? Même quand elle ne sait pas vraiment ce qu’elle est, finalement, à trop avoir cherché de correspondre aux attentes de tout le monde ? Même quand elle est ce mélange-là, quand sa personnalité est un peu trop cassée, un peu trop brisée pour plaire à tous ?

Elle a envie de lui répondre que c’est impossible, cette pureté de relations, que ça n’existe pas, que personne ne sait tout et peut accepter tout. Pandora ne sait pas, pour sa vie de pauvresse ; Olivier ne sait pas, pour les déchirures familiales ; même à Mara, née-moldue comme elle, plus à même peut-être de comprendre ces choses-là, elle ne lui a rien dit. Parce qu’ils ne peuvent pas comprendre, les gens, ils ne peuvent pas aimer des personnes aussi nulles, aussi sales, aussi… Non, vraiment. L’exemple de ses parents est flagrant. Ça se déchire. Ça ne s’aime pas, quand on sait trop.

Elle ne dit rien, pourtant, parce que ses doigts se glissent sur son bras, et un frisson lui remonte l’échine. Le geste est tranquille, discret, mais fort de pouvoir. Cette pression, délicate, semble la ramener sur terre, la faire souffler un peu, son torse se relâchant, ses lèvres retrouvant le goût de l’air. Elle sent son corps se tendre un peu plus vers lui, s’abreuvant du contact. Doux, humain, sans arrière pensées. Juste là. Près d’elle, pour elle.

Sa tête lui tourne un peu, cherchant à assimiler ce qu’il lui dit, ce qu’il souffle pour la rassurer, pour la redescendre de sa panique. Elle a le droit d’avoir peur ? Vraiment ? On ne lui a pas laissé le temps d’avoir peur, pendant la guerre, on l’a poussée au loin, puis on l’a rappelée, allez, viens maintenant, tu es de nouveau bien utile pour ce pays, pour qu’il survive. On ne lui a pas laissé le temps d’avoir peur, non plus, quand on l’a repoussée à prendre le vol en tant que professionnelle, pour redonner coeur au peuple – alors ça la fait frissonner, ces mots qu’enfin on lui murmure. Avoir peur. De ne plus pouvoir voler, de ne plus savoir quoi faire de sa vie. Elle a tout misé dessus, c’est la seule porte qu’elle a vu s’ouvrir devant elle, la seule chose sur laquelle elle s’est lancée, sans réfléchir, la passion faisant vibrer son sang.

Ses traits s’étirent en un semblant de sourire quand il fait référence à Bill, encore, ce grand-frère qui lui a permis, à lui aussi, de trouver comment se canaliser, s’accepter, comme ce qu’il essaie de lui insuffler aujourd’hui. Elle ferme les yeux, de brefs instants, alors qu’il lui rappelle l’ampleur que peuvent prendre ses soucis, et ce n’est que le contact, plus fort encore, de ses doigts sur son bras qui lui permet de rester calme. Elle hoche la tête, inspirant profondément, sa voix un peu tremblante quand elle souffle :

« Je ne sais plus vraiment. Ce n’était qu’à moindres effets, au début. Ça a commencé il y a quelque mois, peut-être. Des sensations désagréables, un peu les yeux qui vrillent, mais je l’ai mis sur le compte de l’altitude, du jeu, de la vitesse, je ne sais pas – tout sauf ça. Sauf que ça a continué, ça s’est empiré. Les dernières semaines, j’ai eu des vertiges un peu plus longs, de vraies longues secondes. »

Elle inspire, comme se refusant presque à dire ces mots, mais ils sortent, avec angoisse, parce qu’elle sait qu’il comprend – elle l’a vu, elle l’a senti, dans ce geste – qu’il comprend l’angoisse de ne plus pouvoir profiter de l’air dans ses cheveux, du souffle du vent, même de la pluie drue qui cogne la peau.

« Mardi dernier, je n’ai pas pu m’élever. Pas un centimètre. Bloquée au sol, dans un foutu champs, le ciel qui m’attend – et je n’ai pas pu voler. C’était la première fois que c’était aussi… aussi fort, aussi horrible. Je me suis imaginée aller à l’entraînement, le lendemain, tous les yeux sur moi, et ne pas pouvoir voler. Punaise, Charlie – tu imagines ? » Elle s’est penchée vers lui, encore un peu, faisant glisser sa main sur son bras. « J’ai fini par en parler à l’entraîneur, aujourd’hui, j’avais trop peur que ça devienne dangereux. » S’imaginer finir au sol, de ne pas avoir pu réaliser suffisamment tôt son mal être, serait plus terrible encore, après tout.  « Ils ne veulent pas s’engager trop tôt mais ça a une tête de maladie, du genre qu’on ne sait pas encore traiter, » soupire-t-elle, un sourire amer lui tombant sur les lèvres. « Ça peut tout me ruiner, du jour au lendemain, et je ne peux même pas prévoir quand, je ne peux qu’attendre que ça me tombe dessus. »

Elle l’observe, de longues secondes, se mordillant les lèvres, le coeur un peu plus calme d’avoir tout sorti.

« Qu’est-ce que tu ferais, toi, si tu ne pouvais plus faire ce que tu aimes ? »


1112 mots
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Sam 18 Avr - 1:09

When I last saw you laughing@Georgia R. HarrisCharlie


16 février 2004

Malgré l'épaisseur de son pull, je sens Georgia trembler un peu, comme chercher le contact. L'accepter en tout cas, ce qui me rassure. Une part de moi craignait qu'elle ne s'en dégage, engoncée dans son besoin de paraître inatteignable. Mais elle n'en fait rien et mon pouce s'enhardit à tracer quelques arabesques sur le coton. Qu'elle semble fragile, ainsi blottie entre deux coussins, comme une enfant qui se construirait un château de ses couvertures pour mieux se cacher du monde extérieur, pour s'imaginer princesse en sa demeure de douceur.

Oh Merlin, elle me renvoie si loin... Au gamin dissimulé sous sa couette, qui observait les étoiles brodées sur le tissu, une figurine de dragon au creux des mains, espérant tout oublier. L'éclat d'une colère de Maman, l'angoisse d'aller à Poudlard et de quitter la maison, le vacarme de la goule tapant dans le grenier, l'exercice de mathématiques du lendemain matin, les oreillons des jumeaux. Et toujours, il y avait ce coin de lumière pour apparaître au bout du lit, ces yeux mi-inquiets, mi-moqueurs qui réussissaient invariablement à me faire sortir de ma cachette.
En cet instant, je réalise une fois de plus la chance que j'ai eu d'avoir pareille constante dans ma vie. De savoir qu'en tout moment, en tout temps, je pourrais compter sur mon frère comme lui sur moi. Est-ce cela, qui a manqué à Georgia ? Cette présence inébranlable, qui vous autorise tout, toutes les faiblesses, tous les pleurs. Ce tremplin sur lequel rebondir.

D'une voix hésitante, elle reprend ses explications. Les symptômes qu'elle décrit pourraient paraître anodins. Il nous est tous arrivé de sentir la dépression compresser un peu trop nos poumons, le sang battre trop vite à nos tempes, protestant après un looping de trop, une énième chandelle à la vitesse infernale. L'oreille interne peut vite s'offusquer des excès infligés par l'ivresse du vol, vibrant jusqu'à nous faire oublier toute gravité, amenant sur nos lèvres cette nausée légère si caractéristique. Et honnêtement, qui s'en préoccupe ? Mais les vertiges, eux, sont autrement plus inquiétants, par le risque évident qu'ils présentent. Comment imaginer qu'une joueuse puisse perdre connaissance à tout moment pendant le match ? Jamais une équipe ne prendrait le risque de l'avoir en son sein, sans parler du danger pour sa vie. Les stades de Quidditch sont surveillés de près, mais un accident, une inattention sont si vite arrivés... Et une chute de balai peut rapidement avoir des conséquences dramatiques.

Samedi dernier, donc ? Le jour où j'ai récupéré Olivier à demi-frigorifié sur le pas de ma porte. C'est intéressant, est-ce qu'elle savait qu'il venait de jouer la fille de l'air ? Si oui, serait-il est possible que les préoccupations empirent le phénomène ? Par Merlin, je me sens complètement démuni face à ce qu'elle me décrit, je n'ai jamais entendu parler de quelque chose de semblable. Pourtant, Le Quidditch à travers les âges a trôné sur ma table de nuit des soirées durant, presque autant que Les animaux fantastiques. Mais je ne garde aucun souvenir d'une maladie de ce genre. Et en médicomagie, mes compétences sont à peu près similaires à mon talent pour la divination... Je ne me suis pas départi de mon sérieux au fil de ses explications, mais sa conclusion me rassure. « Tu as probablement bien fait de leur en parler. Au moins, tu auras un suivi médicomagique nécessaire, ce ne peut être qu'un bonne chose. »

Mes poumons se vident, j'expire en secouant la tête. « Mais non, j'avoue qu j'imagine difficilement. Même si je ne suis pas devenu pro, voler reste aussi vital pour moi que ça l'est sans doute pour toi, et une part importante de mon métier au quotidien. » Difficile d'accompagner des dragons dans leurs déplacements sans pouvoir se hisser à leur hauteur. Sans balai... je n'aurais plus grand chose d'un dragonnier. Rien qu'un magizoologiste cloué au sol. L'idée est terrifiante, mettant plus encore en abîme la souffrance que doit endurer Georgia à cette idée.

Quelques secondes s'écoulent avant cette question inattendue. D'autres encore avant que je ne trouve une réponse à lui apporter. « À vrai dire... Je n'en sais rien. J'évite généralement de me poser ce genre de questions... » Pour ne pas succomber à l'angoisse perpétuelle qu'elles susciteraient. « ... pour essayer d'avancer sereinement, jour après jour. » L'hésitation reste en suspens, alors que je tente de trouver un élément concret auquel me raccrocher. Que faire, si mes dragons n'étaient plus une option ? Partir voyager ? Non, je l'ai déjà fait une fois mais aujourd'hui, m'éloigner ne serait plus la solution. Fataliste, je hausse les épaules. « J'imagine que je reviendrais en Angleterre. Que j'essayerai de trouver un métier en lien avec d'autres créatures magiques. » Et après une seconde de doute, j'ajoute : « Et toi... ? »

Georgia R. Harris

Georgia R. Harris
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Sam 18 Avr - 5:02
When I last saw you laughing
Georgia Harris & @Charles Weasley
True colors - Cyndi Lauper

Février 2004

A-t-elle vraiment bien fait d'en parler à son équipe ? Si les mots de Charlie se font rassurant, notant le suivi potentiel par son médicomage que cela implique, Georgia est obligée de secouer la tête, moins enthousiaste, plutôt même terrifiée. C'est bien une des raisons qui font qu'elle n'ose pas en parler à Olivier, cette affaire : l'idée qu'ils la lâcheront, lui, l'équipe, tous probablement, parce qu'elle deviendrait trop dangereuse. Pas assez fiable. Qu'a-t-on besoin d'une joueuse qui peut tomber au sol, faire perdre l'équipe, se blesser, ruiner la côte, bref, trop de potentialités catastrophiques qu'il vaut mieux ne pas trop s'imaginer.

Je ne sais pas si j'ai bien fait, je t'avoue, j'ai un peu peur qu'ils me poussent hors du terrain bien plus rapidement que je ne l'aimerais, s'ils s'imaginent que je vais moins bien, ou si… enfin, tu sais bien, en tant que joueur, on resterait bien aussi longtemps qu'on le puisse, avoue-t-elle, remettant d'un geste las ses cheveux qui tombent dans tous les sens.

Elle se fond dans le canapé, son dos venant retrouver le dossier, quittant momentanément le contact rassurant des cercles distraits des doigts de Charlie sur son bras, pour bien vite les sentir à nouveau effleurer sa nuque. Elle frémit, probablement autant surprise que lui par ce contact presque intime, tombé sur eux par son changement de position non réfléchi. Elle ne bouge pas, pourtant, espérant inconsciemment qu'il laisserait sa main là, l'entourerait plus encore, la plongeant une nouvelle fois dans ce cocon qui la déstabilise. Pourquoi s'y refuser, seulement, dans une situation pareille ? Sa grosse expiration lui fait tourner la tête vers lui, ils ne sont plus trop loin, maintenant, et elle peut d'autant mieux voir la lueur concentrée sans les yeux de Charlie. Elle sent un poids qui s'allège, quelque part dans le fond de son cœur, de faire face à quelqu'un d'aussi intéressé, d'aussi sérieux, d'aussi respectueux. Elle grimace, pourtant, devant sa réponse, bien obligé qu'il est d'admettre son incapacité à se projeter.

C'est sûrement pour cela que la question lui a échappé, à la poursuiveuse, pour entendre de la voix d'un autre le désastre que cela serait. Combien même c'est impensable à imaginer. Pour Charlie, où la passion du Quidditch se lit encore dans le pétillement de ses yeux, mais où l'amour de la voltige avec les dragons se fait entendre de vive voix, comment donc s'imaginer privé de tous ces plaisirs-là ? Elle secoue la tête, Georgia, et ferme brièvement les yeux.

« C'est presque impossible à imaginer, c'est bien ça le soucis, » soupire-t-elle.

Ses prunelles retrouvent le chemin des siennes, et elle plisse le nez quand il annonce, avec un air presque désespéré, qu'il serait bien obligé de revenir au Royaume-Uni. Malgré elle, malgré cette discussion des plus grisâtres, Georgia sent ses lèvres s'élever et un rictus amusé qui échapper.

« Merlin, est-ce la Roumanie qui y est si douce ou notre pays qui est si affreux que tu te trouves avec cet air horrifié ? »

Elle ne le quitte pas du regard, observant les tâches de rousseurs ça et là sur sa peau, le pli dans le coin de ses yeux, les pommettes plus relevées, et enfin, consent à répondre à sa question.

« Je n'ai jamais réfléchi à ce que je pouvais faire d'autres, je crois. Non, c'est faux - je n'ai jamais réfléchi à ce que je pouvais faire tout court. Si je me suis lancée dans le Quidditch, c'est parce que des personnes suffisamment futées ont su m'encourager à tenter d'impressionner les recruteurs, ce jour de match-là. Mais avant ça, malgré mon amour démesuré pour ce sport, c'était totalement improbable de m'imaginer en vivre. Ce n'était que ça, un sport, comment est-ce que cela pouvait m'apporter une once de sécurité, de bonheur, que de me projeter là-dedans, dans un succès flou, dans un métier de passion ? Alors, mon dieu, si je me retrouve au sol, je n'ai vraiment plus rien. Je n'arrivais pas à me projeter, ni dans le monde sorcier, ni dans le monde moldu, à la sortie du Poudlard, sans le Quidditch, et je crois que je serai tout aussi incapable de faire ces mêmes choix aujourd'hui. »

C'est quelque chose de terrible à penser, qui plus est à imaginer, que de projeter sa vie sans rien. Sans métier, sans ambition, sans avenir. Parce que le Quidditch, ce sont les matchs, les défis incessants, les sélections nationales, les potentialités de mondiaux, les rivalités entre joueurs, les postes d'assistants, quand le corps devient trop vieux, les postes d'entraîneurs, pour mener son équipe à la gloire. C'est toute une vie de tracée, forte de beauté, plus enthousiasmante que tout ce qu'elle aurait pu s'imaginer. Là, avec ce début de carrière, bien que florissant, si elle s'arrêtait maintenant, c'était terminé.

« À la fois, je n'ai jamais trop eu à m'imaginer, une fois ce chemin trouvé, ce que j'allais devoir faire pour m'assurer qu'il ne s'enlise pas, » ajoute-t-elle, sourcils froncés. « J'imagine que ça n'a pas dû être tout évident pour toi, de tout plaquer pour rejoindre des réserves à des milliers de kilomètres - et, pourtant, tu me le dis toi-même, on n'imagine rien d'autres. »

Un soupir, et les yeux qui fatiguent.

Alors oui, que faire, après, si sa vie se voit faire un salto arrière ? Pour un peu, elle s'imagine déjà revêtir à nouveau l'uniforme du diner à l'américaine où bosse son frère - promu manager de salle, maintenant, et ce titre est bien loin des vies de costards qu'ils s'imaginaient gamins. L'idée lui fait se mordre la lèvre, et elle secoue la tête, s'y refusant davantage. Ce n'est pas que c'était un métier moindre, pour s'être usé les poignets et les sourires, elle sait combien c'est une force de travail. Mais l'ambition, la réussite, l'envie de se dépasser chaque jour - Merlin, la liberté ! Rien que la liberté qu'offre de pouvoir s'envoler dans les airs pour son métier. Comment rivaliser ? Elle frémit, la tête penchée vers Charlie, ne supportant plus cette discussion pesante.

« J'espère que ça ne m'empêchera pas de bouger un peu, au moins. » Ses lèvres révèlent un sourire doux, invitant, quand elle ajoute, après un temps d'hésitation : « J'ai entendu dire des merveilles des montagnes roumaines, tu connais un peu ? »

Si quelque chose peut lui détourner les pensées de ses constatations déprimantes, c'est bien l'enthousiasme dont semble à chaque fois faire preuve l'homme à ses côtés lorsqu'il est question de l'étranger, de sa vie de liberté, dans les terres roumaines. Étirant ses mains devant elle, Georgia observe ses manches trop longues, son sweat trop grand et retient un soupir. Elle ne sait pas si ça va mieux, peut-être un peu, ne serait-ce que d'avoir pu exprimer ce qui lui pèse, d'avoir une oreille patiente en face d'elle, mais elle sait aussi que si la discussion s'enraye, si elle a trop le temps d'imaginer l'après, les souffles courts vont revenir, les tremblements vont la reprendre, le nœud va lui repeser dans l'estomac. Alors, vite, Charlie et ses terres lointaines.


1151 mots
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Dim 19 Avr - 0:13

When I last saw you laughing@Georgia R. HarrisCharlie


16 février 2004

Rester dans les airs, aussi longtemps que possible. Sans prêter attention ni à la pluie qui fouette le visage, ni au vent qui s'insinue sous chaque pli de vêtement, ni au froid qui saisit les doigts figés sur le manche du balai. Bien sûr que je comprends cette envie, ce besoin qui pulse dans nos veines depuis la première fois où nous en avons découvert l'existence. Combien de fois l'équipe de Gryffondor m'a-t-elle maudit pour ces entraînements interminables auxquels je ne mettais fin que bien après la nuit tombée ? Combien de fois Maman m'a-t-elle menacé de ne rien me garder à manger si je ne dépêchais pas de ranger mon Brossdur et de me laver les mains pour passer à table ? Et encore aujourd'hui, combien de fois mes collègues m'ont-ils rappelé qu'il n'était pas prudent de rester seul au milieu de nos protégés, quand tous n'aspiraient qu'à retrouver famille et foyer ?
À vrai dire, c'est sans doute ce qui a été le plus difficile, au sortir de Poudlard. Comme beaucoup, j'ai regretté de quitter l'école qui m'avait tant appris, le château qui était devenu un second foyer. De ne plus pouvoir arpenter les couloirs, discuter avec les professeurs, représenter fièrement l'héritage de Godric Gryffondor. Mais plus encore, plus que tout, ça a été d'abandonner cette équipe de Quidditch que j'avais sélectionnée et entraînée, investissant mes soirées, mes week-ends et une bonne partie de mon temps libre sur ce terrain.

Georgia se réinstalle plus confortablement et mes doigts effleurent par mégarde la peau blanche de son cou, si douce en comparaison de ma paume calleuse. Un instant, elle se raidit, comme prête à prendre la fuite. A-t-elle senti ma main se figer, suspendre tout geste dans une attente prudente ? Mais elle semble s'en accommoder, son cou délicatement tendu cherchant le contact, et je dissimule un sourire, qui vient s'accorder au sien.

Oh, il y aurait beaucoup à dire sur tout ce que j'aime et regrette dans ma vie actuelle. Tant de choses qui me comblent, d'autres qui me frustrent. Certaines sans lesquelles je peine à imaginer mon futur et d'autres encore qui me manquent jour après jour. À sa question un rien moqueuse, je ne réponds pas toutefois, n'esquissant qu'un haussement d'épaule, une fossette amusée se creusant sur ma joue. Un jour, plus tard peut-être, je lui raconterai. Mais pour l'instant, sa réponse m'intéresse bien davantage. Tandis qu'elle réfléchit, mon regard se perd sur le haut de son crâne, admirant les reflets dorés du plafonnier sur ses cheveux, en feignant d'ignorer ses yeux curieux qui courent sur mon visage. Comme ses pensées se perdent vers cet avenir qui l'inquiète tant, à raison, ses muscles se crispent à nouveau sous mes doigts qui reprennent leur mouvement machinal.

« Elles ont eu raison, ces personnes, si j'en crois Olivier et Ginny. Il paraît que tu voles superbement. » Et je lui souhaite si fort de pouvoir continuer... Un soupir hésitant m'échappe. « Je sais que c'est facile à dire... mais je ne pense pas que tu aies à te préoccuper de cela maintenant. Aujourd'hui, tu peux toujours voler, en profiter. Et si la question vient à se poser, dans un an, dans dix... Il sera toujours temps d'y réfléchir sérieusement à ce moment-là. » J'en ai conscience, ce genre de discours n'est jamais plaisant à entendre : cesser de s'inquiéter, et comment ? Après des années de pratique, les résultats n'en sont toujours pas probants et pourtant, je sais que je suis parvenu, un petit peu au moins, à apaiser mes journées à force de vouloir en chasser les pensées parasites pour me concentrer sur celles qui me rendent heureux, me distraient et m'enchantent.

Penser à autre chose. Dans sa façon de m'interroger sur la Roumanie, l'envie de changer de sujet est limpide. Le besoin d'éloigner pour un temps l'ombre malaises qui menacent son train de vie et son avenir tout entier. Alors à mon tour, je me réinstaller contre le dossier du canapé, sans ôter ma main pour autant, prêt à lui conter la beauté des montagnes, leur magie quand la neige les recouvre d'un manteau immaculé, leur pétillement de vie quand le printemps revient faire courir mille et unes créatures sur les vallons. La pureté de l'air sans commune mesure avec la pollution de Londres. Quelques secondes, je laisse ces images venir à moi avant de commencer.

« La Roumanie... c'est magnifique. Moins peuplé que l'Angleterre, plus sauvage.
Pour répondre à ta question de tout à l'heure, j'aime l'Angleterre, j'y suis chez moi et j'ai encore énormément d'attaches ici alors ce ne serait pas si affreux d'y revenir. Mais là-bas, on se sent tellement libre. Ça va bientôt faire quinze ans que je m'y suis installé et ce sentiment continue de m'emporter chaque matin quand je me réveille dans la vallée, seul au monde entre la terre et le ciel.
» Est-il si grand, le sourire qui monte à mes lèvres en évoquant la combe d'herbe douce où j'ai bâti ma maison ? Probablement... Et je me souviens encore si bien du mélange d'exaltation et d'angoisse absolue qui m'habitait le jour où j'ai mis le pied là-bas pour la première fois. « À vrai dire, ça n'a pas été si difficile, au départ. Bien sûr, il y avait la peur de partir si loin mais ça faisait si longtemps que je savais qu'un jour je travaillerais avec des dragons... Quand le responsable de la réserve m'a proposé un stage en réponse à mon hibou, je n'ai pas réfléchi deux fois. » Au souvenir de ma réaction ce jour-là, je laisse échapper un rire pensif. « Merlin, personne n'en revenait que je prenne une décision aussi rapidement. Et pourtant, je n'avais jamais été aussi sûr de rien. Et c'est ce qui rendrait le retour aussi difficile : aujourd'hui, je me sens aussi roumain qu'anglais. Ma vie est là-bas. »
Car malgré l'apparente isolation de mon toit et l'immensité des montagnes, les liens que j'ai tissé avec les autres dragonniers sont de ceux qui ne se créent que dans les risques partagés. Et tout solitaire que je sois, j'y suis bien plus entouré que ceux qui se croisent jour et nuit dans les rues de Londres sans même s'y voir.

Georgia R. Harris

Georgia R. Harris
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Lun 20 Avr - 1:41
When I last saw you laughing
Georgia Harris & @Charles Weasley
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Février 2004

La chaleur des doigts de Charlie, qui poursuivent leurs mouvements distraits sur sa peau, faisant frémir sa nuque, parvient presque à apaiser le corps tendu de Georgia, qui déjà s’effraie des mois à venir. Elle s’abandonne au contact, une fois encore, expirant profondément alors que Charlie tente de la rassurer. Un semblant de sourire vient trahir le mouvement d’allégresse qui la prend, quand il glisse un compliment sur son vol.

« Je sais, je sais, c’est absurde d’en paniquer maintenant, qui sait – ça n’évoluera peut-être pas, et dans dix ans, j’y serais encore, mais…, » Ses mots restent en suspens, fermant brièvement les yeux pour renvoyer au loin les pensées désastreuses qui tentent inlassablement de se faufiler dans son esprit. « C’est juste beaucoup trop imprévisible, et je n’aime pas ça du tout. »

Tout le monde le sait, après tout – c’est une vie ordonnée, une vie bien rodée, que la jeune femme suit. Une chrono huilée, des plages horaires organisées, des temps de plaisirs, des moments soirées, des heures précises qui viennent tout cadrer. Ajouter à l’improviste une ligne « fin de carrière », ce n’est pas vraiment dans ses plans, merci bien. Charlie a raison, pourtant, il ne sert à rien de se paniquer, de s’angoisser, sur des probabilités, des questionnements sans réponse. Son sourire est chaleureux, invitant à toute autre discussion, quand elle le lance sur la Roumanie. Elle ne se représente absolument pas le pays, n’étant jamais sortie du Royaume-Uni. Quoique l’Irlande, si, mais c’est pareil, finalement. Même langue, même sourires, même air gris et purifiant. La Roumanie – c’est… non, ce n’est rien du tout. Elle ne pourrait pas y placer un qualificatif. Elle n’a jamais joué contre des roumains, qu’elle sache, et ça ne lui a jamais traversé l’esprit de se demander à quoi ça peut bien ressembler. Elle se rappelle avoir vu le nom lors des cours de géographie à l’école, en primaire, sur leurs cartes du monde, mais de là à ce qu’elle souvienne s’ils en ont parlé plus que cela… C’est quelque part vers l’Est, de mémoire ?

Bien vite, pourtant, les mots de Charlie se délient. L’homme s’agite, se replaçant confortablement, et Georgia l’observe se remettre à parler, plus volubile que jamais. Ça lui fait briller les yeux, de le voir comme cela. C’est la constante qu’elle a été obligée de remarquer, chez lui, confrontée à elle à chaque occasion. Ses yeux s’éclairent toujours, sa voix devient plus agitée, ses gestes plus fréquents. Là où Georgia s’abandonne à son accent de geordie quand la passion la prend, Charlie devient dragonnet passionné, le sourire éclatant. Il a ses fossettes qui se creusent, encore, quand il parle de liberté, et Georgia en frissonne presque. De la notion de liberté, évidemment. Pas des fossettes. Évidemment.

Malgré ces mots, son enthousiasme évident, Georgia peine toutefois à imaginer concrètement l’état de la Roumanie. Des vallées ? Comme celles galloises, alors ? Elle ne dit pas, c’est très beau, les vallées galloises, qu’elle a eu maintes fois l’occasion d’arpenter avant les matchs contre les Harpies – mais pourquoi diable s’en aller à l’autre bout de l’Europe si c’est pour de simples vallées ? Ah oui, les dragons. Un sourire attendri lui échappe, à l’image qu’il invoque, d’un Charlie tout jeune, coincé entre sa vie anglaise, ses attaches ici, et le rêve fou que lui offrait cette occasion de stage. Son rire répond à son sourire, alors qu’il respire la nostalgie. Sa vie est là-bas, alors ? Que peut-elle répondre à cela ? Elle ne s’est jamais imaginée ailleurs qu’au Royaume-Uni – et peut-être qu’elle s’y plairait, ailleurs, peut-être même que ce serait plus facile, parfois. Mais lui, cela fait presque quinze ans, selon ses mots. C’est long, et c’est peu étonnant qu’il s’y soit autant attaché. Elle s’imagine qu’il ne doit pas revenir si souvent que cela, l’idée lui faisant presque froncer les sourcils, mais elle se concentre sur les yeux pétillants de Charlie.

« Je ne suis jamais sortie de nos terres, je t’avoue, alors j’ai un mal fou à imaginer ce qu’il y a de si différent, de si revigorant, pour que ça en devienne une si grosse part de ta vie, » débute-t-elle, dépliant ses jambes, qui viennent se poser sur la table d’un geste. Elle glisse un peu dans le fond du canapé, se demandant s’il trouvait la même jouissance qu’elle, quittant le fin fond de Newcastle pour la majesté de Londres, en allant s’évader dans ses vallées roumaines ? Ce n’était pas la même échelle, pas le même décalage, mais peut-être le même ressenti. Elle lui glisse, d’un sourire, « Pour que ça te rende volubile comme ça, pourtant, aucun doute possible, ce doit être un endroit passionnant. » Curieuse, elle se redresse un peu, étirant ses muscles endoloris. « Ta famille vient te voir, des fois ? J’imagine que c’est plus facile pour toi de venir, si tu es seul... ? » À moins qu’une roumaine ne partage sa vie, assurément. Ou une anglaise, peut-être, attirée comme lui par ces contrées éloignées. Ou seul, semble déterminé à souhaiter son esprit. Elle reporte ses yeux sur lui, happée par ses bouclettes, avant de se détourner à nouveau, le haut des pommettes rosies. Quelle imbécile. Elle hésite à s’éloigner, plutôt, à quitter à regret le confort que lui apporte sa peau sur la sienne, et retient un long soupir. Elle est là depuis trop longtemps, à abuser de sa gentillesse, à laisser ses pensées s’envoler. D’un geste las, elle se décale un peu, son genou cognant contre le sien. « Désolée, » grimace-t-elle, s’éloignant davantage. Ses yeux se perdent sur la table basse, cherchant quoi lui demander, pour avoir une raison de rester encore un peu plus longtemps ici, à ses côtés. Pour ne pas être seule, avec ses pensées, absolument. « Tu n’as été qu’en Roumanie ?, » finit-elle par demander, songeuse. Les terres roumaines ne peuvent pas être les seules à avoir des dragons qui voltigent dans leurs cieux. « Pour les dragons, je veux dire, » reprend-elle. Elle ne sait pas trop pourquoi elle l’a ajouté, ça – peut-être une façon de justifier son intérêt pour lui, pour sa vie.

Il est intrigant, à la fois, ce rouquin à la main si douce, déjà regrettée. Avec sa vie à l’étranger, son métier atypique, son sérieux teinté d’humour. Elle n’a pas eu l’occasion de parler aussi longuement avec quelqu’un, d’autant plus si inconnu, depuis, Merlin, des semaines, des mois, peut-être. C’est tout ce qu’il lui fallait, ce soir, évidemment, mais même sans cela, il y a quelque chose d’enthousiasmant à pouvoir échanger ainsi avec Charlie. Des heures qui défilent, sans qu’ils ne s’en rendent compte – entre le match et ce soir, c’est tout de même quelque chose. Elle n’aime rien tant que cela, Georgia, ces moments de murmures et de rires au creux de la nuit, à découvrir des choses l’un sur l’autre. Un moment doux, au parfum d’amitié. Peut-être, qui sait.

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Lun 20 Avr - 22:21

When I last saw you laughing@Georgia R. HarrisCharlie


16 février 2004

Ce n'est jamais absurde, de s'inquiéter de ce que sera l'avenir. Vain et impossible, sans doute, mais pas absurde. Rares sont ceux qui se complaisent vraiment dans un carpe diem sans jamais se poser de questions sur le chemin que leurs pas emprunteront. Il m'a fallut un an, un an de voyages et de rencontres pour cesser de vouloir prévoir l'imprévisible. Et encore aujourd'hui, je me surprends régulièrement à vouloir anticiper les imprévus du lendemain.

Il y a comme un goût d'excuses dans son ton hésitant, dans ses yeux clos. Et tant d'incertitude dans cette façon qu'elle a de s'en vouloir pour des choses si naturelles. Ma paume contre son cou se pose délicatement, dans une tentative de geste rassurant. « Ça n'a rien d'absurde, c'est normal ! On s'inquièterait à moins. » Derrière ses manières et ses paillettes, elle semble si fragile, cette princesse sans personne à qui avouer ses peurs et ses faiblesses.

Elle me renvoie à mes préjugés, à ce que j'ai découvert dans ces montagnes où je ne m'attendais qu'à une solitude oppressante. Après avoir grandi dans une famille nombreuses, fait mes classes dans un château fourmillant de vie et de présente (Peeves et les fantômes n'étant pas des moindres !), l'idée d'aller m'enterrer au bout de l'Europe avait quelque chose d'angoissant. Pas une seconde cette éventualité ne m'a fait hésiter, par Merlin cette opportunité, c'était mon rêve ! Mais les premières nuits, allongé seul dans la cabane silencieuse qui m'avait été attribuée, la tentation avait été si grande de renoncer. Je m'imaginais déjà, partant comme un détraqueur dans la nuit, sans faire de bruit. Mais il y avait eu ce ronflement à faire trembler la montagne, venu jusqu'aux murs de bois qui m'abritaient. Le hululement d'une chouette effraie au loin. Le souffle du vent contre les vitres. Et à force de les écouter, l'ouïe aux aguets, j'avais fini par m'endormir.
Et dès le lendemain, une tornade de bienveillance m'avait entouré avec tant de force et d'affection que partir n'avait dès lors plus été une option. Là, dans ces lieux isolés où plusieurs kilomètres séparent les habitations les unes des autres, j'ai découvert une communauté soudée par des liens indestructibles. Il y a Pavel, qui me contait les dragons, partageait son expérience inépuisable de sa voix grave et posée. Magda, son alcool de prunes dirigeables et ses petits plats. Antonio et Sorina, mes amis de la ville, complices de mes tentatives de brassage farfelues. Diego, Sullivan, Isabel, André et les autres. Et Ana... Ana à la chevelure si noire, aux yeux si sombres, à la peau si douce. Ana qui m'avait bien fait comprendre qu'elle n'avait pas de place dans sa vie pour autre chose qu'un amant occasionnel.
C'est cette communauté, cette famille qui s'est imposée dans ma vie comme une constante inébranlable. Ensemble, nous avons célébré des naissances, porté le deuil, refait le monde des nuits durant, vu des amis repartir vers d'autres horizons, construit des maisons pour accueillir de nouveaux arrivants venus nous rejoindre, avec toujours la même passion, la même flamme pour ces seigneurs des cieux auxquels nous avons voué nos vies. C'est un tout qui fait de ces vallées mon foyer, un tout que j'aimerais être capable de lui décrire. « C'est un endroit magnifique, oui. Mais il n'y a pas que les paysages. C'est aussi... une solidarité, une entraide, presque familial. Chaque dragonnier sait qu'il peut compter sur les autres, c'est indispensable vu les risques que nous prenons tous les jours. Et bien sûr, il y a les dragons. Quand ils s'élèvent à travers les nuages, à mi-chemin entre le ciel et les prés... Je ne connais rien de plus beau. »

Alors oui, le seul point noir, c'est cette distance qui me sépare de mon autre monde, fait de têtes rousses, d'amis d'enfance et de brouillard. Les portoloins existent, Godric merci !, permettant d'adoucir les voyages pour se retrouver régulièrement, même si mes finances en pâtissent considérablement. Mais au moins le transfert est-il rapide. Je ne sais comment j'aurais fait, s'il m'avait fallu, comme Dennis le mois dernier, passer des jours entiers dans les transports. « Mes parents sont venus quelques fois. Ginny aussi. Et Bill, bien sûr. » Encore heureux ! « Mais je rentre régulièrement, aussi souvent que possible. C'est plus simple pour moi de me déplacer, sans compter que je n'ai pas la place d'accueillir une famille nombreuse chez moi. » Ce qui, de toute façon, ne risque pas d'advenir dans les jours prochains...

Georgia se décale, rompant le fil, et je me sens soudain ridicule, d'avoir laissé si longtemps la main effleurer sa peau. Elle vient se perdre dans mes boucles, reprenant contenance malgré la gêne légère. Mais déjà, elle en chasse les effluves d'une nouvelle question, qui me tire un rire. « Tu n'en as pas marre de m'entendre parler ? Je pensais pourtant que tu commencerais à en avoir marre de mes monologues. » L'étincelle amusée revient pétiller dans mes yeux, croiser les siens. « Pour travailler, oui, je n'ai été qu'en Roumanie. Mais j'ai pas mal voyagé. Le Canada, les États-Unis, les Andes, le Pérou, l'Australie, la Chine, l'Inde, la Norvège et la Finlande... Et j'y ai cherché des dragons, évidemment ! Il n'y a que le continent africain où je ne suis jamais allé. J'ai eu... » Mes mots butent sur ces souvenirs, sur l'origine de ce voyage dans lequel je me suis lancé à corps perdu, sans préparation ni plan défini. « J'ai eu une période difficile. La guerre. Alors je suis parti, un an, pour voir le monde. »

Mon regard pensif se perd sur le plafond immaculé. Pour le coup, c'est moi qui n'ait guère envie de ressasser ces instants. Les mémoires des pays visités, des rencontres innombrables, des paysages et des coutumes sont autant de pépites conservées soigneusement. Mais des circonstances qui m'ont poussé à tout laisser, sans une pensée en arrière, je ne tiens pas à parler.
D'où ce changement de sujet, ramené au présent par mon ventre d'où monte un grondement léger. « Merlin, quelle heure est-il ? Tu me fais totalement perdre la notion du temps ! Est-ce qu'il ne faudrait pas appeler ce restaurant, avant qu'il ne soit trop tard ? »

Georgia R. Harris

Georgia R. Harris
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Mer 22 Avr - 0:07
When I last saw you laughing
Georgia Harris & @Charles Weasley
True colors - Cyndi Lauper

Février 2004

Les yeux rêveurs, Georgia est des plus confortablement calées, et son esprit divague au loin. Elle s'imagine les terres que Charlie lui décrit, l'horizon qui se détache où planent les dragons. Elle ne sait combien ils en ont, dans leur réserve, et ce sont toujours les quatre mêmes images qui viennent flotter dans sa tête, les quatre dragons du tournoi, détachés cette fois, errant librement, voltigeant entre les courants d'air. Elle ne sait pas s'ils peuvent tous voler ensemble, s'ils sont reclus par espèce, si même Charlie côtoie plusieurs espèces, mais ça a si peu d'importance, vraiment. Les yeux toujours chauds de cette imaginaire enfantin qui se déclenche, à chaque fois qu'il mentionne les voltiges des dragons, Georgia reporte son attention sur lui. Si l'idée d'une grande famille qui se serre les coudes à toutes occasions lui paraissait bien douce, elle ne peut que se demander ce qu'il en est de ceux qui sont de sa vraie famille. Bien qu'elle gronde incessamment sur ses frères et sœurs, bien qu'ils ne se voient qu'une fois tous les six mois, et encore, Georgia sait tout de même que leurs pieds restent sur leur même territoire, qu'un train les relie, qu'un balai les mènent l'un à l'autre sans trop d'ennuis. Charlie ne doit pas inaccessible, évidemment, mais de là à ce qu'il soit aussi simple d'accéder à ses montagnes roumaines que d'arriver à Newcastle, vraiment ? Elle hoche la tête, avec un sourire, quand il la rassure qu'ils sont déjà venus, oui, même si il ne cite pas tous les noms des Weasley. Son sourire s'agrandit un peu lorsqu'il ajoute Bill, forcément. Qu'a donc de si particulier ce grand frère pour que Charlie lui voue tant d'affection ? À la mention de la famille nombreuse, Georgia s'imagine quelques instants plongés dans une petite maison - vu qu'il a l'air de vivre seul, apparemment -, avec toute leur flopée de frères et sœurs, et tous les petits qui doivent en découler. Elle ne sait pas qui a des enfants ou non, n'ayant jamais été trop curieuse de demander à Ginny, mais Charlie a mentionné les enfants de Bill - et un mélange de toute la fratrie qu'elle a, d'une façon ou d'une autre, déjà croisée dans des loustics hauts comme trois pommes, déchaînés, dans un petit espace... Merlin. Son sourire se fait plus prononcé, secouant la tête devant l'image.

« Ça a dû aider à faire de la Roumanie ton chez-toi, d'avoir de la famille qui y vienne, » suggère-t-elle, songeuse.

Londres est sa nouvelle maison, mais aurait-elle moins l'impression de n'y avoir qu'au trois quart sa place si ses frères et sœurs avaient basculé dans ce morceau de sa vie ? Soupirant, Georgia se décale pour s'étirer, se refusant de nouveau à ces pensées moroses. Préférant replonger dans l'imaginaire de Charlie, ses mots l'emportant avec le même enthousiasme à chaque phrase, une nouvelle question lui délie la langue. Ça le fait rire, et Georgia tourne la tête vers lui, ses lèvres étirées venant lui répondre.

«Je ne vais pas m'engager trop tôt et dire jamais, mais pour l'instant je suis toute ouïe, » lâche-t-elle à son tour, les pommettes relevées.

Elle ne sait pas trop d'où il s'imagine qu'elle en aurait assez, n'ayant fait que le relancer depuis le début, finalement, mais si c'est pour le revoir rire comme ça, cheveux en vrac, yeux pétillants, elle veut bien laisser couler. Ce sont encore ses yeux à elle qui reprennent des étincelles, cette fois, alors qu'il lui liste les pays où il a voyagé. Un petit sifflement lui échappe, et elle a la main qui se pose avec enthousiasme sur son genou, se crispant aussitôt quand il mentionne la guerre.

D'une pression, elle fait retomber sa main, un air désolé se fondant sur ses traits. Pouvoir s'échapper, un an durant, après les horreurs de la guerre… l'aurait-elle aimé ? Elle s'imagine mettre sa vie en suspens, plus longtemps encore qu'elle ne l'a déjà été, et ça le fait frissonner. Elle ne se projette rien, finalement. Elle ne fait que suivre ce qui vient, Georgia. D'une voix douce, elle murmure :

« J'espère que ça t'a un peu aidé, à surpasser tour cela. » Un peu plus enthousiaste, elle ajoute : «c'est une liste qui fait rêver, en tout cas ! »

Et, comme pour clôturer ce moment délicat, Charlie se redresse, un bruit sourd lui échappant du ventre. Une risette amusée, elle glisse une main dans la poche de son sweat pour en ressortir son téléphone. Alors comme ça, elle lui fait perdre la notion du temps ? Lui, en tout cas, a su lui faire perdre un peu de l'aigreur dans son cœur, de la nausée dans ses pensées, et elle ne pourra que l'en remercier. D'un coup d'oeil, elle grimace en voyant l'heure affichée, un beau vingt heure quarante cinq, et secoue la tête.

« Mince je n'en reviens pas, je t'ai vraiment pris toute ta soirée. » Elle relève la tête vers lui, se mordillant la lèvre, embêtée. « On devrait encore pouvoir appeler pour commander, mais on va probablement devoir aller récupérer les plats. Au moins, on n'attendra pas trop longtemps sur place ! Ils font des pizzas, tu connais ? On a qu'à prendre deux pepperonis, c'est plus simple. »

D'un geste déjà, elle a ouvert son clapet, fait défiler les contacts à la recherche du numéro qui viendra sauver leur estomac. Téléphone tendu vers Charlie, sourire aux lèvres, elle lui explique :

« Tu appuies sur l'icône verte, le petit téléphone, et l'appel va se déclencher. Il faudra peut-être attendre un peu et puis, pouf, il sera à l'autre bout de la ligne. Après, c'est comme partout, je ne te ferai pas l'affront de t'apprendre à commander, » ajoute-t-elle.

Ça la fait beaucoup trop rire, ce grand bonhomme, plein de cicatrices et de brûlures, le regard si franc, qui tient entre ses mains un si petit appareil qu'il ne connaît ni d'Ève ni d'Adam. Se laissant tomber de biais dans le canapé, Georgia garde le silence, le laissant se débrouiller avec l'outil. Rien que pour ce moment d'amusement, les pizzas n'en seront que d'autant plus délicieuses. Ça lui gonfle le cœur avec la même allégresse que quand Pandora découvre ses petites technologies moldus en feignant un désintérêt contrôlé.

Il est bien trop tard pour sa ligne, pour son régime cadré, et ses horaires bien organisés, quand les pizzas sont enfin posées sur la table basse, récupérées du snack au coin de la rue. Ils s'y sont faufilés, elle engoncée dans son gros pull, lui dans sa veste, rieurs malgré le froid. Le coup d'air frais sur ses traits lui a fait un bien fou, les parts de pizzas se glissent avec bonheur dans son ventre, Georgia a les yeux bienheureux d'un individu des plus contentés. Avec un soupir d'allégresse, jambes croisées, assise au sol, elle a la tête calée contre le siège du canapé.

« Alors, ces pizzas ? Ça valait le coup que je vienne te prendre ta soirée ? »

Yeux fermés, elle garde le silence un instant, profitant de son contentement. Le fromage dégoulinant, les doigts tout luisants, le pepperoni qui relevait juste comme il faut la gorge. Non, vraiment, elle ne va pas pouvoir garder tout ça en elle. Peut-être que si elle arrive plus tôt, demain, à l'entraînement, et qu'elle coure quelques kilomètres, ça équilibrera. Un petit peu, au moins. Avec l'entraînement habituel, cela devrait aller. Si encore elle arrive à s'envoler, frissonne-t-elle. D'un soupir, elle souffle :

« Dis, je ne vais pas y revenir mais… je peux te demander de ne pas en parler à Olivier ? »

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Mer 22 Avr - 14:27

When I last saw you laughing@Georgia R. HarrisCharlie


16 février 2004

À la voir ainsi fascinée, intéressée, attentive, réfutant même la possibilité que je finisse par l'ennuyer, je songe une fois de plus que Georgia a bien des facettes différentes. Mais une chose est sûre, elle ne ressemble pas tant à cette femme trop adulte, trop sûre d'elle don les grands airs m'avaient rendu méfiant à notre première rencontre. Enfin, partiellement méfiant étant donné que j'avais tout de même passé l'intégralité du match les yeux rivés sur elle, entre un rire et une plaisanterie... Et ce soir encore, les minutes s'écoulent sans que j'y prenne garde et je me surprends à vouloir en passer d'autres. Lui faire découvrir, peut-être, tous ces endroits qu'elle n'a jamais visité, ceux que je viens d'évoquer comme ceux que j'ai oublié, ceux que je connais comme ceux qu'il me reste à découvrir. Lui montrer aussi mon montagnes, ma maisonnette avec son immense pin en surplomb. Après tout, n'avions nous pas évoqué la possibilité qu'elle se joigne à un match amical ? Jamais je n'aurais osé lui envoyer un hibou après notre discussion avortée, mais maintenant ? Je crois que l'idée me plairait. En outre, ce serait l'occasion de la voir voler.
Oh par Merlin, j'imagine d'ici les réactions de mes compères. Du sourire narquois de Diego aux yeux ronds de Sullivan, le sourire impassible de Pavel qui dissimulerait si mal l'étincelle amusée dans ses yeux et une Magda aux petits soins. Quant à Ana... Oh, peu importe. Ana n'est de toute façon jamais amène, quand il s'agit d'accepter une présence féminine au sein de notre petit groupe. Aucun de nous n'a oublié la dispute mémorable qui a éclaté entre André et elle le jour où il a osé nous présenter sa petite-amie, restée en France. C'était il y a quoi... Un an ? Peut-être deux. Le ton est monté si vite, si fort – l'une criant à l'égoïsme forcené, reprochant la mise en péril de notre équilibre, l'autre défendant sa belle bec et ongles et lui rappelant d'un ton cinglant que nous n'étions pas un harem sur lequel régner en maîtresse absolue – que Pavel a fini par sortir de son habituelle réserve, sa voix grondant de colère. Et moi, planqué dans un coin, qui me sentais si concerné par cette notion de harem. Et à voir la réaction de Sullivan, je n'étais pas le seul... Le genre de scène que j'espère n'avoir plus jamais à revivre.

Enfin, nous n'en sommes pas là. Rien ne dit que cette idée, jetée au fil de la conversation, prenne corps un jour. C'est trop lointain pour imaginer déjà cette possibilité. Bien plus abstrait que le ridicule dont je risque de me couvrir d'ici quelques secondes... Le téléphone en main, j'écoute avec attention les explications de Georgia, résistant à l'envie de le retourner dans l'espoir d'y trouver cette ligne qu'elle évoque. Et de fait, le reste sera passé sous silence, et je n'évoquerai ni mon incapacité à parler au bon endroit et à la bonne distance de ce maudit appareil, ni le fou rire de ma tortionnaire quand mon interlocuteur a bégayé un « Euh... bien. Merci. » tandis que je lui demandais comment il allait, ni mon incompréhension face à ce son strident qui accompagnait la fin de la conversation. Son hilarité nous a poursuivis un moment encore, jusqu'à se tasser sous les premières bouchées de fromage fondu.

Affalé sur le canapé, mes jambes étendues juste à côté d'elle, je laisse échapper un profond soupir de contentement. Une douce torpeur digestive s'empare de moi mais je repousse toute velléité de sommeil, profitant que Georgia soit de dos pour l'observer discrètement, à l'abri de mes paupières mi-closes. Sa question, toutefois, me fait rouvrir un œil, qui roule d'un agacement amusé. « Ça valait le coup, avec ou sans pizza. » Je réalise soudain tout l'implicite que pourrait porter cette phrase lancée sans y réfléchir et le rouge me monte aux joues. Vite une diversion, n'importe laquelle pourvu qu'elle chasse toute gêne éventuelle. Sur la table basse, les boîtes de pizza semblent me tendre les bras, abandonnées à leur sort, quelques croûtes et miettes pour tout occupant. Levant les bras au ciel, je m'étire puis me penche pour récupérer du bout des doigts ma baguette abandonnée sur l'accoudoir du canapé. « Enfin, si je veux y survivre, il vaudrait mieux éviter que Nicole ne tombe là-dessus... Evanesco ! » Les preuves de notre forfait s'évanouissent dans l'instant. Et avisant une tache de gras plus tenace que les autres, j'ajoute « Recurvite ! ». Par Godric, même le courage d'un Gryffondor ne me suffirait pas pour affronter la compagne d'Olivier si elle découvrait un tel capharnaüm dans son salon. Sa maniaquerie me fait rire, sujet de plaisanterie facile avec la compagne de celui que je considère indéniablement comme l'un de mes meilleurs amis.

Olivier qu'elle ne veut pas voir mis au courant. Elle me le redemande, et malgré la tentation de lui répondre qu'elle devrait sans doute lui en parler, qu'il n'est pas sain de rester seule face à cette angoisse, je me surprends à hocher la tête dans un soupir. Elle semble si vulnérable, dans cette voix presque suppliante, les yeux clos. Une seconde, je l'observe avant de joindre la parole au geste. Ce n'est pas à moi de faire ce choix, de toute façon. « Bien sûr. Tu peux compter sur moi. »
Mes yeux se perdent jusqu'au mur où trônent des photos du couple, de leur enfance à leurs fiançailles. Et cette autre, où s'étalent les maillots bleu et or de Flaquemare. Dans le coin gauche, Olivier sourit, un bras passé autour des épaules d'une coéquipière qui ne peut être que Georgia, à envoyer ainsi des baisers au photographe. Leur affection est évidente, limpide. Alors pourquoi ce silence ? « Tu as le droit de dire que ça ne me regarde pas... Mais pourquoi ne pas lui en parler ? Vous avez l'air proches, et il n'est pas du genre à tourner le dos à ses amis quand ils ont besoin de lui. »
La question m'a échappé avant que je ne puisse la retenir, presque à brûle-pourpoint. Pourquoi donc ce pincement du cœur, à songer à leur complicité ?
À regrets, je me réinstalle plus confortablement dans le canapé, abandonnant l'observation de la photo pour la courbe de sa nuque, à peine discernable sous la masse de ses mèches blondes.

Georgia R. Harris

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Jeu 23 Avr - 2:08
When I last saw you laughing
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Février 2004

C’est presque si son ventre n’a pas triplé de taille, avec cette pâte à pizza, la débauche de fromage et la quantité monstrueuse de sauce qui ont rejoint son estomac. D’un doigt, elle soulève son sweatshirt, pour révéler quelques centimètres de peau, distendue par la nourriture, enfonçant avec une grimace son index dans son pet de graisse, ce bourrelet imaginé. Sa main retombe sur son estomac, sa tête calée sur l’assise du canapé, et elle étire les jambes devant elle d’un soupir. Plutôt se concentrer sur le plaisir de les avoir dégustées, surtout en si bonne compagnie. Charlie vient de retomber dans le canapé, dernière part engloutie, un soupir de contentement lui échappant. Un sourire amusé se fond sur les lèvres de la joueuse, qui inspire et expire profondément. Elle ne s’en veut presque plus d’être débarquée à l’improviste chez Olivier, pour plomber la soirée d’un tout autre individu.

Taquine, elle est obligée de lui demander si ça valait le coup, finalement, rien que pour les pizzas. Sa réponse, instinctive, cachant un tantinet d’amusement, lui fait relever les pommettes, qui prennent une teinte tout juste rosée. Mangeant son sourire, un soupir de soulagement lui échappe quand même, rassurée de ne pas avoir été de la pire des compagnies ce soir. Entre ses histoires de vol, et ses incessantes questions, on aurait pu se demander, pourtant. Son sourire s’agrandit d’autant plus lorsqu’il s’agite aussitôt, comme embarrassé par cette réponse spontanée – si ça avait été toute autre personne, ou toute autre occasion, Georgia se serait retournée vers elle, petit sourire aux lèvres, pour lui faire encore davantage perdre contenance. Ce soir, pourtant, aucun intérêt à ces petits jeux ; l’ambiance est trop douce, la confiance si peu tissée, pour qu’elle ne s’amuse à le tourmenter.

Elle rouvre les yeux, d’un oeil, alors qu’il se redresse un peu, pour nettoyer la table basse et les traces qu’ils ont pu laisser. La jeune femme souffle un merci, bien soulagée qu’il en ait eu le réflexe. Elle ne pense pas être encore là quand le couple reviendra – Merlin, rentrent-ils même ce soir ? Il faut qu’elle fasse attention à l’heure, difficile d’expliquer à Olivier pourquoi elle a passé la soirée chez lui, si elle ne veut pas tout lui révéler. Et ce n’est pas à des heures pareilles qu’on dévoile des choses pareilles. Elle ne sera probablement plus là, donc, quand ils rentreront, et un petit rire lui échappe d’imaginer Charlie devant se justifier du bazar, des boîtes de pizzas, des possibles miettes et autres bêtises, face à Nicole en furie. À moins qu’Olivier ait su suffisamment lui apaiser le coeur, aujourd’hui, qu’elle n’ait même pas la force de s’énerver. Ils ne vont probablement pas tarder, songe-t-elle, la réalité la rattrapant bien vite. Ils ont entraînement à huit heures, le lendemain, et elle n’imagine pas un rendez-vous mettre Olivier en retard sur cette obligation.

L’entraînement. Yeux fermés, Georgia trace des cercles distraits sur son ventre, la peau légèrement révélée par le sweat mal remis en place. En un repas, elle a consommé un nombre de calories impressionnant, à une heure abusée – il faudra qu’elle rectifie cela. Sa collègue poursuiveuse est souvent en avance aussi, elle l’entraînera courir avec elle, plutôt que d’aller faire des tours de terrain au balais. Un léger sursis, avant de devoir remonter, et s’inquiéter à nouveau. S’inquiètera-t-elle tous les jours, maintenant ? Ou simplement ce soir, de s’imaginer devoir le faire chaque instant ? Soupirant, Georgia se demande combien de temps elle va devoir garder ces mots pour elle, craignant que l’entraîneur les lâche sans même y prêter attention, ou que le médicomage lui fasse une remarque de trop. L’idée qu’Olivier l’apprenne comme cela, au détour d’une conversation, lui renverse le ventre. Elle sait qu’elle doit le lui dire, mon dieu, qu’est-ce qu’elle le sait. Il faut que cela vienne d’elle. Mais comment le lui annoncer ?

L’estomac retourné, cette fois-ci, ce n’est pas à cause de la lourdeur de la pizza. Et quand, d’une voix toujours aussi peu assurée, elle lui demande si il ne dira rien, les yeux sont toujours fermés, dans l’espoir de ne pas lire dans les siens un quelconque jugement. Elle n’entend qu’un bref soupir, ses traits se crispant devant cette réaction. Les mots qui suivent, pourtant, allègent toute angoisse. Il ne lui dira rien. Expirant profondément, Georgia ouvre les paupières et laisse son regard vaquer, soulagée qu’il ne lui en demande pas plus. Son oeil est accroché par la photographie animée, au mur, où ils se tiennent tous, grands vainqueurs, sourires resplendissants aux lèvres. Elle est contre Olivier, son bras sur ses épaules, le sien sur ses hanches, et sa main envoie mille baisers au photographe. Un sourire se fond sur ses lèvres au souvenir, une des rares photographies d’après-match où ils ne sont pas tous dans un état lamentable, couverts de boue, constellés de sueurs ou de pluie, mais rayonnant de la tête aux pieds de leur victoire. Elle ne sait même plus de laquelle il s’agit – elle ne voit que leur bonheur éclatant, le bonheur des vainqueurs. Alors quand il lui demande, Charlie, pourquoi elle ne lui dit rien à Olivier, la jeune femme sent son coeur se tordre un peu. Détournant le regard du cadre, Georgia claque de la langue, se refusant à se retourner pour pouvoir lui parler en le regardant dans les yeux. C’est plus facile, les prunelles rivées sur ses mains. Attrapant une des serviettes en papier sur la table, données par dizaines par le restaurant, Georgia l’entortille distraitement autour de son index, collectant ses pensées.

« Ce n’est pas que je ne veux pas lui dire, » laisse-t-elle échapper, un peu pincée, avant de soupirer profondément. « C’est plus compliqué que cela. Évidemment, avec Olivier, c’est… Il a toujours été là, d’une certaine façon. S’il y a une constante dans ma vie de sorcière, c’est bien lui, » souffle-t-elle avec un petit rictus amusé. « Depuis ma deuxième année, à le suivre du regard quand il allait s’entraîner, cherchant à grappiller un énième conseil de sa part, aux années de guerre, où… »

Sa voix s’enraye, et elle ferme brièvement les yeux, son geste sur la serviette se faisant un peu plus pressé : elle n’aime pas l’idée de redire à voix haute qu’elle lui avait laissé sa baguette, son balai, tout ce qui faisait qu’elle se considérait une sorcière, outre le sang qui pulsait dans ses veines.

« Enfin, il a toujours été là. Alors évidemment que je sais qu’il ne se détournera pas de moi – c’est Olivier, » presse-t-elle, le coeur battant. « Mais j’ai l’impression qu’il a une image trop gentille de moi, trop lissée peut-être, l’image de cette gamine qui le regardait de si bas, qui préférait faire la petite farouche. On a beau être de bons amis, de très bons coéquipiers, il y a malgré tout un décalage, je ne sais pas, je ne comprends pas trop, cela vient de moi, » balbutie-t-elle, agacée. « J’ai plus peur de le décevoir, et de décevoir les espoirs qu’il a en moi, en cette carrière qu’il a presque aidé à me construire, tu comprends ? »

Elle penche la tête, s’étirant la nuque, observant avec une moue désolée le papier détruit entre ses mains. D’un soupir, elle le repose sur la table et pivote légèrement, pour faire face à Charlie. La voix hésitante, elle lâche :

« Je sais aussi que si ça vient de lui, l’idée qu’il faudrait que je parte, que j’arrête de jouer, que c’est trop dangereux pour l’équipe… » S’interrompant, Georgia s’éclaircit la gorge, peu amusée à l’idée, avant d’avouer : « Je sais que ça me toucherait plus que de n’importe quel entraîneur ou médicomage. »

Remontant ses genoux contre son torse, Georgia cale son coude à cheval entre les deux, sa main se glissant dans ses cheveux. Du regard, elle ne quitte pas Charlie, cherchant dans ses traits les réponses aux angoisses qu’elle couve. Illusoire, quand on sait qu’elle ne le connaît que si peu, et ne saurait pas distinguer une grimace de joie à celle de jalousie sur son visage. Ça la rassure momentanément, toutefois, et elle prend volontiers.

« Après tout, tu l’as dit toi-même, à quoi bon m’inquiéter sur ce qui pourrait ou ne pourrait pas arriver tant que rien n’est certain. À bon donc, donc, inquiéter Olivier, et lui mettre des idées dans la tête qui pourraient le détourner de ses performances ? Je n’ai pas envie qu’il soit plus concentré à se demander si je vais m’écrouler sous ses yeux qu’à ne pas lâcher du regard les souaffles des adversaires, » ajoute-t-elle, forçant un sourire.

Heureusement, finalement, que son ami est absent ce soir, et qu’elle n’a pas été obligée de faire le choix de lui dire ou non sans avoir eu la tête plus posée. Quelle bonne idée a-t-il eu, ce fichu médicomage, de l’envoyer ici ? Qu’aurait-elle fait, plantée devant lui, à devoir faire semblant d’aller bien, à se forcer de ne pas craquer, et pourtant bien trop clairement impactée par quelque chose ? Il faudra qu’elle rappelle au soignant combien elle veut que personne ne soit au courant. Personne qui puisse s’inquiéter. Personne qui puisse se détourner. Même si cela inclut Olivier. Surtout, si ça l’inclut.


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Jeu 23 Avr - 18:27

When I last saw you laughing@Georgia R. HarrisCharlie


16 février 2004

Depuis combien de temps Olivier me parle-t-il de cette Georgia, qu'il avait vu tenter de monter sur un balai quand lui-même était en plein entraînement sous la houlette de mon successeur ? Ce n'était pas grand chose, quelques mentions, une ligne de temps en temps. Mais une constante, effectivement, le mot qu'elle emploie sonne juste. Tant et si bien qu'à une époque, je n'avais pu m'empêcher de lui lâcher, le regard rieur, un commentaire un peu narquois prêchant le faux pour savoir le vrai. Et la manœuvre avait fonctionné au delà de mes espérances ! Pour toute réponse, j'avais eu droit à l'éloge de toutes les qualités qu'il trouvait à une certaine Nicole... Je me souviens avoir pensé que l'affaire était mal engagée – Merlin, ils me semblaient si différents l'un de l'autre ! Mais au fil des années, leurs divergences devenues force, et aujourd'hui, leur affection réciproque ne fait plus aucun doute.
Et Georgia était restée en filigrane de ses lettres, sans que je ne m'interroge plus avant. Quand j'y pense, c'est presque étrange de ne la rencontrer que maintenant, après tant d'années à entendre son nom évoqué. La faute de la distance, sans doute. Ce n'était qu'une gamine à l'époque – farouche, me dit-elle. Un trait de caractère que je lui associe sans mal, sa réaction lors de notre première rencontre l'était assurément. Est-ce ainsi qu'Olivier la connaît ? Les ongles sortis, la langue cinglante, prête à mordre quiconque serait assez audacieux pour franchir d'un orteil les limites qu'elle trace autour d'elle. Est-ce cela qu'elle entend, par « décalage » ? Est-il possible que leur amitié soit demeurée aussi superficielle au fil des années ? Car sans pouvoir prétendre la connaître, l'image qu'elle m'a révélée au fil de ces deux rencontres semble si loin de l'image lisse qu'elle évoque.

Je l'écoute m'expliquer sans rien dire, attentif et silencieux. Situation étrange que d'être ainsi installé, elle à mes pieds. D'un coup de baguette, je repousse délicatement la table basse pour me laisser glisser à ses côtés, réduisant cette distance incongrue. Une jambe étirée, l'autre repliée en support à mon coude, je l'observe sans mot dire tandis qu'elle me raconte toute la douleur qu'elle ressentirait à voir Olivier s'éloigner. L'idée qu'il puisse privilégier les performances de Flaquemare aux dépends de Georgia me sidère. Qu'il souhaite veiller sur elle, sur sa santé, oui. Mais pour l'équipe ? L'espace d'une seconde, j'entrouvre les lèvres pour défendre mon ami, mais la possibilité chemine et mes lèvres se referment d'elles-mêmes. Parce que je le connais trop, ce compétiteur absolu, pour pouvoir assurer qu'il n'écarterait pas une amie pour assurer la saison. De l'inconvénient de mélanger boulot et amitié. Dans un hochement de tête, je souffle « Je comprends... » Je n'en pense pas moins, mais je comprends.

D'autant qu'elle n'a pas tort de me renvoyer à mes contradictions, est-il vraiment utile d'inquiéter Olivier tant qu'elle n'a rien de plus tangible à lui dire ? Sans doute pas, non. Mais elle ne m'ôtera pas de la tête que dans ce refus se cache une part de déni. Et l'habitude trop bien ancrée de tout gérer par elle-même, sans impliquer quiconque d'extérieur. Mais si la situation dégénère – Godric m'en soit témoin, je ne lui souhaite pas – elle aura besoin d'être entourée.
Ses yeux cherchent les miens, pour y découvrir une inhabituelle gravité que même son sourire timide ne parvient pas à adoucir. « Je comprends et tu n'as pas tout à fait tort. Il n'a pas forcément besoin d'être au courant tant que tu n'en sais pas plus. » Ça, je lui concède sans difficulté. « Mais c'est essentiel que tu ne restes pas seule face à cette situation ! Tu as des gens autour de toi, à qui en parler ? Si toute ta fratrie est moldue, j'imagine bien que ce ne doit pas être évident... Mais d'autres amis, un... Quelqu'un ? » Ma langue a fourché, failli ajouter un petit ami à la liste des personnes qu'elle pourrait contacter. L'éventualité serait limpide, à qui donc tout confier, sinon un compagnon de vie ? Et devant la curiosité qui me tenaille, j'en regrette presque de n'avoir pas osé. Mais si intrigué que je sois, la question n'avait pas sa place, trop intime, trop intrusive. En outre... La maladresse ne me rend pas complètement naïf. Une telle interrogation n'est jamais, jamais anodine – je l'ai appris à mon corps défendant devant cette fille qui avait jadis pris ma curiosité pour de l'intérêt. L'imagination des femmes court vite et saute en un clin d’œil de l'admiration à l'amour et de l'amour au mariage. Hors, ce n'est ni le sujet, ni le moment, ni l'endroit. Autant de raisons d'avoir refréné cette pensée qui, d'être restée informulée, ne semble plus quitter mon esprit.

Cette pensée tenace.
Innocente, bien sûr. Il n'est rien que je cherche en Angleterre, usé d'avoir déjà tenté de concilier l'amour à la distance. Rien qui ne soit possible entre cette jolie princesse pleine de faille, qui s’enivre de paillette et de lumière quand je n'aspire qu'à l'anonymat et à l'ombre.
Innocente, j'en suis convaincu. Même si elle semble avoir tant de failles, tant de solitude derrière ses parures dorées. Même si elle paraît si délicate, si seule que j'aimerais pouvoir la réconforter, gagner sa confiance et son amitié.
Innocente. Vraiment ? Quand j'espère qu'elle répondra à la question que je n'ai pas posé ? Qu'elle me promette qu'elle m'en parlera, car tout ce que j'en retiendrais égoïstement, c'est que nous parlerons encore.

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