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Bravades {Moira}
 :: Salon de Thé & Bar à chats :: SAISON 1 :: RP

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Sam 9 Nov - 11:21


IRRÉVÉRENCES
« Epistolaires échanges se font filin d'acier soutenant les mouvements désordonnés, convulsifs, erratiques d'un danseur dans les nuages. Marionnette en représentation, l'orchestrateur rit des agissements de son pantin. Qui tient la croix, qui se récrie au bout du fil ? »

Novembre. Décembre. Janvier. Les jours se sont étiolés dans une obsédante langueur. Les réjouissances hivernales s’en sont allées. Yule a été, cette année, une affaire discrète, loin des siens où le fuyard n’était, de toute façon, pas bienvenu. Recueil dans les cavités d’un village de pêcheurs. Prêcheurs cacochymes ont éructé leurs sermons. Et la petite église catholique a vu, côte à côte, le renégat et la vieille Abaigh assis au dernier rang d’une chapelle de village désespérément vide. Dans l’assemblée, quelques pécheurs ramenant dans leurs filets vices et vicissitudes du quotidien. Quelques vois pour célébrer de vieux chants de Noël. Une prière jetée à la confesse. Le père a écouté avec horreur le fils confesser ses crimes. Et lorsqu’il voulut appeler son diocèse, Lucius Abraxas Malefoy, ennemi publique numéro un du monde de la magie avait déjà disparu, laissant un prêtre dans son officine au bord de l’apoplexie. Léger, l’homme l’est plus qu’il ne l’a été au cours de longues années. C’est pourquoi il a pris la plume à son retour à Poudlard. Neuf janvier. L’anniversaire de Severus, tiens. Papier à lettres est soigneusement sélectionné. Indice. L’entête du Ministre Potter brille de mille feux. Il a du goût, le petiot.

« Chère Madame Oaks,

J’ose espérer que mon long silence ne vous aura importunée. Il m’a semblé que vous seriez sans nulle doute fort occupée avec l’inculpation de ce cher Lestrange, les funérailles de Johnson et la mise à pied de ce pauvre Fjalarsson. Comment va-t-il, d’ailleurs ? Je me souviens l’avoir vu en fort mauvaise posture. Notez toutefois qu’il semblait bien rétabli lorsqu’il s’est aventuré, invité par Garrick Ollivander, à la dernière soirée donnée par mon épouse. Il paraît qu’il a fait fort impression sur les plus conservateurs des aristocrates entourant ma dulcinée. Vous n’êtes pas obligée de me croire sur parole, bien sur, mais sa présence à vos côtés ces jours-ci devrait achever de vous convaincre que malgré ses tentatives pourtant fort pleines de fiel, il a réussi à ne pas tout à fait vexer les mauvaises personnes, assurant de ce fait sa survie pour encore quelques temps. Futé Viking. Comment va notre cher directeur du département de la Justice ? J’avoue être fort marri qu’il n’ait pu tromper Lestrange et s’en soit retrouvé si grièvement blessé. J’aurais voulu le prévenir que les boutons de manchette étaient une fort mauvaise idée, mais je n’aurais pu le faire sans me trahir tout à fait, et je n’étais, après tout, pas certain que Lestrange les remarquerait. Pour ce que valent les mots d’un renégat, je suis bien désolé que Shaklebolt ait été découvert : il fait partie des quelques rares représentants du Ministère a toujours avoir su conserver mon respect.

J’ose espérer, aussi, que ce cher Gythe a retrouvé de son allant après son petit somme et n’aura pas été inquiété par mes menues actions. J’entends bien que l’eviscere est parfaitement illégal, mais reconnaissez tout de même qu’il a radicalement contribué à abréger les pertes dans votre camp. Je ne doute pas que les aurors que vous ayez envoyé sur le champ de bataille fussent parfaitement entraînés, mais vous savez ce qu’il se dit dans la vieille sagesse populaire : un chien aux abois est toujours plus dangereux.

Il me semble donc, mais je vous en laisse seule juge, que ma part de notre accord ait été accomplie. Vous n’en aimez peut-être pas grandement les modalités, mais enfin, que pouvait-on attendre d’autre d’un criminel ? Par ailleurs, vous remarquerez que Lestrange est toujours en vie, ce qui permettra à la Justice aveugle de frapper son côté d’une sentence d’emprisonnement. Avouez que vous eussiez été déçue de le voir échapper à la main de Thémis par un artifice aussi grossier que le trépas. Peut-être pouvons-nous reprendre les négociations là où nous les avions arrêtées, à présent ? Vous vous souvenez sans nulle doute de mes audacieuses demandes. n’est-il pas ?

En l’attente de votre réponse, veuillez agréer, divine Présidente Sorcière du Magenmagot, l’expression de mes respectueuses salutations,

Lucius Abraxas Malefoy 

PS : Joyeux Noël avec, je vous l’accorde, un soupçon de retard. »


Joint à la missive, une exquise bouteille de vieil Odgen. Par chance, le hibou engagé au relais postal du Chemin de Traverse est un oiseau fort prudent qui n’aura pas manqué de livrer par les voies normales le paquet et la missive à sa destinataire. Un menu enchantement, cependant, l’aura fait rester sur le bureau de Moira, dans l’attente d’une réponse que chacun devinera ici merveilleuse. Aussi merveilleuse que l’ambre de la liqueur clapotant dans son flacon.

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Moira A. Oaks

Moira A. Oaks
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Sam 21 Déc - 1:35





9 janvier 2004

Moira a longtemps attendu cette lettre. Pendant un moment, elle s’est même demandé si Lucius réapparaîtrait ou s’il était reparti en cavale, convaincu de ne pouvoir rien tirer de ses derniers exploits d’infiltration, d’être enfin allé trop loin pour espérer une quelconque clémence. A moins que sa trahison vis-à-vis du dernier frère Lestrange n’ait déjà fuité chez le reste de ses anciens frères d’arme. Les Carrow sont toujours dehors, après tout. N’auraient-ils pas de bonnes raisons de supprimer le patriarche Malefoy avant que celui-ci ne les donne aux Aurors comme il a donné Rabastan ?

Au Ministère, les stigmates de leur rencontre avec Lestrange se résorbent semaine après semaine. Le deuil de Johnson s’allège au fur et à mesure. On se réjouit de voir son épouse reprendre lentement le cours de sa vie, relever la tête pour elle et pour ses enfants. A Sainte Mangouste, la nouvelle du réveil de Kingsley Shacklebolt n’a pas fuité pour la propre sécurité du directeur du bureau des Aurors, et pour lui assurer une quiétude salutaire pendant encore quelques jours avant que tous les agents du Ministère ne viennent s’enquérir de son état. On ne survit pas à Rabastan Lestrange sans susciter quelques passions.

Neuf janvier. Un rendez-vous que Moira honore chaque année en déambulant des heures durant sur le chemin de Traverse en espérant trouver de quoi faire sourire un homme au visage aussi impassible que @Severus Rogue. La tâche est souvent ardue : plus encore depuis que le directeur de Poudlard ne manque plus de rien pour ce qui est de son attirail de potionniste. Que peut-elle bien lui faire envoyer cette année pour ses quarante-quatre ans ?

Passer devant Fleury & Bott est généralement une bonne idée quand on connaît l’amour inconditionnel de Severus pour les livres de bonne facture. La collection qu’elle a déjà plusieurs fois admirée dans son bureau en atteste. Pourtant aujourd’hui, c’est un type de lecture bien différent qui attire son attention tant l’étal est tapageur. Rita Skeeter, l’enquêtrice de choc de la presse sorcière, s’est une nouvelle fois dépassée pour faire ressortir ses biographies grandioses au milieu des manuels scolaires et des encyclopédies assommantes qu’on continue de vendre aux pauvres sorciers en mal de connaissances. Les couleurs criardes et les photos animées tentent d'appâter le lecteur hasardeux - certainement un reste de sa publicité pour les fêtes de fin d’année. Quelques sorciers ont bien le peu de goût de glisser un de ses ouvrages sous le sapin pour une de leurs connaissances, ou une vieille tante qu'ils détestent. Tout l’intérêt du geste et l’intention avec laquelle on le fait.

Relevant un sourcil, la magistrate s’approche à la recherche d’un ouvrage qu’elle connaît bien : la biographie officieuse du controversé directeur de Poudlard, rééditée avec une nouvelle préface rédigée par son auteure. Curieuse, Moira s’empare d’un livre dont elle lit la nouvelle accroche : Skeeter y dénonce la honteuse tentative de censure du premier concerné par son enquête qui lui a intenté un procès, preuve s’il en est de l’importance des vérités qu’elle écrit dans son ouvrage. Qui chercherions-nous à museler sinon les lanceurs d’alerte ? On ne se fatigue pas à enterrer un tissu de mensonges si ceux-ci sont si faciles à démonter ! On a voulu museler la presse ! Sourire amusé de la juge. Elle passe en caisse, puis utilise de la poudre de cheminette pour se rendre chez Honeydukes où elle achète une bouteille de vin des elfes pour accompagner le tout. Elle file alors aux services postaux magiques où elle prend le temps d’écrire une petite dédicace à l’intérieur du livre avant de payer la livraison jusqu’à Poudlard.

« Mon cher Severus,
un tel chef d’œuvre ne pouvait pas manquer à ta bibliothèque ! Il serait dommage que tu t’obstines à ne pas lire jusqu’au bout une enquête d’une telle qualité. J’aime tout particulièrement le chapitre sur ton procès à la fin de la guerre : la description est si réaliste que j’ai eu l’impression d’y être !

Je t’ai quand même ajouté un bon vin des fois que tu veuilles tout oublier à la fin de ta lecture. Ambrosius Flume m’a garanti que cette année était la meilleure cuvée depuis vingt ans ! De quoi adoucir tes humeurs, j’en suis certaine.

Je te souhaite un très bon anniversaire. Et cesse de froncer les sourcils : ta ride du lion n'arrête pas de se creuser !

Avec toute mon amitié,

M. »

De retour à son bureau au Ministère, c’est un autre volatile qu’elle découvre alors sur le perchoir de son brave Foul’camp. La créature la regarde, l’air courroucé, comme si elle l’attendait depuis de longues heures pour qu’on la libère enfin de son fardeau. Sans même prendre le temps de se débarrasser de son manteau, la juge récupère deux friandises qu’elle offre au hibou qui les engloutit sans oublier de la houspiller quand elle décroche enfin la lettre de sa patte. La juge lève un sourcil avant de se diriger vers son bureau, abandonnant son manteau sur le dossier de son siège avant de s’y asseoir.

Son cœur frappe férocement sa poitrine quand elle reconnaît enfin l’écriture apposée sur l’enveloppe. Cette façon de dessiner les « M » lui est trop familière pour qu’elle ne risque de la confondre avec une autre. Lucius Malefoy redonne enfin de ses nouvelles et c’est cette fois un papier dont l’entête appartient au Ministre lui-même qu’elle déplie. Quand son tour du monde cessera-t-il ? Il lui semble avoir compris depuis longtemps que les capacités d’infiltration du malfrat sont parmi les plus extraordinaires qu’elle ait jamais connues. Sa démonstration lors de la capture de Lestrange en a été la preuve la plus flagrante.

Mais à la lecture de sa lettre, c’est une autre réalité qui revient lui éclater en plein visage, celle de cet engagement pris à demi-mots, de cet accord passé entre eux il y a de cela plusieurs mois et qu’une des deux parties a déjà honoré. Le cœur de la juge accélère l’allure. Elle savait que ce jour viendrait, le jour où sa correspondance avec l’ennemi numéro un de Grande Bretagne ne pourrait plus rester secrète, le jour où il lui faudrait avouer ses manigances au plus haut responsable du Ministère et craindre son éventuel courroux. Comment Potter prendra-t-il son action ? Comprendra-t-il ce qu’elle a tenté de faire ou n’y verra-t-il qu’une succession d’actes irresponsables qui le mettent aujourd’hui en porte-à-faux face à un homme aussi imprévisible que Malefoy ? Le patriarche semble après tout ne plus avoir grand-chose à perdre tant ses prises de risques deviennent dangereuses. Les hiboux nombreux envoyés depuis sa planque jusque dans son bureau ont précédé son infiltration en pleine délégation d’Aurors et de brigadiers pour l’arrestation de Rabastan Lestrange. Existe-t-il méthode plus téméraire de mettre en péril toute sa cavale ?

Qu’importe. La suite des événements est inévitable. Il lui faut enfin dévoiler son stratagème à @Harry J. Potter et prier pour que sa réaction soit celle qu’on attend d’une personne de son statut. En sortant de son bureau pour rejoindre celui du Ministre, la Présidente-Sorcière a une démarche est moins vive qu’à l’accoutumée. Peut-être les lettres conservées dans la mallette qu’elle emporte avec elle se font-elles plus lourdes ce jour-là qu’elles ne l’ont jamais été.  

Il a fallu expliquer, détailler, contextualiser, faire profil bas quand la situation l’exigeait. Il a fallu endurer les grimaces d’exaspération, adoucir la rudesse de certaines questions, assurer enfin du bien fondé de ses prises de risques pour que le lionceau dans son emportement ne mette pas en péril sa crinière. Car la première réaction d’un Gryffondor est toujours l’attaque franche et Moira connaît bien ces automatismes pour y être elle-même sujette. Pourtant, le Ministre n’est pas un sot et, les premiers émois passés, leur discussion s’est calmée pour laisser place à un débat intense mais sensé sur l’attitude à adopter pour la suite des événements.

Longtemps, Potter a souhaité rencontrer Lucius Malefoy, profiter de l’occasion offerte par la juge pour confronter son ennemi et négocier en personne les termes de sa reddition. Mais les arguments de Moira n’ont cessé de fragiliser sa décision. Malefoy est imprévisible et toutes ses connaissances s’accordent sur le peu de crédit qu’on peut donner à ses engagements car on n’est jamais sûr de sa première allégeance. Et si toutes ses manœuvres ne servaient qu’à approcher le Ministre et le supprimer pour servir son épouse dont les coups politiques ne cessent d’augmenter le trouble qui sévit dans toute l'Angleterre ? Et si Moira se fourvoyait sur la relative confiance que le sorcier lui inspire et qu’ils ne devaient au contraire lui laisser aucune latitude pour se concentrer sur sa capture maintenant que le dernier frère Lestrange est derrière les barreaux avec son cadet ? Tahir un traître est-il plus condamnable que de le laisser en paix ?

Les heures se succédant, Ministre et Présidente-Sorcière se sont accordés sur deux points : Potter ne peut accepter encore de rencontrer Malefoy car s’ils se trompent sur les desseins de l’ancien mangemort, ce sont les derniers espoirs de paix qui s’éteindront avec l’Elu. Mais tous deux ne peuvent pas non plus vexer leur rival de peur qu’il ne retourne à ses pires exactions. Après l’avoir rencontré dans ce village de pêcheurs où ils ont arrêté Lestrange, Moira en est sûre : Malefoy n’a rien perdu de sa puissance ni de sa détermination. Un criminel de son envergure laissé entièrement libre de ses mouvements serait une menace qu’ils ne peuvent se permettre de éclore . Ainsi la seule question qui demeure est de savoir qui remplacera le Ministre. Qui serait assez prestigieux, assez habile et assez solide pour remplacer Harry Potter lui-même ? Qui pourrait ne pas trop décevoir Lucius Malefoy et en même temps avoir le répondant nécessaire pour les négociations à venir ?

Il ne leur a pas fallu longtemps pour trouver un nom, et tout aussi peu de temps à cette personne pour qu’elle n’accepte cette lourde tâche.

Car les lions se comprennent.
Et les lions chassent en groupe.

De retour à son bureau, en fin de soirée, Moira retourne immédiatement s'asseoir sous le regard noir du volatile envoyé par Malefoy qui continue de s’impatienter. Mais la juge ne lui prête aucune attention. Tirant une feuille de parchemin d’un tiroir, elle s’empare d’une plume qu’elle trempe rapidement dans un encrier pour débuter sa réponse.

« Cher Lucius,

je commençais à m’inquiéter de ne plus recevoir de vos nouvelles. Quelle infamie a bien pu vous tenir si longtemps loin de votre plume, vous qui sembliez si prompt à revenir m’écrire quand vous trouviez un moment de quiétude ? Vos anciens camarades se sont-ils accaparé tout votre temps en ayant vent de votre petite fourberie à l’encontre de Rabastan Lestrange ? Si tel est le cas je puis vous assurer que la fuite ne vient pas de moi, mais peut-être certains parmi les agents que vous avez floués ne se sont pas montrés si cléments. Vous leur pardonnerez cet outrage, je l'espère. Après tout, vous saviez sans doute que votre dernier exploit ne vous octroierai pas que des admirateurs.

La robustesse de Valur et Kingsley n’a une nouvelle fois pas failli, rassurez-vous. Tous deux auront donc de nouvelles cicatrices à comparer lors de leurs chamailleries habituelles. Je leur transmettrai avec plaisir vos meilleurs vœux, quoique vous avez visiblement déjà eu l’occasion de les confier à Fjalarsson vous-même. Je ne doute pas de sa capacité à faire preuve de la plus belle courtoisie lors d’occasions distinguées.

Il se trouve que j'ai entendu parler de cette petite soirée organisée par votre épouse au manoir Selwyn. Comment se porte Narcissa, d’ailleurs ? Ses petites interventions dans la Gazette du Sorcier sont toujours aussi divertissantes. Je ne la pensais pas si encline à se confier à Rita Skeeter, mais il est vrai qu’on trouve peu de faire-valoir avec une voix aussi perçante que cette fieffée journaliste. Narcissa n'a jamais manqué de talent en stratégie.

Gythe a dû subir les quelques interrogatoires que votre fuite vous a épargnés, j’en ai peur. Votre petit manège a réveillé les suspicions chez quelques Aurors fatigués de vous savoir dehors et qui veulent s’assurer, je crois, qu’aucun de nos hommes de vous aide à se jouer du département. Nous savons vous et moi qu’Antonin n’y est pour rien et que le temps a fait son office. Il n’a heureusement jamais été sérieusement inquiété. Mais vos crapuleries commencent à vriller les nerfs de certains de mes hommes et je peine à leur en tenir rigueur tant il m’arrive, à moi aussi, de perdre patience au milieu de vos manigances. J’aimerais avoir en vous une confiance qui me permettrait de dormir quelques heures de plus la nuit et de ne pas craindre pour la vie de mes hommes chaque fois qu’ils quittent nos bureaux. Mais sont-ils plus à l’abri dedans ? L’entête de votre dernier papier tend à me confirmer que non. Une question me taraude, d'ailleurs, à ce sujet : vous êtes-vous amusé à séquestrer un pauvre imprimeur depuis le début de notre correspondance ou venez-vous vraiment chaparder des piles de documents officiels vierges aux quatre coins du monde magique dans le seul but de m’impressionner ? Vos premières réussites ont depuis longtemps rempli cet objectif, nul besoin de continuer ce petit jeu ridicule. Alors je vous en prie : épargnez vous cette peine.

Vous avez en revanche raison sur un point : je vous ai demandé Lestrange et vous me l’avez donné. Vous l’avez dit vous-même : la suite logique de cette incarcération ne me plaît guère, mais quelle légitimité aurais-je au poste qui est le mien si je ne respectais pas mes propres engagements ?

J’ai donc, comme convenu, transmis votre requête au Ministre. Mais vous imaginez bien que le climat politique actuel ne lui permet plus le luxe de prendre des risques tels que venir à la rencontre d’un de ceux qui avaient juré à Voldemort de lui apporter la tête du Survivant. Les quelques attentats dont il a été victime nous ont contraints à la plus grande prudence : que deviendrait la paix si son instigateur devait mourir sous les coups de ses détracteurs ? Toutefois, il reconnaît vos efforts et les différents rapports ayant fait mention de vos actions lors de la capture de Lestrange l’ont amené à vous accorder une faveur que, je l’espère, vous n’aurez pas la folie de refuser car je crois qu’une telle opportunité pour vous peinera à se représenter.

Puisqu’il ne peut décemment pas aller à votre rencontre, Harry Potter vous propose d’organiser un rendez-vous avec mademoiselle Hermione Jean Granger, son bras droit et sa première conseillère. Je pense que vous n’êtes pas sans savoir le lien qui unit ces deux jeunes gens depuis l’enfance et j’ose croire que vous reconnaîtrez l’effort du Ministre malgré son refus de se présenter lui-même. L’entretien se déroulera en ma présence, dans un lieu que mademoiselle Granger et moi déciderons. Il va sans dire que vous devrez vous y rendre seul et désarmé. Vous pourrez ensuite évoquer tous les sujets que vous désirerez.

Ces conditions vous conviennent-elles, Lucius ? J’admets volontiers qu’elles ne sont pas idéales pour vous, mais je vous en prie : si depuis le début de notre échange vous avez le véritable désir de vous sortir de la situation dans laquelle vous étouffez, acceptez. Nous nous connaissons depuis de nombreuses années : vous savez mes principes. Je ne cherche pas à vous piéger et je connais assez miss Granger pour vous assurer qu’elle n’essayera pas non plus de vous tromper. Ayons cette discussion que nous nous promettons depuis des mois. Cette situation périlleuse devient harassante pour nous deux. Nous pouvons y mettre un terme maintenant. Acceptez, Lucius. Vous n’avez rien à craindre.

Et puisqu’il est bon aussi de reconnaître les bonnes actions lorsqu'elles existent, je tiens à vous remercier pour votre aide on ne peut plus concrète lors de la capture de Lestrange. Malgré les nombreux reproches que j’aurais à vous faire concernant vos méthodes, je dois reconnaître que vous avez sans nul doute évité un alourdissement de nos pertes cette nuit-là. En gage de ma gratitude, j'ai joint à cette lettre les boutons de manchette qui, je crois, vous ont été confisqués il y a longtemps et qui symbolisent aujourd'hui cette drôle d'entente qui s'est tissée entre nous le jour où vous avez fait votre premier pas hors des ténèbres où vous vous êtes perdu.

Si l’on vous demande un jour comment vous les avez récupérés, dites que vous les avez trouvés sur la plage. Vous ne voudriez pas voir la divine Présidente Sorcière du Magenmagot accusée d’avoir fait disparaître une pièce à conviction, n’est-ce pas ?

J’espère que les fêtes de fin d’année vous ont été douces, malgré toutes nos inimitiés. Nous avons tous droit, parfois, à un peu de quiétude.

Prenez vite votre décision, Lucius. Je vous en prie : ne repoussez pas la main que je vous tends. Il se peut que je ne puisse jamais plus vous en offrir une autre.

Faites le bon choix.

M. »

Missive scellée d’un cachet, les boutons de manchette glissés dans un petit sac en tissu qu’elle attache à la patte du hibou, Moira fait monter l’oiseau sur son bras avant de le diriger jusqu’à sa fenêtre.
- Apporte cela à ton envoyeur, lui dit-elle d’une voix ferme. Tu tiens entre tes serres un des messages les plus importants jamais envoyés depuis la fin de cette guerre. J’espère que tu en es conscient.  
Le volatile la fixe et souffle avec un dédain évident qui fait se froncer le nez de la magistrate, mais elle ne répond pas. Poussant le panneau de sa fenêtre, elle affermit son bras pour permettre au hibou de s’y appuyer et de prendre son envol.
- Que ton voyage se passe sans encombre, maudit volaille.
Et d’un puissant coup d’ailes, le hibou s’élance dans l’obscurité des nuits d’hiver.

Retournant à son fauteuil, Moira s’y laisse tomber mollement, comme épuisée par les angoisses qui n’ont cessé de l’assaillir depuis qu’elle a reçu la lettre de Lucius. Son regard las se pose distraitement sur la bouteille d’alcool qui a accompagné son pli. Un levé de sourcil. Puis, elle fait venir un verre à elle d’un petit mouvement de baguette avant de déboucher le vieil Odgen. La liqueur coule délicatement dans le contenant et, alors qu’elle s’en empare, Moira ne peut s’empêcher de jeter un regard à la broche qu’elle tient sur sa poitrine. Pendant quelques secondes la magistrate se fige, attend une réaction. Mais l’objet ne s'illumine pas et le léger emballement qui s'est emparé du coeur de la juge se calme pour la laisser prendre une première gorgée d’alcool.

On peut décidément reprocher bien des écarts au patriarche Malefoy.
Mais pas son goût inaltérable pour les bonnes choses.

(3132 mots)

© ACIDBRAIN

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Mar 14 Jan - 9:27


IRRÉVÉRENCES
« Epistolaires échanges se font filin d'acier soutenant les mouvements désordonnés, convulsifs, erratiques d'un danseur dans les nuages. Marionnette en représentation, l'orchestrateur rit des agissements de son pantin. Qui tient la croix, qui se récrie au bout du fil ? »

Frôlements sur le vélin. Délicate alchimie d’une plume et de la blanche surface. Immaculées étendues peu à peu lacérées d’encre. C’est là qu’erre le délice de la correspondance. Une fois n’est pas coutume, l’homme a dédaigné son masque. Candélabre supporte une cire en fusion qui embrase les parois d’une chambre d’hôtel miteuse. Envolés le luxe de Poudlard. Envolés les privilèges, le temps d’une soirée. Dans quelques jours, une année de plus s’ajoutera au compteur des ans empesantissant ses épaules. Dans mois d’une semaine, l’homme clôturera sa cinquantième année. Un demi siècle. Un joug. La moitié de son existence pour peu qu’il parvienne au centenaire. Encore jeune, déjà vieux. La carcasse se ploie sous la charge. Et pour méditer, seul, sur les égarements de sa vie, l’homme s’est échappé un temps sur les côtes irlandaises. Il a regagné en catimini ce petit village où la vieille Abaigh l’attendait, les phalanges occupées à l’ouvrage jusqu’au jour tombant. Il a remonté avec elle les plages désertes et s’est installé dans sa pension le temps d’une nuit. Ils ont fait la conversation jusqu’à ce que le pâle astre lunaire ne clamse sous l’assaut des nuages. Silence ponctué de trop rares mots, pesés, ciselés, offerts. Et dans les ténèbres repoussées par une seule chandelle, il prend la plume pour répondre au pli reçu la veille. Frissons.

Très chère Moira,

Je crains que de tous côtés, mes jours ne soient comptés. Bientôt, sans doute, vous entendrez parler de mon logis actuel, et tout aussitôt, vous ne manquerez sans doute pas de prendre les mesures adéquates. J’aurais aimé saluer les talents de chasseurs de vos équipes qui, sur le fil jour après jour, traquent sans relâche l’ennemi publique numéro un, mais je crains que cette infortunée situation ne soit à imputer qu’aux seules circonstances du temps présent et à la suspicion grandissante de ceux auprès desquels je demeure. Un jour, peut-être, nous retrouverons nous autour d’un verre que je vous conte de vive voix ces périples. Mais pour l’heure, il faut écrire.

Je ne suis pas surpris que vous vous teniez au fait des mondanités de ma chère épouse. En d’autres temps, je vous aurais volontiers invité, mais l’un de vos collaborateurs, Monsieur Fjalarsson a eu tôt fait de s’inviter lui-même et de semer le trouble parmi les partisans de ma compagne. Ne vous l’a-t-il pas dit ? Il faut avouer que la rencontre fut musclée. Sitôt qu’on l’eût identifié comme représentant des forces de l’ordre, il fut prié de quitter les lieux. La façon dont il obtînt une invitation lui permettant seulement d’être présent demeura longuement, pour moi, un mystère des plus insolubles jusqu’à ce que j’apprenne que cet énigmatique personnage est aussi l’un des créateurs de runes les plus réputé du territoire. Je suppose que cela explique de beaucoup l’intérêt qu’a pu lui porter Garrick Ollivander, si prompt à le convier à nos festivités.

Vous devriez sommeiller de temps à autre, Moira. Vous sembliez fatiguée la dernière fois que nous nous sommes croisés. Quoi que je vous ai abondamment menacée dans nos premières missives, pensez-vous qu’il serait dans mon intérêt d’amorcer une tuerie de masse à l’heure où nous parlons ? J’ai beau être une crapule, comme vous le soulignez, je n’en restais pas moins aussi, jusqu’à ce que j’en sois déchu, Lord Malefoy. Il y a un pas entre le vulgaire boucher et l’intrigant. Dormez tranquille, je puis vous assurer que si l’un des vôtres se fait assassiner dans son sommeil, cela n’aura été ni directement, ni indirectement de mon fait. Le meurtre est d’un vulgaire. Quant à votre question, je me sens enclin à vous y répondre : point d’imprimeur séquestré, seulement un bureau extrêmement mal gardé. Celui des stocks situé au quatrième étage du Ministère. Je n’ai jamais posé un orteil dans l’un de vos bureaux quoi que j’aurais sans doute pu essayer. Il se trouve que la dernière grande Bataille a laissé sur moi un maléfice des plus déplaisants qui menace ma santé, toutefois, le revers d’un tel enchantement est aussi d’altérer ma signature magique en la rendant instable. Vous ne pourrez me traquer avec elle, et une partie conséquente des enchantements de protection n’ont plus d’effet. J’ai savamment gardé cette information jusqu’à présent, de crainte que des informations extérieures ne vous permettent un recoupement et une identification de ma personne… Mais ce n’est plus très important désormais. La gravité de ma situation semble n’avoir que trop duré.

Je pourrais m’offusquer que vous me proposiez une rencontre avec une subalterne, fût-elle aussi aussi haut placée que Miss Granger, mais le temps m’est compté et je crains de n’avoir d’autre choix que d’accepter votre proposition. Espérons seulement que la jeunesse de mon interlocutrice ne causera aucun encombre dans les discussion… Vous eussiez été un bien meilleur choix de négociatrice, si je puis me permettre. Miss Granger est sans nul doute brillante, mais que vaut-elle dans ce genre de situation ? Je gage que vous et moi le découvrirons très bientôt.

Je vous remercie pour les boutons de manchette. Ils sont plus que vous ne pouvez le croire. Ils m’ont été transmis par mon père et veulent dire beaucoup, aujourd’hui. Ce n’est pas seulement un héritage ou un de ces fils ténus que l’on entretient avec le passé par coutume ou par lassitude des heures présentes. C’est aussi, peut-être, l’un des derniers espoirs que peut caresser un mourant.

Donnez moi le jour, l’heure, le lieu.
Je serai là si vous ne tardez pas trop.

Bien à vous,

Lucius Abraxas Malefoy.



Le parchemin est roulé, expédié. Paumes tremblent, encloses sur quelque artefacts de métal précieux. Armoiries frottent sur l’âpreté d’une peau tremblante. Dans la pénombre vacillant où les ombres grignotent les murs et les cieux, le patriarche Malefoy s’autorise pour la première fois depuis des décennies à n’être qu’homme. Un cristal roule sur sa face, se délite dans les ténèbres.


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Moira A. Oaks

Moira A. Oaks
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Jeu 19 Mar - 11:18





18 janvier 2004

Ainsi donc, cela allait finir.
Après des semaines d’échanges, de craintes et de paris dangereux, @Lucius A. Malefoy acceptait de la rencontrer. Voir leur jeu prendre brutalement fin est une sensation étrange pour Moira, comme une joie emplie de fierté qui ne peut se défaire d’un certain regret. L’adrénaline d’être au bord de la brèche a quelque chose d’addictif. Mais une telle situation ne pouvait pas durer plus longtemps.

Alors qu’elle sort une feuille de parchemin et prépare sa plume pour lui répondre, Moira ne peut s’empêcher de se répéter certains des mots qu’elle vient de lire. Voilà des semaines qu’elle sait que la situation de Malefoy lui pèse et qu’il semble souffrir de graves problèmes de santé. Mais le ton de cette lettre est différent, plus inquiétant. Lucius semble craindre d’être découvert à tout moment et le mal qui le ronge paraît devenir intolérable. Tous deux doivent se voir et rapidement.

C’est après une dernière entrevue avec @H. Jean Granger que la date a été fixée, comme le lieu. Aucun d’eux n’a évoqué la préparation d’un quelconque traquenard. Moira ne l’aurait de toute manière pas permis. Elle espère simplement que @Harry J. Potter et sa conseillère n’auront pas préparé quelque chose dans son dos sachant qu’elle refuserait catégoriquement d’y prendre part.

Un soupir plein d’appréhension lui échappe alors qu’elle couche ses premières lignes sur le parchemin. Elle espère, comme depuis des mois, prendre encore les bonnes décisions.

« Cher Lucius,

votre situation devenant visiblement périlleuse, je vous propose de nous hâter. J’ai demandé que notre entrevue puisse se faire le plus tôt possible.

Aussi, je vous propose de nous retrouver dans un lieu où nous nous sommes déjà rencontrés par le passé et où vous avez su vous montrer digne de confiance. J’espère que les falaises de Walcott vous inspireront de la même manière dans quelques semaines. Retrouvez-moi le 15 février, à 23 heures, dans la crique où nous avions donné rendez-vous à Lestrange en novembre. J’y serai avec Granger.

Ne faites pas de ce lieu celui de ma perte comme il a failli le devenir pour Kingsley. Je vous jure qu’il ne sera alors pas celui de la vôtre.

Faites attention à vous, Lucius. Puisque les menaces semblent se presser autour de vous, il me faut malheureusement vous prévenir : si les aurors devaient finalement parvenir à mettre la main sur vous, je crains d’être incapable de vous préserver de la vindicte populaire et d’un procès sans clémence. Vos talents ont réussi à vous faire éviter leurs filets jusque-là. Veillez à ce que cela perdure quelques semaines encore, sans quoi tous nos efforts seront malheureusement vains.

Prenez soin de vous.

Moira.»

Le parchemin est scellé, roulé, et alors que la juge s'approche une nouvelle fois du hibou envoyé par Malefoy, elle a l'étrange sensation que son pli sera le dernier qu'elle lui enverra. Ses gestes sont plus lents quand elle attache la précieuse missive à la patte du volatile. Même l'oiseau semble avoir un air plus grave qu'à l'accoutumée, être conscient qu'un moment solennel se passe à l'instant même où Moira lui présente son bras pour le guider jusqu'à sa fenêtre. Délicatement, il entoure de ses serres les fines mailles du pull de la magistrate et se laisse porter. Il ne fait pas un bruit, s'ébroue à peine quand elle ouvre la fenêtre. Mais, alors qu'elle passe son bras dehors pour lui permettre de s'envoler, il vient croiser un instant les yeux bleus de la Présidente-Sorcière. Est-ce un adieu qu'il lui fait ? Alors que ses larges ailes s'agitent et qu'il s'élance dans l'air glacial de Londres, Moira l'aurait juré.


Fin du RP


(602 mots)

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