Il y a ce contact, furtif. Cette étincelle qui remonte furtivement le long de ma peau, crépitant. Et l'implacable sentiment de ridicule qui s'installe. Nom d'un dragon, pourquoi ne suis-je pas foutu d'agir simplement et normalement ? Elle tente de me rassurer, m'offrant un sourire, comme un prémisse d'amitié mais rien qui ne puisse effacer mon envie de disparaître, ou de retourner quelques minutes en arrière (si seulement il existait encore des Retourneurs de temps...), juste avant que mes pensées ne me fassent dérailler. Encore. Et si je ne réponds rien, mon sourire la remercie sincèrement de ces mots.

Sans plus attendre, je lui emboîte le pas vers le bar. Et quelques minutes durant, je parviens à occulter. Ne demeurent que l'écho de nos pas dans les couloirs déserts, le poids de ce silence qu'aucun de nous ne souhaite briser, les acclamations étouffées nous parvenant du stade, saluant sans doute l'une ou l'autre des deux équipes s'affrontant. Instant de paix, de calme, avant que notre bulle n'éclate. À nouveau, ce sont mille voix, mille bruits qui m'agressent. Conversations bruyantes (Merlin, nous étions plus discrets !), claquement d'un verre reposé sèchement sur le bar, cliquetis discret des mornilles passant de poche en poche au fil des actions et des buts, rires étouffés...
Nous y avons à peine fait deux pas, et j'ai déjà envie de fuir. Mais deux fois d'affilée, j'ai beau ne pas être le plus galant des gentlemen, même moi je ne me le permettrais pas. Allons Charlie, un peu de courage, par Godric ! Je vois d'ici le sourire de Bill : « Alors p'tit frère, t'es un vrai lion ? ». La force de Gryffondor coule en moi, je dois bien être capable de supporter cet endroit !
Je m'y résous tout juste quand Georgia se tourne vers moi et la moue qu'elle arbore n'est trop parlante. Évidemment. Malgré le sourire, le clin d’œil, cet au revoir sur fond d'humour, difficile de croire qu'elle n'a pas cherché le premier prétexte pour s'éclipser, et comment l'en blâmer ? En la voyant glisser avec aisance parmi cette foule anonyme, saluant les uns, adressant un sourire aux autres, je secoue la tête. À force de discuter, j'avais presque fini par en oublier sa robe de princesse, ses attitudes maniérées, le ton père-sec de celle qui m'a interpellée près d'un vestiaire tandis que j'attendais ma sœur. Je ne reste que quelques secondes encore, le temps de la voir évoluer dans cet univers de paillettes et d'attention qui est le sien. Un monde qui ne saurait être plus éloigné de celui que j'ai choisi.

Assis seul sur mon siège dans les tribunes, j'ai assisté aux dix dernières minutes du match avec bien plus d'attention que je n'en avais porté jusqu'ici. Sur un piqué superbe de l'Attrapeuse des Harpies, la rencontre s'est terminée en fanfare, et je me suis glissé sans attendre jusqu'aux loges pour y retrouver ma Ginny, la féliciter et l'emmener dîner loin de cette effervescence, sitôt sa douche prise et la séance de dédicaces achevée. Oh, j'ai bien pris le temps de repasser par la tribune. Ses affaires avaient disparu, mais aucune trace d'elle. Aucune chevelure blonde à l'horizon. Qu'une rangée de sièges vides et la vue plongeante sur un stade devenu silencieux.

Peu importe. Les terrains de Quidditch ne sont pas (ne sont plus) mon cadre et il me tarde, Merlin, de rentrer chez moi, de rejoindre le calme de mes montagnes. D'y oublier un regard frondeur et un sourire qui n'ont rien à faire dans mon quotidien.
Il n'y a pas de place pour ce genre de princesse dans ma vie.

Fin