Mystique. Sacré. C'étaient les mots qu'elle cherchait. Il manquait ces visions là dans le coeur des sorciers de l'Ordre d'Hermès. Tout n'était pas perdu si le directeur de cette école lui-même avouait avoir oublié l'essence même de la magie. Tout n'était pas perdu si Severus Rogue ne la considérait pas comme une élève inférieure aux autres sous prétexte qu'elle n'était pas née dans l'Ordre. Et au fond, cela faisait du bien. Ça réchauffait le coeur que de voir qu'il y avait quelqu'un, dans cette école, qui croyait en vous. Si elle travaillait dure, si elle ne fléchissait pas et qu'elle gardait la tête froide dans ce monde incompréhensible pour elle, alors elle deviendra une Sorcière accomplie. Et ces mots formulaient par le plus haut détenteur de pouvoir de cet établissement valaient n'importe quel encouragement familial et les critiques des camarades de classe semblaient à présent des plus inintéressants : Severus Rogue était certains qu'elle réussirait si elle se donnait les moyens. A cet instant, Eirian se libéra de toute la pression sociale, des mauvais jours et des mauvaises nuits, depuis qu'elle était à Poudlard. Pour la première fois, elle eut l'impression qu'elle n'avait pas fait un mauvais choix en acceptant de suivre cet enseignement. Revigorée, le coeur gonflée d'une allégresse trop longtemps délaissée, la Verbena rayonnait à présent sur place.
Et pourtant, le sujet qui fut ensuite abordé était des plus sérieux puisqu'on la mettait en garde contre ce qu'ils appelaient « magie noire ». Non, vraiment, l'enfant ne comprenait pas très bien comment les Sorciers de l'Ordre d'Hermès en étaient venu à catégorisée la magie de cette manière : qu'il y a une bonne et une mauvaise magie. Ça allait totalement à l'encontre de son propre enseignement de Verbena. Mais c'était intéressant, réellement, que de voir que tout le monde ne voyait pas et ne maîtriser pas la magie de la même manière. Tonton Osgeir avait raison.
— On ne nous apprend pas ça au village... C'est la magie qui n'est pas à prendre à la légère. C'est un art dangereux qui apportera folie, maladie et mort à ceux qui voudra l'asservir, à ceux qui voudra la faciliter, la puissance et les ténèbres. C'est un art qui demande constamment méfiance, vivacité d'esprit et clairvoyance. Respecte la magie et elle te confiera son essence mais attention à sa puissance : si ton âme est faible et ton coeur remplit de ténèbres, alors la magie t'emportera dans l'obscurité...
Un temps suspendu, les mots résonnèrent dans l'antre de la chauve-souris tandis que les yeux de la candeur se ternissaient.
— C'est comme ça, qu'on m'a appris à me méfier de la magie... Il n'existe ni magie blanche gentille, ni magie noire noire dans ce monde. Mais une puissance infini et le coeur des hommes... Vous savez, le coeur d'un homme, c'est imparfait. C'est plein d'ombres, beaucoup d'ombres, c'est des envies, c'est de la vengeance, c'est la soif de pouvoir, c'est l'envie d'avoir plus, toujours plus... Et c'est aussi plein de gentillesse, de courage, et d'amour... Tonton Osgeir me disait quand j'étais petite, que la magie, c'est comme une épée. Une épée ça n'a pas à être gentille ou méchante. Mais c'est le bretteur qui va dire s'il tuera de son épée pour la gloire et le pouvoir, ou s'il tuera pour protéger et l’espoir...
Un léger sourire étira ses lèvres, se dandinant sur sa chaise. Nul doute, débattre avec le Directeur de Poudlard lui avait redonné de l'aplomb car elle aimait ça, débattre, discuter, apprendre, échanger... Mais ici, personne ne voulait s'y prêter au jeu, mais était-ce du fait qu'elle n'ait que onze ans ou parce qu'elle n'était pas comme les autres ? Faut dire, que son avis, et par sa tradition de Verbena, allait à l'encontre de certains codes de l'Ordre d'Hermès. Alors il suffirait de tomber sur un sorcier pas très ouvert d'esprit ou mal luné pour en venir aux mains et qu'on l'a désigne comme hérétique ou pire, ignorante.
— C'est marrant... Vous les sorciers, vous partagez le monde en deux : le bien et le mal. Mais comment vous faîtes quand on est au milieu ? Les Verbenae sont au milieux pour vous, non ? Nos runes ne sont ni bonnes, ni mauvaises, mais très puissantes et il faut toujours faire attention... Si je ne les respecte pas, si j'ai des mauvaises pensées, elles vont m'emporter et je ferais le mal, la souffrance et la mort aux autres... Je suis donc au milieu pour vous, les sorciers, non ? Et pour l'Ordre, j'ai beaucoup de... « magie noire » en moi, dans mes pierres... Mais je n'utilise pas ma « magie noire » pour faire du mal... Donc ! Si l'Ordre voit le monde en deux avec les gentils sorciers et leur gentille magie et les mauvais sorciers avec leur méchante magie... Je suis noire ou blanche pour vous ?
Ses petites jambes se balançaient nerveusement. Les sourcils se froncèrent, le visage se fit plus sévère, lui donnant un petit air d'enfant boudeur tandis qu'elle essayait de répondre à elle-même cette question. Voyons voir, une gentille petite fille utilise de la magie ancestrale, dangereuse, instable, où elle risque à tout moment d'être entraînée par les ténèbres, ce qui peut-être considérée par la définition de l'Ordre d'Hermès comme une forme de magie noire, car étant même nuisible aussi bien pour son porteur que pour autrui, est-ce que cela faisait d'elle une méchante à en devenir ?
— On a le droit d'être gris chez les Sorciers ? Comme la vraie magie ? Et puis d'abord, pourquoi noir ?! C'est beau le noir ! Et c'est cliché d'abord ! Pourquoi un Seigneur des Ténèbres faut qu'il soit tout en noir ? Pourquoi pas rose ? Ça c'est une couleur machiavélique ! C'est très moche le rose !
Mhmm ? Quoi ? Partir du bureau ? C'est vrai que le Directeur l'avait laissé sous-entendre et, n'étant pas sûr, l'enfant posa ses prunelles sur Severus et lui demanda d'un sourire dont les enfants candides avaient le secret :
— Mais vous-voulez peut-être que je parte ? Est-ce que vous êtes comme les autres adultes qui disent aux enfants « Tu comprendras quand tu seras grande » pour que l'enfant s'en va et être tranquille ? Le coup du dîner bientôt servis, c'est aussi une autre excuse ?
Elle rayonnait de malice, de joie et d'énergie. Son sourire se fit comme un petit rayon de soleil éclairant l'antre obscur de la chauve-souris. Eirian reprit ainsi avec une étonnante tendresse et chaleur :
— Vous savez, si je vous dérange, il faut me le dire, sinon je reste, j'aime bien débattre avec vous, vous êtres très ouvert d'esprit et gentil !
1 117 mots
Cecil A. Selwyn
MONSIEUR LE DIRECTEUR
hiboux : 3012
pictures :
TEATIME is always epic with englishmen | ALWAYS in love with his dear Lily | BOOKS lover | MAGISTER es potionis
La migraine pointe à l’horizon tandis que l’enfant babille. Insouciance mêlée de gravité. Terreur mêlée de légèreté. Que celui qui inventa jadis les enfants périsse dans les sept cercles infernaux. A minima.
— On ne nous apprend pas ça au village... C'est la magie qui n'est pas à prendre à la légère. C'est un art dangereux qui apportera folie, maladie et mort à ceux qui voudra l'asservir, à ceux qui voudra la faciliter, la puissance et les ténèbres. C'est un art qui demande constamment méfiance, vivacité d'esprit et clairvoyance. Respecte la magie et elle te confiera son essence mais attention à sa puissance : si ton âme est faible et ton coeur remplit de ténèbres, alors la magie t'emportera dans l'obscurité… C'est comme ça, qu'on m'a appris à me méfier de la magie... Il n'existe ni magie blanche gentille, ni magie noire noire dans ce monde. Mais une puissance infini et le coeur des hommes... Vous savez, le coeur d'un homme, c'est imparfait. C'est plein d'ombres, beaucoup d'ombres, c'est des envies, c'est de la vengeance, c'est la soif de pouvoir, c'est l'envie d'avoir plus, toujours plus... Et c'est aussi plein de gentillesse, de courage, et d'amour... Tonton Osgeir me disait quand j'étais petite, que la magie, c'est comme une épée. Une épée ça n'a pas à être gentille ou méchante. Mais c'est le bretteur qui va dire s'il tuera de son épée pour la gloire et le pouvoir, ou s'il tuera pour protéger et l’espoir… C'est marrant... Vous les sorciers, vous partagez le monde en deux : le bien et le mal. Mais comment vous faîtes quand on est au milieu ? Les Verbenae sont au milieux pour vous, non ? Nos runes ne sont ni bonnes, ni mauvaises, mais très puissantes et il faut toujours faire attention... Si je ne les respecte pas, si j'ai des mauvaises pensées, elles vont m'emporter et je ferais le mal, la souffrance et la mort aux autres... Je suis donc au milieu pour vous, les sorciers, non ? Et pour l'Ordre, j'ai beaucoup de... « magie noire » en moi, dans mes pierres... Mais je n'utilise pas ma « magie noire » pour faire du mal... Donc ! Si l'Ordre voit le monde en deux avec les gentils sorciers et leur gentille magie et les mauvais sorciers avec leur méchante magie... Je suis noire ou blanche pour vous ?
La paume se passe sur le visage, les épaules s’affaissent, comme empesanties par la légèreté de la voix qui babille, babille, babille. Quelle ironie est-ce pour un directeur que de soudainement songer à changer de carrière ? Comment une gamine aussi mignonne avec ses petites joues pleines et les grands miroirs de ses yeux peut-elle être aussi démoniaque ? Ce doit être un truc verbena… Ou un truc de gosses… Dans tous les cas, je suis formel : le Seigneur des ténèbres lui-même n’aurait pas pu lutter contre ça. Il aurait cédé. Il l’aurait tuée. Par chance, je ne suis pas un maniaque de l’avada kedavra et je puis profiter d’une respiration de la petite pour jouir de quelques secondes de silence salutaire. Juste le temps de me remettre en place les esprits tout en frissonnant : et dire qu’il faudra survivre à ça pendant ses sept années d’étude...
— On a le droit d'être gris chez les Sorciers ? Comme la vraie magie ? Et puis d'abord, pourquoi noir ?! C'est beau le noir ! Et c'est cliché d'abord ! Pourquoi un Seigneur des Ténèbres faut qu'il soit tout en noir ? Pourquoi pas rose ? Ça c'est une couleur machiavélique ! C'est très moche le rose ! Mais vous-voulez peut-être que je parte ? Est-ce que vous êtes comme les autres adultes qui disent aux enfants « Tu comprendras quand tu seras grande » pour que l'enfant s'en va et être tranquille ? Le coup du dîner bientôt servis, c'est aussi une autre excuse ? Vous savez, si je vous dérange, il faut me le dire, sinon je reste, j'aime bien débattre avec vous, vous êtres très ouvert d'esprit et gentil !
Enfin la quiétude revient après le fracas de ces flots de mots. Vagues, vagues, flux et reflux. L’écume du silence papillonne dans le bureau. Fumseck laisse s’échapper une trille amusée, la mirette du portrait de Dumbledore qui avait eu la délicatesse de demeurer silencieux pétille de malice. Je sens que la petit Almasdottir, je vais en entendre parler pendant des mois, des années peut-être. Profonde inspiration, souffle imperceptible dans la quiétude du bureau.
« Le dîner n’est pas une excuse, Mademoiselle Almasdottir, il est bel et bien l’heure d’aller souper. »
Un doigt désigne la pendule au mur, affichant en effet l’écoulement du temps. Un demi-sourire sur les lèvres.
« Par ailleurs, pour vos questions… Je crains qu’elles ne trouveront pas de réponse ce soir. Pas de réponse définitive en tous cas. Vous semblez croire que les sorciers de l’Ordre d’Hermès ont tous la conscience d’appartenir à cette tradition tout comme vous avez conscience d’appartenir aux Verbenae. Ce n’est pas le cas. La plupart d’entre nous ne connaissons pas cet aspect de l’histoire de nos pratiques magiques et ne sommes guidés que par des valeurs morales, le bien, le mal. Ces valeurs morales ont été renforcées par les années de guerre que nous avons connues. Vous êtes un peu jeune pour en avoir éprouvé la réalité, mais la plupart des adultes et les plus âgés de nos élèves ont connu les combats, la violence, la torture, la mort. Cela pousse à polariser la pensée. Cela pousse à réfléchir en termes binaires que sont le bien ou le mal. Ce manque d’ouverture d’esprit, comme vous l’appelez, n’est qu’une conséquence des années de tourmente dont nous sortons tout juste. »
Conscient que je n’aurai de calme retrouvé qu’en jetant manu militari dehors la petite fripouille, je me déploie, me lève, et lui tend la main.
« Allons dîner, Mademoiselle Almasdottir. Il sera toujours temps de discuter philosophie, morale et magie à d’autres occasions. Qu'est-ce qui vous intéresse pour le club de potions, vendredi prochain ? »
Et tout en devisant affablement, la terrible chauve-souris des sommets – les cachots, c’était au temps jadis – que je suis descend les degrés accompagné du petit gnome Verbena qui promet de colorer d’une terrifiante spontanéité les prochaines années.
Ha, ce n'était pas une excuse alors ? Eirian leva son petit nez pour suivre ce doigt et reconnu, à regret, qu'il était bien l'heure d'aller manger. L'enfant soupira en s'affaissant sur le bureau du directeur ; elle n'avait pas envie de se remplir la panse, elle préférait rester dans la tanière du directeur dont elle venait tout juste de faire la connaissance. Et elle l'appréciait. Beaucoup, étonnement. La fillette ne s'attendait pas à éprouver autant de sympathie et d'intérêt pour cet homme à l'aura sombre, haut régnant de ce berceau des futurs Sorciers de l'Ordre d'Hermès. Elle qui, pourtant, avait une méfiance certaine pour ces gens là. Mais non, le Directeur se trouvait être, à ses yeux, un personnage fort intéressant, singulier et surprenant. Il y avait de la réflexion derrière ses mots, un regard large, qui regarde loin, qui analyse et remet en question ce qui peut-être vu et entendu. Échanger avec lui, c'était aussi acquérir une meilleur réflexion en se défaisant de ses aprioris. Comme à cet instant, pour la jeune Eirian ; elle n'avait jamais imaginé auparavant qu'un Sorcier de l'Ordre d'Hermès pouvait ignorer d'appartenir à cet ordre, tout comme le fait que l'acquisition d'une pensée binaire, de sa notion d'un monde partagé qu'avec le bien et le mal, pouvait être acquis par la souffrance, la mort et la guerre... Et elle se sentit bête, comme prise sur le fait d'un caprice. Elle n'aurait pas dû juger ainsi les autres avec autant d'ardeur. Le Directeur avait raison ; elle était trop jeune et avait beaucoup à apprendre sur le monde qui l'entourait. C'est la leçon de vie qu'elle retint à cet instant, joues rougies par la honte et ce petit hochement de tête.
Le sujet était donc clôt, ou plutôt reporté, et après avoir autant enquiquiner ce pauvre Severus Rogue, l'enfant obtempéra à sortir de sa chaise et suivre le grand Sorcier dans les escaliers. Et son petit coeur se réchauffa à l'idée qu'elle pourrait poursuivre ce genre de conversation avec ce mentor assez singulier. Sourire rayonnant comme un petit soleil, sa voix sonna comme un carillon tant il vibrait de toute gaieté :
— Apprenez moi à devenir une grande potionniste !
Philosophie, morale et magie, ça sera pour une prochaine fois. Le club de potions étaient bien trop important à ses yeux ; il fallait qu'elle utilise ces heures à bonnes escients pour travailler sa technique et se parfaire dans le domaine des concoctions. Ils auront sans nul doute une autre occasion pour philosopher autour d'une autre tasse de thé. Ainsi, heureuse de cette douce journée, Eirian glissa sa petite main toute chaude entre les doigts gelés de l'ancien Mangemort. Blanche innocente sur la pâleur de la mort, peau délavé par le sang de ses victimes. Et pourtant, elle semblait maintenir cette main avec un sincère affection, petits pas clapotant à côté des grandes enjambés du lasse Directeur. Elle trottait presque pour rester à ses côtés.
— Et je m'appelle Eirian... Pas Almasdóttir car chez nous les islandais, on ne prononce pas le nom de famille... Ravie d'avoir fait votre connaissance, Monsieur Severus !
Et ce sourire, aveuglant d'innocence, fut la promesse de colorer la vie du grand et terrible Severus Rogue pour les sept prochaines années à venir...