S’il est une chose que j’apprécie plus que toute autre, c’est un esprit bien fait dans une gangue d’aristocratie. Lorsque la missive de la petite @GABRIELLE DELACOUR m’est parvenue, tout d’abord, j’ai été charmée, je dois dire, par l’élégance de sa calligraphie et la ferveur de sa prose. Son nom m’était familier puisque je ne sais que trop qui sa sœur aînée a eu le mauvais goût d’épouser. j’ai toutefois eu à coeur de faire quelques vérifications avant de me précipiter dans la réponse. Ce pourrait être un piège tendu par mes détracteurs après tout. Je ne sais que trop combien les Weasley ont été proches de ce cher Harry James Potter dans les temps jadis. Quelques contacts à Gringotts m’ont confirmé le statut de stagiaire de cette jeune française, et quelques gallions m’ont appris l’étendue de la respectabilité de sa famille. En outre, me dirent mes contacts, la belle ne semble pas particulièrement proche de William Weasley, travaillant lui aussi dans les bureaux de Gringotts. Voilà qui était parfaitement passionnant.
C’est donc forte de ma résolution que je me suis installée à un bureau, ai déployé un parchemin à entête et entrepris de le couvrir soigneusement de mon meilleur français. Toutes ces leçons de calligraphie depuis ma plus tendre enfance portent, semble-t-il, leurs fruits. Armée de ma plume, j’ai entrepris de déposer avec soin l’encre à la surface du parchemin.
« Mademoiselle Delacour,
Je vous remercie de votre lettre qui me fit très plaisir. Votre soutien est très apprécié, et votre délicieuse missive révèle déjà l’excellence de votre conversation. Je serais des plus honorée si vous acceptiez de venir me faire la grâce de votre présence autour d’un thé un jour prochain. Que diriez-vous de ce samedi à dix sept heures ? J’imagine qu’il doit être malaisé d’être si loin de sa famille à l’occasion de votre stage, et que le raffinement de la culture française doit vous manquer. Si je puis alléger votre solitude en vous présentant la bonne société londonnienne, je m’en réjouirai.
Si la date proposée vous convient, faites-le moi savoir, je vous prie. J’arrangerai pour vous un portoloin qui vous amènera à l’heure dite au manoir. Vous le devinez sans doute, mais mon manoir n’est plus connecté au réseau de Cheminette depuis quelques temps déjà pour d’élémentaires raisons de sûreté.
Veuillez agréer, Mademoiselle Delacour, l’expression de mes cordiales salutations,
Narcissa Eleanor Black-Malefoy »
La réponse de la jeune femme fut prompte à arriver, le portoloin plus prompt encore à être apprêté et retourné. C’est ainsi que par une délicieuse soirée d’hiver, alors que le ciel s’embrase déjà des derniers feux du jour, qu’un patio tout de verrières est aménagé pour prendre le thé. La véranda montre l’étendue du domaine où des tentes s’illuminent peut à peu. Les fuyards se cachent là, nombreux. Les Carrow notamment, mais pas seulement. Je ne puis m’empêcher de songer à mon propre époux. Il est absent, ce soir. C’est peut-être mieux ainsi.
L’entrée claironne d’une sonnette et me voici debout, devant une ravissante jeune femme blonde comme les blés, à l’oeil vif, pur, et aux manières délicates. Il faut croire que le métissage des sorciers avec les Vélanes a quelques avantages physiques indéniables. La belle resplendit et je lui trouve un charme aristocratique tout à fait charmant. J’ai quelques souvenirs de son aînée qu’il m’avait semblé trouver plusieurs fois à la limite du vulgaire dans son assurance. Mademoiselle Gabrielle Delacour ne semble pas avoir pareil comportement pour le moment, je lui tends donc la main.
« Mademoiselle Delacour, je suis ravie de vous accueillir. Venez, laissez-moi vous débarrasser de votre cape et accompagnez moi au jardin d’hiver pour prendre le thé. Avez-vous fait bon voyage jusque ici ? »
Le manteau est confié à un elfe de maison, la jeune femme entraînée jusqu’à la véranda permettant d’apercevoir tout le domaine. Des flammes éclairent doucement la pièce tandis que les jasmins d’hiver embaument les environs.
Gabrielle a les mains moites. Elle se les est déjà essuyées trois fois sur un mouchoir lové dans sa poche. Elle aurait presque des suées froides. Elle tient dans sa main une petite carte de visite, le portoloin envoyé par la grande, la belle, l’élégante, l’irrésistible Narcissa Malefoy. Cette femme est incroyable. Même sans sang vélane, elle arrive à en imposer à chaque interview, à chaque communiqué. Elle est belle, elle est classe, et elle a répondu à la lettre que Gabrielle lui a envoyé. Elle ne s’attendait pas vraiment à recevoir une lettre de Lady Malefoy. Quand elle a vu les armoiries sur le cachet de l’enveloppe, son cœur s’est mis à battre très fort dans sa poitrine, comme s’il voulais s’échapper et aller courir de joie partout. Elle a décacheté la lettre avec révérence, et l’a lue. Ses mains tremblaient de bonheur. Narcissa Malefoy lui a répondu. Mieux : elle lui a répondu gentiment, l’invitant à venir prendre le thé.
Gabrielle avait prévu d’aller voir sa sœur ce samedi-là, mais elle s’est dépêché d’annuler. Elle a prétexté un rendez-vous très important pour son travail, la rencontre de quelqu’un d’indispensable pour sa carrière. Ce n’est pas forcément faux. Fleur ne serait peut-être pas d’accord avec cela, mais ça n’en reste pas moins vrai : Narcissa Black-Malefoy est indispensable pour ce monde. Et il est grand temps que tout le monde s’en rende compte.
Elle a répondu rapidement à Lady Malefoy, encore éblouie que l’aristocrate ait pris la peine de lui écrire en français et de l’inviter pour le thé. Et tous ces compliments sur la jeune fille lui font tourner la tête. Gabrielle est donc aux anges et terriblement angoissée en même temps lorsque le portoloin s’active et la dépose devant chez son hôte. Elle range soigneusement la carte dans la poche intérieure de son manteau et sonne à la porte, une boule d’angoisse au ventre. Elle a répété dix mille fois son discours, à chaque fois différent. Elle ne sait toujours pas ce qu’elle va faire quand Lady Malefoy va ouvrir la porte et lui laisser faire son premier pas dans la bonne société du Royaume Uni, loin de ces grossiers personnages de Weasley.
Enfin, la porte s’ouvre. Gabrielle se sent immédiatement très impressionnée lorsqu’elle découvre l’aristocrate sur le pas de sa porte, sublime, si proche, si distinguée. Lorsqu’elle l’invite à entrer, la jeune fille sent son coeur battre beaucoup trop fort, lorsqu’elle lui parle, c’est comme si des anges chantaient sur un fond de belles orgues majestueuses de Notre Dame. Lorsqu’elle lui tend la main et la lui serre, des frissons parcourent la nuque de Gabrielle. Elle entre, cependant, subjuguée par son environnement. Tout respire le luxe et le bon goût. Elle confie son manteau à un elfe de maison, le remercie poliment.
– Je vous remercie Lady Malefoy, mon voyage s’est passé sans encombre.
Elles arrivent toutes deux dans une exquise véranda chauffée agréablement. Au dehors, le soir tombe, et d’où elle est, Gabrielle peut voir ces fameuses tentes des gens qui ont choisi de quitter l’Angleterre de Potter pour embrasser un renouveau. Ils sont plus nombreux qu’elle le croyait. Cela l’inquiète. Peut-être que Lady Malefoy n’aura, finalement, pas besoin de ses services. Peut-être qu’elle a déjà de nombreux conseillers prêts à l’aider ?
– C’est merveilleux, Lady Malefoy ! Votre domaine est magnifique.
Gabrielle ne s’assied que lorsque on l’invite à le faire et accepte la tasse qu’on lui tend. Elle admire le raffinement de la porcelaine, savoure l’odeur d’un thé typiquement anglais. L’ambiance feutrée lui plaît, le calme lui plaît. On est loin des braillements de la famille Weasley. Et la voix de Lady Malefoy est infiniment plus agréable que celle de Molly Weasley. Oh, la matriarche Weasley est revenue à la raison, on ne peut pas lui enlever ça, mais elle n’en reste pas moins une noble déchue, une traîtresse à son sang, et un personnage très irritant. – Permettez moi de vous renouveler de vive voix toute mon admiration, Lady Malefoy. Ce que vous accomplissez est ce dont le Royaume Uni a tant besoin.
500+ mots private joke "orgue" validée !
L'Enchanteresse
L'ENCHANTERESSE
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Becoming a dark lady | Death eater wife | Ruling her world
Il y a quelque chose de rafraîchissant dans la fréquentation de jeunes gens à l’esprit bien fait et à la tournure d’esprit harmonieuse. Quel malheur que cette jeune femme ne soit pas l’héritière de sa famille et que sa sœur ait cru bon d’épouser un des Weasley qui n’a, pour l’heure, aucun grief contre la politique hasardeuse du nouveau gouvernement. Je suis confiante, toutefois. Peut-être cette jeune Gabrielle, si affable et courtoise pourra atteindre son aînée et à travers elle l’un des derniers Weasley à préférer la neutralité. Je n’ai jamais eu de goût pour cette famille de seconde zone, s’il faut être parfaitement honnête : rustres, désargentés, traîtres à leur sang. Mais ils demeurent des sangs purs, jadis appartenant à l’aristocratie du Royaume Uni, et il semble que Molly, pour bruyante qu’elle soit, est bien revenue à la raison avec quelques uns de ses fils. Dès lors, il est bien possibles que d’autres s’engagent à leur tour dans les rangs d’un retour aux traditions. Celle qui se tient devant moi peut m’y aider, je le sais. Je ne doute pas une seule seconde de sa clairvoyance, de sa finesse d’esprit, de son astuce et de sa capacité à convaincre autrui. Elle est charmante. Presque trop. Le sang Vélane, sans doute. Une arme de séduction, à n’en pas douter, qui ne peut être que bénéfique pour peu que l’on agite ces égéries dans le bon camp.
Le mien.
Nous voilà installées, une tasse de thé à la main. Nos fauteuils sont côte à côté, avec vu sur le couchant qui embrase d’ombres mouvantes tout le domaine. Un elfe de maison nous a apporté un thé délicieux, les candélabres embrasent l’atmosphère d’une chaleur humaine qui pourrait cruellement manquer à ce type de rencontres protocolaires. Je verse le thé dans les tasses, lui en tends une avec un sourire éclatant.
« Vous me flattez, Mademoiselle Delacour, c’est un plaisir de vous recevoir ici. »
Je prends ma propre tasse, effleure la porcelaine précieuse entre mes doigts. Ma belle-mère avait un goût assez affreux en matière d’hommes pour épouser sans broncher l’insipide Abraxas Malefoy après son sulfureux divorce, mais au moins sa prédilection pour les porcelaines anglaises était inattaquable. Je me remémore sans mal la froideur aristocratique de l’héritière Rowle honorée en justes noces d’un époux de deux décennies son aîné. Suis-je à présent devenue ce type de Lady Malefoy, une belle plante incapable de tenir tête à son épousé ? Je le fus pendant bien trop longtemps. Certaines traditions des Black doivent renaître, même chez les Malefoy. Chacun sait qu’une femme Black ne se laisse pas traîner dans la boue, et je suis, à présent, l’ultime d’entre elles. Bellatrix se morfond dans sa folie à Azkaban, Andromeda nous a disgrâciés il y a bien trop longtemps.
Une gorgée de thé, la tasse est reposée. Je me suis tournée vers Gabrielle et lui ai saisi une main. Les yeux brillent, un sourire sur les lèvres.
« Mademoiselle Delacour, je ne serais rien sans le soutien de jeunes gens avisés comme vous l’êtes. Voyez-vous, trop de nos têtes blondes oublient d’où elles sont venues. Ce jeune monsieur Potter ne mérite pas ses titulatures de Lord qu’il roule dans la boue à chaque apparition publique… Et c’est une honte que d’appartenir à la Maison Black sous sa titulature. Ne l’oubliez jamais : je ne puis assainir notre Royaume sans le soutien d’amis éclairés. C’est à moi de vous remercier de votre présence. »
Je libère sa paume de la mienne, laisse flotter la satisfaction que je ressens à trouver si plaisante compagnie.
« Dites-moi plutôt, chère Mademoiselle, comment vous vous acclimatez au Royaume Uni. Votre travail à Gringotts vous plaît-il ? Avez-vous eu l’occasion de visiter votre sœur ? »
Je cherche à la sonder. Je ne sais rien de son goût ou de son dégoût pour les Weasley. L’alliance d’une partie d’entre eux avec moi pourrait m’être favorable comme délétère, et je tiens à jauger autant que je le puis la jeune femme assise à mes côtés. Si tous les jeunes gens au sang pur pouvaient être comme elle… La désertion de @Veredis S. Beurk ou les réticences de la jeune @Pelagia H. Ollivander pèsent lourdement sur ma conscience.