A défaut d’être né dans une grande famille, il faut se contenter d’un mariage de seconde zone. Amycus Carrow l’a toujours su, et ce n’est donc pas une surprise lorsqu’il a fallu trouver une épouse que la belle Narcissa Black tout comme l’indomptable Bellatrix Black lui échappent. A la place, le voilà aux bras de l’élégante mais un peu stupide Helena Goyle. Enfin, au moins elle est de sang pur… C’est déjà ça. C’est en s’accrochant à cette idée et en pensant « devoir conjugal » et « survie des Carrow » qu’Amycus a honoré sa compagne la nuit de noces et les suivantes. En tant que fils aîné de la famille, c’est à lui de faire survivre l’honneur familial et surtout son nom. Il finit par mettre enceinte une première fois son épouse après un an et demi de vie commune. Ce sont deux petites filles qui voient le jour. Raté. Hestia et Flora sont les premières à naître. Les parents se remettent à l’ouvrage, essaient, essaient encore. L’affection d’Amycus pour ses filles grandit à mesure qu’il réalise qu’aucun autre enfant ne vient. Il faudra attendre six ans pour que Helena Carrow tombe à nouveau enceinte, cette fois-ci d’un petit garçon, Edgard. Malgré d’autres efforts répétés, plus aucun héritier Carrow ne verra le jour dans le couple et il faudra se contenter du petit Edgard qui, s’il est plutôt futé, n’est certainement pas doué de magie.

En grandissant, le petit Edgard a très vite compris qu’il était à la fois une bénédiction et une malédiction pour sa famille. Sa mère ne peut s’empêcher de le couvrir d’attention et d’inquiétudes, parfois jusqu’à délaisser ses sœurs aînées. Celles-ci voient bien que le petit dernier attire davantage l’attention qu’elles et se replient sur leur duo. Edgard grandit loin d’elles tout en habitant sous le même toit. Elles ne font pas l’effort de l’intégrer à leurs jeux et, à l’adolescence, leurs relations se dégradent. Elles sont à Poudlard toute l’année, mais l’été, elles ont le sentiment de ne pas exister. Lorsque Edgard rentre en première année alors qu’elles sont en septième en septembre 1999, elles font grise mine : même Poudlard n’est plus pour elles, cette année-là, un refuge, et en plus, en plus, la guerre leur a tout pris. Car les années d’enfance d’Edgard n’ont pas été toutes roses : si sa mère faisait tout son possible pour le protéger, il a connu le retour du Seigneur des Ténèbres et la reprise des activités de son père parmi les mangemorts. Son Père a pu échapper à la prison en faisant profil bas, mais cela l’a naturellement conduit à la disgrâce auprès du mage noir qui a vu d’un mauvais œil qu’il n’accepte pas de souffrir Azkaban par loyauté pour lui. En cela, le sacrifice consenti par les Lestrange est valorisé.

Dans sa jeunesse, Edgard apprend. Il a très tôt su lire et écrire, et ses lectures ont été rapidement au dessus de son âge. Son père attend beaucoup de lui. Il veut que son fils unique redore le blason des Carrow, qu’il puisse inspirer le respect, la crainte et la déférence. Edgard n’est jamais autorisé à n’être qu’un enfant : il est l’héritier de la famille. Et il n’est pas question qu’il soit un toqué comme sa cousine, la fille d’Alecto dont on ne sait même pas bien qui est le père puisqu’elle a pris le nom de sa mère. Amycus inculque très tôt à son fils l’étiquette sorcière, l’histoire de la famille et lui impose aussi des précepteurs en finance et en droit. Edgard devra diriger. Lorsque ses sœurs sont autorisées à jouer dans le jardin, lui doit subir d’interminables leçons dès l’âge de cinq ans. A l’époque, il s’agit d’apprendre au plus tôt le latin, langue légale et magique de Grande Bretagne, puis dès ses huit ans, il s’agira d’être bon en histoire, en droit, en mathématiques, en finances et en théorie magique. Edgard sait que cela inquiète ses parents depuis des années : il ne manifeste aucune magie accidentelle dans sa prime jeunesse. Rien, ni objet cassé, ni changement de couleur, ni lévitation. Amycus espère qu’en initiant très tôt son fils à la magie, il pourra peut-être provoquer un début de réponse magique chez son fils. Il pourrait le rudoyer comme les Londubat le font, mais si c’est pour que son gamin devienne une lavette comme l’héritier d’Augusta, il préfère tenter une autre approche. C’est peut-être le seul moment de lucidité d’Amycus concernant l’éducation de son fils.

Contraint de devoir toujours apprendre davantage, Edgard développe une forme d’asocialité. Doué d’une bonne mémoire et travailleur, il tâche de rendre ses parents fiers de lui, et il y arrive parfois. Mais il est très inquiet, lui aussi, de ne pas réussir à faire de magie. A neuf ans, il sait qu’il n’est pas normal. Il se met à redouter d’être un cracmol. Oh, il sait très bien ce que c’est. Il a surpris une conversation de ses parents, un soir, et puis ses sœurs l’appellent « le cracmol » lorsque les parents ne l’entendent pas. Il sait que ce serait le déshonneur s’il en est un. Ses sœurs auront gagné, et lui perdra tout : l’affection de ses parents, sa fortune. Tout ce pourquoi il travaille tant et fait tant de sacrifices. Malgré son jeune âge, Edgard est un enfant très tourmenté et très anxieux, il fait fréquemment des cauchemars qu’il essaie de cacher en se montrant hautain avec tout le monde, y compris les elfes de maison qui nettoient son lit souillé par ses terreurs nocturnes.

C’est à l’âge de dix ans, quelques jours après son anniversaire et dans les murs de Poudlard où Amycus et Alecto enseignent tous deux que le miracle opère enfin. Après avoir passé des années à apprendre la théorie de la magie et à agiter en vain la baguette magique  faire sur mesure (et parfaitement illégalement) pour lui qu’il a reçue à l’âge de sept ans, quelque chose se passe. La plume décolle, et le wingardium leviosa fonctionne enfin. Le professeur appelle les parents aussitôt, et avant même de comprendre ce qu’il se passe, Edgard croule sous l’étreinte de sa mère en larmes et le regard empli de fierté de son père. Son fils n’est pas un cracmol, l’honneur est sauf… Seules les jumelles, alors âgées de seize ans, font grise mine : l’héritage leur passe sous le nez. Mais la joie sera de courte durée. Cette année là, Edgard visite souvent Poudlard parce que son père y enseigne. Sa mère et lui occupent le manoir la plupart du temps mais se rendent chaque week-end dans les murs pour voir comment se passe la vie là-bas. Edgard, resté seul avec sa mère, est secrètement soulagé, elle est bien moins inflexible que son père, mais voir ses sœurs tous les week-end est une torture. Du haut de ses dix ans, il sait déjà qu’il devra se méfier d’elles. Et puisqu’il a bien intégré que chez les Carrow, le meurtre pour l’héritage est une pratique courante, ainsi qu’en témoigne le sort de son oncle paternel, le frère aîné de son grand-père, inopinément piétiné par un abraxan en colère lancé à toute allure par un mauvais sortilège de confusion. On a conclu à l’accident, mais Amycus s’est toujours enorguilli que son père ait réussi à récupérer le patriarcat de la famille par ce biais. Amycus lui-même n’a eu qu’une sœur cadette, mais il s’est toujours méfié d’elle. On ne sait jamais, après tout, et il a toujours mis en garde son fils unique. S’il fallait tuer ses propres filles pour assurer la survie de son héritier, sans doute qu’il pourrait s’y résoudre, et les jumelles le savent fort bien. Ce n’est pas une question de famille, c’est une question de succession, de nom, de dynastie. Les liens de sang et d’affect n’ont plus vraiment d’importance dans ces cas-là.

Mais à la fin de cette année-là, le Seigneur des Ténèbres est mis en déroute et les parents d’Edgard sont pourchassés. Ils ne sont pas soupçonnés d’être des mangemorts : on est au-delà des mangemorts. Tout le monde sait. Ils ont torturé des enfants à Poudlard, se sont battus pour le Seigneur des Ténèbres et ont contribué, avec Rogue, à faire de l’école un endroit terrible. Du haut de ses dix ans, Edgard voit les choses différemment : la justice l’arrache à sa famille, gèle ses comptes, et le place en tant que pupille de l’état. En tant qu’héritier de la fortune, un gestionnaire lui est attribué et très étroitement surveillé par les Gobelins de Gringotts, de sorte que lorsque les jumelles, âgées de dix sept ans, tentent d’obtenir la garde légale de leur frère cadet et la régence des comptes de la famille, le garçon est entendu. Il refuse et préfère rester sous la garde de l’état. Les jumelles ne lui ont jamais pardonné et il sait qu’il s’est fait d’elles des ennemies mortelles. Il passe un an chez les Goyle, sa famille maternelle. Des gens simplets de son point de vue. Mais en jouant le petit garçon modèle, il a toute latitude pour préparer son accession au pouvoir de la famille. Toute sa vie durant, c’est à cela qu’on l’a préparé. Son gestionnaire des comptes consent à le laisser poursuivre ses cours de finance, de droit, d’histoire, de théorie magique, et à prendre de l’avance sur les matières de Poudlard. Il commence ainsi à étudier la métamorphose, les sortilèges et les potions. Il sort peu et donne aussi peu d’occasions que possible à ses sœurs de le voir. Toute sa scolarité sera placée sous le signe de la paranoïa. Il sait qu’elles sont capables de l’assassiner pour rafler le pactole, et il n’a pas beaucoup plus confiance en sa cousine qu’il n’a plus vue depuis des années. Il paraît que sa mère l’a faite placer en institution… Il ne sait pas trop à quoi ça correspond mais il sait que là bas, au moins, elle ne pourra pas lui faire de mal.

Sa première année à Poudlard est une course contre la mort. Les jumelles sont à Serpentard en septième année, lui en première. Dès le début, il va voir Slughorn alors directeur de maison et lui fait un émouvant plaidoyer pour lui expliquer combien ses sœurs ont été perverties par les idées de Papa et veulent lui faire la peau pour rafler l’héritage et le punir de n’avoir jamais voulu servir le grand méchant « V ». Aussi étonnant que cela puisse paraître, cela marche, et Horace Slughorn s’arrangera pour veiller tout particulièrement sur ce petit oisillon Carrow. Minerva McGonagall aussi le prend en pitié : elle assiste à plusieurs occasions à des confrontations entre ses sœurs et lui, donc une l’envoyant à l’hôpital. Ce soir-là, il remercie sa bonne étoile parce que la sous-directrice a alerté le Directeur et il peut lui servir le même discours concernant ses sœurs. La plupart du corps professoral est alerté de sa difficile situation et il survit à sa première année malgré deux chutes provoquées dans les escaliers, une embuscades, une tentative d’empoisonnement déjouée par les elfes de maison et une quantité d’autres plans échafaudés mais jamais mis en place par ses soeurs. Grand seigneur, Edgard n’a pas souhaité porter plainte contre ses sœurs.
Sa première année coupe aussi court à ses espoirs de voir revenir le Seigneur des Ténèbres : Edgard est à la table des Serpentards, occupé à essayer de lancer des revelio sur sa nourriture pour être certain qu’elle n’est pas empoisonnée comme son père le lui a appris lorsque les portes s’ouvrent et qu’Harry Potter revient d’entre les morts. A ce moment-là, Edgard sait que sa famille va être pourchassée et il sent monter les larmes. Les années à venir vont être difficiles, il en a conscience.
Il fait pourtant son petit bonhomme de chemin à Poudlard sans trop d’ennui : brillant dans toutes les matières ne nécessitant pas de baguette magique, il rafle les top positions en histoire de la magie, en astronomie, en arithmancie, en botanique et en soin aux créatures magiques. Pour les autres matières, c’est plus compliqué : en sortilèges, métamorphose et potions, il est excellent pour la théorie et bien mauvais en pratique. Ses sorts sont bien exécutés, justes, mais manquent de puissance, et il doit travailler d’arrache-pied pour réussir à obtenir l’effet magique désiré alors qu’il sait parfaitement comment ça marche. En potions, ses réalisations sont toujours impeccables, il a d’ailleurs fait partie du club de Slughorn tant que le professeur a enseigné, mais encore une fois ses potions étaient systématiquement plus faibles que la moyenne. Parce qu’il est un sorcier faible, la magie qu’il insuffle dans sa préparation est souvent insuffisante, et malgré la précision de ses gestes, son chaudron a trop souvent donné que de la boue. Edgard se tient très au courant de l’actualité : il voit la montée au pouvoir de Potter et Granger, lit à propos des procès des mangemorts et voit aussi les prises de position toujours plus radicales de Narcissa. Et elle a raison, la Lady Malefoy : à ce train là des réformes de Potter, tout ce pourquoi il a toujours travaillé va partir en fumée. Pire, si le monde de la magie s’ouvre aux nés moldus, ils prendront le pouvoir, prôneront une réunion entre le monde magique et la société moldue, et ça en sera fini !

Lorsque le cours de sciences moldues est imposé par le Ministre à Poudlard, Edgard sait que la réforme est en marche. Il remercie mentalement Rogue d’avoir répliqué en ouvrant un cours d’Alchimie et d’Arts Obscurs. Il sait que c’est une façon de tenir tête à Potter, et c’est très bien. Potter est au pouvoir, aidé par cette sang-de-bourbe de Granger. Il faut faire quelque chose, ça devient urgent. Pour se fondre dans la masse et cultiver sa respectabilité, Edgard s’arrange pour avoir de bonnes notes en sicences moldues et ne pas faire de vagues dans le cours. Mais il attend son heure, le moment où les Sangs Purs pourront à nouveau faire valoir leurs droits de naissance.

C'est au cours de sa cinquième année que tout se complique : en Novembre, lors des portes ouvertes de Poudlard au public, un attentat à lieu, blessant une septième année de serdaigle, Meadow Quinn. Il paraît que ce sont les Carrow qui ont perpétré l’attentat, mais personne n’a de preuves, sinon ce que tout le monde a entendu de la bouche de la pauvre fille sous imperium «  de la part des Carrow ». C’est avec ces mots qu’elle a remis un œuf piégé au Ministre venu parader dans les lieux. Edgard est au coeur de tous les soupçons, bien sur, mais il n’y est pour rien, en vrai. Il n’a pas les compétences pour faire un pareil piège, et ses sœurs sont placées plus haut sur la liste des gens à mettre hors d’état de nuire que le Ministre, même s’il ne l’apprécie pas. Non, c’est clair qu’on a voulu faire porter le chapeau à son père et sa tante, bien connus pour avoir semé le chaos dans Poudlard. Le truc, c’est qu’Edgard les voit mal capables de faire cela. A force de travail, il en est venu à se considérer comme plus futé et plus intelligent que son père : son paternel est certes un amateur, mais il n’aurait surement pas revendiqué cet attentat. Et puis il a quand même fait quelques coups bien sentis pendant sa carrière de mangemort. Il serait presque plus logique que l’attentat ait été commandité par Potter lui-même qui aurait pu s’en servir pour jouer les héros et se faire prendre en pitié… Mais c’est un gryffondor, Potter, il est pas capable de ça, n’est-ce pas ? Toute sa politique est une horreur progressiste et rentre-dedans, comme cette histoire de réserve, ou bien le code de libération des elfes de maison, ou le code des êtres magiques. C’est frontal, c’est tape à l’oeil, c’est pourri.

Heureusement, la fin d’année a été égayée par le passage d’un groupe de rock certes dégénérescent (il faut l’être pour écouter du rock) mais dont les messages sont forts et bien pensés. Potter comme un ogre dévorant les esprits faibles, c’était bien trouvé. Pour la peine, Edgard a profité de l’été pour s’offrir un coffrets de CD du groupe, même s’il abhorre ces technologies moldues barbares.

Cours suivis : Sorts / Métamorphose / Potion / Botanique / Défense / Sciences moldues / Histoire / Astronomie + Arithmancie / Soin aux créatures magiques
Résultats aux BUSE : si déjà passées (pour les élèves de 6e et 7e année)/