La nuit est déjà tombée depuis plus d’une heure quand Moira s’enfonce dans les ruelles étonnamment vides de Pré-au-Lard. Les portes ouvertes de Poudlard auraient dû les remplir de monde aujourd’hui, faire se retrouver les centaines d’anciens élèves rassemblés pour l’occasion, enfin débarrassés de leur marmaille et impatients de s’adonner à quelques joyeusetés moins prudes que les jus de citrouilles servis toute la journée dans le château. Mais il n’en est rien. La bourgade est effroyablement calme, comme abasourdie par les nouvelles venues de Poudlard. On raconte qu’un dragon ensorcelé à incendié les jardins et grièvement blessé une élève. La fête a tourné court, et les esprits se sont assombris.
Les rares âmes que l’on croise dans les rues de Pré-au-Lard ont une démarche raide, les yeux hagards, sur un qui-vive permanent depuis qu’ils se sont laissé surprendre dans l’enceinte « inviolable » de l’école. L’inquiétude ambiante glisse des trémolos lugubres dans les voix des passants. Tout le monde s’observe, s’écoute, se méfie. Le danger semble partout depuis qu’il a frappé à l’endroit le plus impensable. Chaque ombre semble dissimuler les fantômes d’affrontements enterrés trop vite. Les sorciers n’aspirent plus qu’à la paix, dit-on. Mais la guerre n’a jamais semblé si proche depuis la fin du Seigneur des Ténèbres.
Ses deux mains enfoncées dans les poches de son trench dont elle a relevé le col pour se protéger du vent, Moira s’avance d’un pas soutenu dans l’artère principale du village. Elle n’a pas remis la main sur son écharpe blanche égarée dans les jardins quand elle a accouru pour rejoindre Meadow Quinn. La vision de ses mains dévorées par l’or pur lui reste en mémoire comme une image indélébile. Elle déglutit, mais le goût infâme qu’elle a dans la bouche ne passe pas : un goût de colère, d’injustice et de peur… Elle ne l’avait pas senti si prégnant depuis des années.
Sa main droite joue avec le bois de sa baguette dans la poche de son imperméable, geste distrait et pourtant si révélateur… La Présidente-Sorcière est sur ses gardes, inquiète bien qu’elle ne se pense pas encore au cœur de la menace qui s’est dessinée aujourd’hui. Si l’attaque devait la viser elle, son ennemi n’aurait sans doute eu aucun mal à l’atteindre. Elle n’avait pas été tant à découvert depuis longtemps. Les protections de Severus ne sont pas parvenues à protéger le Ministre. En quoi l’auraient-elles mieux protégée, elle ? Mais la cible n’était pas plantée dans son dos, elle en est sûre. « Pas encore », murmure une voix railleuse à son oreille…
Depuis des heures, la magistrate décortique les images imprimées dans son esprit, retourne ses maigres connaissances dans tous les sens pour tenter de comprendre ce qui a justifié un acte aussi odieux. Mais plus elle y réfléchit et plus le dessein lui semble politique. L’attentat d’aujourd’hui n’était pas qu’une simple attaque à l’encontre de Harry Potter. Faire de Poudlard son théâtre est un symbole terrible, capable de susciter les pires angoisses auprès des familles, qu’elles soient de sang-pur ou d’origines moldues. L’école n’a pas su protéger ses enfants. Le Ministère a été tenu en échec. Les professeurs ont failli à leur devoir. Qui peut se targuer d’être hors d’atteinte quand un lieu si bien gardé que celui-là voit ses défenses si aisément percées un jour comme aujourd’hui ? Le directeur doit s’attendre aux pires remontrances dans les jours à venir, comme tous les sorciers censés garantir la sécurité des invités. Mais les conséquences risquent d’aller bien au-delà d’un simple scandale. Car chaque faille du Ministère ainsi dévoilée renforce l’aura de ses détracteurs et Moira n’a aucun doute sur les discours qui tourneront en boucle ces prochaines semaines, ni sur le timbre de voix qui les prononcera. @Narcissa Black-Malefoy ne peut laisser passer une opportunité pareille et la juge ne fait pas l’erreur de sous-estimer ses talents de stratèges. On n’éclipse pas si vite les hommes des familles de sang-pur sans une remarquable intelligence politique. Quant à ses talents d’oratrice, toute la Grande Bretagne a déjà goûté au moins une fois au coupant de ses répliques. De là à penser que Lady Malefoy est impliquée dans cette monstrueuse entreprise, il n’y a qu’un pas que la juge s’interdit encore de franchir. Mais la tentation est bien plus grande concernant son pendard de mari…
Il faut quelques secondes à la juge pour réaliser qu’elle s’approche déjà de l’Auberge des Trois Balais. Ses yeux clignent plusieurs fois quand elle remarque la plaque si reconnaissable de son repaire d’adolescente. Un sourire nostalgique passe un instant sur ses lèvres alors qu’elle pousse la porte qui grince sur ses gonds avec le même son qu’elle le faisait vingt-cinq ans plus tôt. A l’intérieur, les odeurs flattent sa mémoire, relents sucrés des bièraubeurres partagées l’après-midi pendant ces quartiers libres si prisés des élèves de Poudlard. L’atmosphère des lieux est cependant bien différente aujourd’hui, habitée par quelques rares groupes d’anciens qui ont tenu à échanger quelques mots malgré les derniers événements. On parle bas autour des tables. Les éclats de rire puérils ont laissé place aux marmonnements trop graves et les regards mauvais s’attardent sur les derniers arrivés comme s’il pouvait s’agir d’intrus. Plusieurs sorciers se tournent vers Moira alors qu’elle entre et s’installe à une table en retrait près d’une fenêtre. Elle ne croit pas connaître les quelques visages qu’elle distingue aux quatre coins du bar. Mais même madame Rosmerta, autrefois si chaleureuse, semble enfermée dans un attentisme circonspect, comme si une catastrophe pouvait survenir à tout moment. Moira fait mine de ne rien remarquer mais sa main reste subtilement arrimée à sa baguette toujours dissimulée dans sa poche. Les aiguilles de l’horloge indiquent dix-neuf heures passées. Camille ne devrait plus tarder.
Vilenie bâfrait faîte du monde. Agonie brisée en ses entrailles. Valetaille rudoyée à leurs pénates. Les suppôts du préjudice épanchaient doucement la terre d’une pouacre vomissure. Besaigre, elle rongeait l’impunité dans laquelle se cuidaient assurés les fanfarons. Liquoreuse amertume. Probante délectation.
L’ombre d’une bête noire remuait la bonace ambiante. Les artères du domaine ondulaient d’inquiétude. Ils avaient tous les foies. (1) Suintait de leur viande une mouillure d’agitation, et de leur avaloir une becquée de clabauderie. Un nœud d’appréhension. Ça cacardait des médisances. Les tripailles ourdies, les quinquets arguaient quiconque d’impie.
Critique devant cette cuillère de diatribes, Nott se dissolvait dans l’houache des pantins. La mandibule étoffée par l’encolure de son pardessus en laine bleu royal, le mangemort échu glanait les on-dit entre deux margoulettes. Dragon, guet-apens, magie noire frémissaient à la surface.
Le méchef de cette après-midi avait quelque peu dodeliné les jugeotes. Chacun s’incriminait. Couardise infusait dans leur esprit. Une affectivité épidémique qui se vulgarisait comme de la fumée de poudre. Ces badauds appréciaient d’une esgourde chatouilleuse les racontars.
Sacro-sainte, cuirassée contre toute offensive, l’école avait pourtant trahi une écornure. Inattaquable ? Dumbledore pouvait labourer sa tombe pour ses boniments. L’abandon de ses grimauds disloqués, comme leur confiance et celle de leurs parents. Rictus satirique. Le bélître se gondolait avec son gausserie. Un rondelet gratin de mangemorts révolus dans le personnel, dont l’un d’eux n’était nul autre que la cellule mère de Poudlard, avec une tribulation attentatoire dans l’enceinte promise impénétrable. Cocktail suffisamment efficient pour insuffler un mouvement de bastringue.
Mandorles incisives, tutélaires du moindre simulacre dans son horizon. L’inquiétude qu’il avait éventée des prunelles de son amie @Moira A. Oaks un peu plus tôt le remuait. Contour sourcilleux grignotait encore délicat minois. Inondant l’auberge des Trois Balais d’une pudique assiduité, Camille avisait la jeune femme d’un œil mesuré. Une congestion dissonante lestait d’une astreignante pesanteur l’endroit. Le fantoche de quelques pâmoisons en perspective.
Exhorté sur le flanc gauche de sa frangine de cœur, les phalanges flattaient quelques épis mordorés après un amiteux bécot sur son front. Fastueux dargeot consolidé sur sellette. L’œil caverneux.
« Eh bien…L’ambiance est quelque peu tendue après la mésaventure de cette après-midi … »
D’un signe de main, il fléchissait Dame Rosmerta dans leur azimut. S’ébrouait sur sa binette récalcitrante une nuance d’appréhension.
« Une bièreaubeurre pour moi, et toi Moira ? »
Une fois la commande moulée et la dérobade de leur hôtesse, les prunelles indigo engloutissaient leurs jumelles avec grièveté. Les coudes arc-boutées sur le bois, les phalanges s’acoquinaient, la ganache appesantie dessus.
« Dis-moi ce qui te tracasse. Tu semblais avoir une inquiétude bien précise toute à l’heure, et je la devine toujours dans ton regard »
Les murmures ambiants ont repris, toujours trop graves, toujours tremblants. L’inquiétude imprègne l’air à en suinter des murs. Les regards sont trop appuyés, puis trop fuyants dès qu’on les croise. Les soupçons semblent se porter sur quiconque a la folie de respirer. La peur distille son venin dans les esprits même les plus sereins. On ne s’attendait pas à voir madame Rosmerta si préoccupée, entourée de ce demi-silence qu’aucune chope de bièraubeurre ne parvient à égayer. L’auberge des Trois Balais n’a jamais semblé si triste depuis les pires heures de la guerre.
Assise à sa table, le regard posé sur la rue déserte qu’elle voit à travers sa fenêtre, Moira soupire, perdue dans ses pensées. Les pulsations de son cœur se sont déjà doucement accélérées à savoir @Camille Nott si proche de la rejoindre, car elle sait ce qu’elle s’apprête à lui dire et ses dernières hésitations ne cessent de hurler dans son crâne, incitant à la prudence, demandant encore du temps avant de prendre sa décision. Du temps. Du temps. Elle a l’impression d’en manquer depuis des années et plus encore ces derniers mois depuis que les attentats ne cessent de se multiplier.
Le contact d’une main sur son épaule la fait légèrement sursauter avant qu’elle ne reconnaisse Camille et un sourire rassuré se glisse sur ses lèvres alors qu’il s’abaisse pour lui embrasser le front. Sa présence la rassérène immédiatement malgré le dilemme qui la poursuit. Elle en oublierait presque la raison de sa venue, ces confidences dont elle veut faire de lui le premier gardien. Sa remarque trouble la quiétude anxieuse des lieux et Moira souffle alors d’une voix légèrement fatiguée : - On ne peut pas leur en vouloir. Mais je t’avoue que j’espérais retrouver les Trois Balais dans de meilleures conditions…
Camille fait signe à madame Rosmerta et la magistrate tente de retrouver un peu d’entrain. - La même chose pour moi. Je n’en ai pas bu depuis des années et je crois qu’un peu de nostalgie me ferait du bien. La tenancière s’éloigne et un silence étrange se met à planer quelques secondes entre eux alors que Nott s’installe. Les pensées de la juge ne cessent de s’entrechoquer dans sa tête, embrasent ses réticences, excitent ses hésitations. Elle voudrait que son choix soit simple, clair et inattaquable. Mais les risques sont là. Et pas seulement pour elle.
Car elle sait que la connaissance conduit à de nouvelles menaces. Dévoiler sa correspondance avec @Lucius A. Malefoy à Camille fera de lui une cible autant qu’un nouveau danger pour elle et seule la confiance inébranlable qu’elle lui voue parvient à lui faire ne serait-ce qu’envisager de tout lui avouer. Rien n’est plus douloureux que l’impression de desservir un ami, mais la sensation se fait pire encore quand on considère les années entières qu’il a fallu à l’ancien mangemort pour retrouver un semblant de stabilité. Camille a retrouvé un emploi stable. Les secrets de son passé aux ordres de Voldemort semblent encore intacts. Son amitié avec @Archibald Rosier lui permet de conserver un appui solide sur lequel compter. Pourtant, Moira n’est pas dupe : elle sait les démons qui grondent encore dans le sillage de son frère. Elle surprend encore ses regards perdus aux nuances trop sombres. Elle sait pour les bouteilles d’alcool qui se vident trop vite dans ses appartements. Elle connait les souvenirs qui continuent de le hanter. Fait-elle bien d’y ajouter les siens ? D’ajouter à ses peines ses propres craintes dont elle pourrait absolument l’épargner ? L’incertitude glisse un soupir ténu entre ses lèvres alors que Camille l’invite à tout lui dire. La magistrate baisse un instant les yeux. Son cœur bat trop vite dans ses tempes. Elle se sent démunie depuis que ses yeux ont croisé ceux du monstre qui s’est attaqué à Poudlard, incapable de savoir quelle réaction adopter. Les faits qui lui claquent à la figure ne cessent de contredire ses instincts. Elle ne sait plus qui croire, ni quoi penser. Elle a besoin de conseil, d’un point de vue extérieur qui l’aide à tout organiser dans sa tête.
Elle prend une grande inspiration avant d’oser recroiser le regard de Camille et sa voix s’abaisse pour qu’aucune autre table ne puisse entendre ce qu’elle s’apprête à lui confier. - J’ai senti quelque chose tout à l’heure à Poudlard… Comme un instinct. Une intuition. Je n’ai aucune preuve mais n’arrive pas à me l’enlever de l’esprit. Parce que je sais d’où elle vient. Elle s’arrête, renâcle une dernière fois devant l’obstacle que sa raison hésite encore à franchir. Il lui faut forcer sur sa voix pour réussir à prononcer les quelques mots qui suivent. - Ce que je m’apprête à te dire pourrait me coûter ma carrière… Un aveu douloureux. Une arme létale qu’elle s’apprête à lui offrir. Peut-être est-ce pourquoi elle l’a choisi lui, pourquoi, de tous ses amis, c’est vers lui qu’elle se tourne pour se libérer d’un tel poids. Car Camille dispose depuis la fin de la guerre d’un poignard qui pourrait la détruire d’une seule estocade s’il lui venait l’idée de l’utiliser contre elle : elle lui a évité la prison. Parmi tous les mangemorts qui ont risqué d’être traînés en justice, il est le seul qu’elle a couvert pour lui éviter la prison, le seul pour qui elle a violé les lois qu’elle a juré de défendre et de faire appliquer. Ce savoir pourrait la briser s’il venait à être dévoilé. Alors que représente une arme de plus quand la première peut déjà lui être fatale ?
Les mains de Moira se rejoignent sur la table, entrecroisent leurs phalanges pour s’éviter de trembler. La juge ne quitte plus les yeux de Camille. Et sa voix demeure toujours basse, si basse qu’elle en est difficile à déchiffrer. - J’ai été contactée il y a quelques semaines. Une lettre apportée par hibou directement à mon bureau. Elle n’était pas piégée. Pas ensorcelée. Ce n’était qu’un mot arrivé sans prévenir, en plein mois d’octobre. Mais il était signé. Une inspiration avant de lâcher dans un soupir. - « Lucius Abraxas Malefoy ». Elle laisse quelques secondes à Camille, consciente du coup que représente la nouvelle, avant de reprendre. - Nous nous écrivons depuis plusieurs semaines. Personne ne le sait à part toi. Et je ne suis pas certaine que Malefoy ait beaucoup disséminé cette information autour de lui non plus au vu de ce qu’il tente d’obtenir… Je ne sais pas exactement ce qu’il cherche encore, mais je pense pouvoir dire que peu de ses anciens frères d’arme apprécieraient. Je crois qu’il tente de se négocier une porte de sortie. Il court dans toute l’Europe depuis cinq ans maintenant et j’ai l’impression qu’il sait que sa vie de fugitif ne pourra pas durer beaucoup plus longtemps. Est-ce qu’il sent que nous nous rapprochons ? Ou est-ce lui qui ne supporte plus cette vie et souhaite y mettre un terme d’une manière ou d’une autre ? Je ne saurais dire. Mais je sais aussi qu’il pourrait tout aussi bien n’être entré en contact avec moi que pour s’octroyer une nouvelle fenêtre de tir : il pourrait tenter d’approcher les hautes sphères du Ministère à travers moi. Et quand je te parle de hautes sphères, je te parle des plus hautes sphères. Potter.
Elle respire quelques secondes et profite de la diversion offerte par le retour de Rosmerta pour réorganiser ses idées. Sans plus d’attentions que la courtoisie de rigueur, elle remercie la tenancière et prend une grande gorgée de bièraubeurre qui ne parvient cependant pas à lui apporter le réconfort qu’elle espérait. Elle attend que la dame reparte avant de reprendre le fil de ses pensées. - J’ai hésité longtemps avant de lui répondre. Je t’assure que j’ai hésité. Mais je crois que cette rivalité qu’il y a toujours eu entre nous m’a forcée à lui laisser une prise, à voir ce qu’il cherchait à obtenir. Et ce que nous pourrions gagner en échange. Il y a toujours eu… comme une estime entre nous qui m’empêche de penser qu’il ne m’a choisie que pour me nuire. Elle respire encore, consciente que sa croyance peut résonner comme la pire des naïvetés. Sa voix se fait plus grave encore quand elle avoue d’une voix tremblante pour ne pas être remarquée : - Je crois que j’ai confiance en lui… Et c’est bien cette confiance qui la blesse depuis que la petite Meadow Quinn s’est retrouvée dans ses bras. La juge grimace, détournant le regard un instant alors que l’image de ses mains décharnées lui revient en mémoire. Elle reprend une gorgée de sa boisson pour faire passer l’amertume qui tapisse sa langue et gronde en fixant la rue déserte de l’autre côté de la fenêtre. - Mais je sais aussi ce dont il est capable. Son regard revient plonger dans celui de son frère. - Le sortilège d’Imperium fait partie de ses obscures spécialités depuis des années. Je le sais. Et toi encore mieux que moi. Tu sais la stabilité de ses sorts et le peu de résistance qu’ils suscitent de la part de ses victimes. Tu sais celui qu’a subi la jeune Meadow Quinn. C’est toi qui l’en as libérée. Elle se penche légèrement plus avant, les coudes toujours vissés sur la table. - J’ai regardé dans mon miroir à l’ennemi à l’instant où j’y ai pensé. J’ai eu un instinct, si fort… je ne peux pas te l’expliquer. Mais il n’est pas apparu. Malefoy n’était pas là. Puis, elle libère un long soupir, et passe une main sur son front en concluant : - Je ne sais pas quoi faire, Camille. Je ne sais plus quoi penser. Cette correspondance avec Malefoy est dangereuse mais je sens… je sais que je peux en tirer quelque chose. Je le sais. Et pourtant j’ai l’impression que tout m’échappe. J’ai peur de me faire flouer et de faire seulement gagner du temps à celui que je traque depuis trois ans. Je ne sais pas ce que je devrais faire. Je ne sais pas, Camille. Je suis complètement perdue…
Tressautement de fluettes épaulettes. Témoignage d’un qui-vive pantelant. La mandibule roidie dépeignait des commissures échancrées par une émotion patente. Son affectueuse Moira, qu’il appréciait comme une sœur, accusait d’un branle-bas évident. Les indigos parés d’une batiste d’instance, il l’aunait avec circonspection. Laps s’étaient dilapidés dans l’abîme depuis l’âge ingrat. Il connaissait maintenant assez bien la jeune femme pour dessiller la pesanteur de ses prospectives confidences. Une ombre l’habitait.
« J’avoue qu’un brin de nostalgie adoucirait le climat. Santé ! » La pinte asservie d’une poignée de phalanges, Nott flattait ses papilles d’une goulée pondérée.
Paupières cintrées, l’éclat de ses amandes accusait d’une amène insistance. Quel démon pétrissait avec autant d’animosité son accalmie ? Il reniflait la criarde effluence d’une Babel.
Béotisme ambiant. Nulle joyeuseté ne bleuissait son articulation. Si ses confessions pouvaient peser l’avenir de sa carrière, elles étaient loin d’être dédaignables. Moira n’imprégnait pas ce ‘genre’ de pierrot à épaissir quelconque bruit pour encourir l’appétence de la collectivité. L’échine s’ankylosait sous l’agression de l’inquiétude tandis que s’ourdissaient dans un disgracieux anticlinal ses sourcils, témoins d’un émoi.
Labres se rédimaient d’un souffle presque inaudible. Un chuchotement réprimé. Un nom s’en fourvoyait. Un patronyme retentissant qui résonnait dans son bobéchon comme un avertissement. Lucius Abraxas Malefoy. Altière pègre trempée dans ce qu’il semblait être une indéfectible facétie. Seing qui lui était exclusif.
Camille déterminait proprement la retombée de ses révélations. Impératif d’empiéter les contours du rocambolesque. Son amie, la présidente du mangenmagot, palabrait avec un mangemort non blanchoyé ? D’autant plus lorsqu’il se nommait Malefoy. Un blason qui vibrait comme un frisson mésavenant pour les masses laborieuses. Une incisive confuse se noyait dans les prunelles de la jeune femme, égaré dans une mathématique onduleuse. Qui serait-il pour la juger ? Lui, le putrescible. Lui, qui s’avilissait dans la calomnie et la fange pour extorquer le moindre apanage. Le Judas. Dilapider son amour-propre en pliant sous le carcan du Lord avait été l’honteuse avanie. Tremper son dévouement dans le même cloaque. Populeuses avaient été les occurrences où il s’était honni. Et pourtant, il avait toujours pris soin de préserver sa probité à l’égard ses siens. Remy, Archibald et Moira l’avait maintenu en vie. Ses pilastres de pérennité.
Suppurante confusion.
Camille concaténait proprement les informations butinées dans un réceptacle mental. Chacune d’elles était d’émondée avec acribie. Ce cher @Lucius A. Malefoy appétait ‘généralement’, pour ne pas dire toujours, les Hommes d’hégémonie pour sustenter leurs égards. Dégorgeoir de finasserie. Leur acoquinement par le passé n’avait jamais affaibli sa vigilance. C’était un maître gonin. Son nom pépiait comme une comminatoire villanelle. ‘Qu’est-ce qu’il ne ferait pas pour sauver sa croupe’ pensait-il à prime abord. L’esquisse d’un premier jugement. Primesautier. ‘Typiquement Malefoy ?’
Mutisme écrasant. Le mangemort gracié s’égarait dans ses arguties.
L’articulation de son atermoiement avec le méchef qu’avait purgé la petite Meadow avait dégourdi quelques apostrophes dans l’igue de ses propres limbes. Curiosité qu’était celle de penser au professeur Wilson. ‘Les odeurs ne mentent pas’ ressassait-il. L’amerloque ruisselait d’une fragrance semblable à celle du paon d’argent, si ce n’était le glissement d’un nuage de cannelle le bouquet de lys blanc qui flattait sa charogne. L’omniprésence d’une inconnue. Nébuleuse équation.
« Je comprends ton trouble Moira »
Le silence s’effondrait dans une chuchoterie. Mandibule trahie par un flottant soupir.
« Qui ne le serait pas ? Tu es sujette à de notables responsabilités dans ton métier. Cette simple correspondance pourrait contester toutes tes décisions par le passé, et le crédit par lequel tu les soulignais. Ton appréhension est tout ce qu’il y a de plus normal. Finalement, c’est ce qui fait de toi une personne ‘juste’ et ‘vigilante’ ? Tu ne dois pas en douter »
La cannelure de son gosier ruginée par un râle contenu, Camille tatillonnait ses considérations avec prud’hommie.
« Je ne vais pas te cacher ma méfiance à l’égard de Malefoy. Est-ce le fruit de ma personnalité continuellement en alerte ? Peut-être bien. Néanmoins, une chose sur laquelle je peux m’avancer est son immarcescible instinct de survie. Il n’est plus qu’homme déchu. Qu’aurait-il à perdre à tenter une approche auprès de toi ? Malefoy est bien des choses mais j’ai bien l’impression qu’il essaie d’éviter sa propre submersion. Il est loin d’être brèle. Il ne m’étonnerait même pas de le voir se couper les cheveux à la demande de Potter pour obtenir ses bonnes grâces et redorer son existence »
Carcasse de persiflage, sans doute intempestif.
Ses phalanges mignotaient les poignets de son amie, l’air songeur.
« Je respecte cet homme autant que je le soupçonne. Pour le moment, tu es sa roue de secours. J’aurais envie de dire…jusqu’à quand ? Je ne doute pas qu’il puisse te glisser ce que tu auras envie d’entendre. Il est tout à fait capable de poignarder son meilleur ami dans le dos, si tenté qu’il en ait un…ami ? Je rectifie. Malefoy a des intérêts, pas des amis. »
L’intervalle d’un piétinement pour soulager ses papilles boucanées. Il imaginait parfaitement le chienlit mental dans lequel elle devait s’atterrer. Il était tellement plus accommodant de ne pas faire du lard avec des responsabilités.
« Donc je te recommande la prudence Moira. Faire confiance à un Malefoy ressort du rocambolesque mais je pense en toute sincérité que pour le moment, tu peux t’y soumettre. C’est un homme sagace mais dangereux… Pour dire platement, il veut sauver ses miches et semble prêt à tout pour y parvenir. Il donnerait son âme au diable, si tel n’est pas déjà le cas. »
Si tel n’était pas le cas.
L’exigence d’alléguer son esprit imbibé d’un pyrrhonisme accablant piquetait ses commissures. Il devait en parler. L'échine courbée vers son amie,les syllabes molletonnées, il asseyait une gestuelle prudhomme.
« J’ai eu cette même intuition…mais pas dans ce contexte…As-tu entendu parler du nouveau professeur de sortilèges ? Ernest Wilson. Un américain échoué sur nos terres. Il possède une étrange ressemblance avec Malefoy. Pour te dire honnêtement, je m’en méfie. Certes, bien des gens se recoupent dans des contours similaires. Il y a ce quelque chose qui flotte autour de lui…cette même fragrance…ses manières déguisées…Je ne sais pas mais je ne le sens pas. Saurais-tu quelque chose là-dessus ? T’a-t-il parlé de ses activités dans le simulacre de sa prétendue cavalcade ? »
Le faquin se rongeait d’une égrillarde curiosité depuis son babillage avec Wilson dans le contre-jour matutinal de la tour d’astronomie.
Le tintement sec des chopes sur le bois est plus ténu qu’à l’accoutumée. Chaque geste semble maîtrisé, réfléchi, pensé pour faire le moins de bruit possible et ne surtout pas perdre une miette de ce qui se dit à la table d’à côté. Quiconque s’est vu un jour familier de l’ambiance des Trois Balais saurait dire que l’atmosphère ce soir est d’une lourdeur comme l’auberge en a rarement connu. Moira boit une grande lampée de bièraubeurre pour faire passer l’amertume qui lui tapisse la bouche. Leur table est assez isolée pour s’éviter les oreilles indiscrète des quelques soiffards venus comme eux oublier les événements tragiques de la journée. De quoi permettre des confidences que la magistrate n’en peut plus de retarder.
Son inquiétude filtre dans son timbre alors qu’elle avoue, phrase après phrase, le jeu dangereux auquel elle s’adonne depuis qu’un oiseau est venu porter un dangereux message à sa fenêtre. @Camille Nott écoute sans jamais l’interrompre, assemble dans son esprit toutes les pièces d’un puzzle qu’elle lui donne phrase après phrase. La difficulté des premiers mots s’évanouit avec les suivants, le premier secret éventé montrant le chemin aux autres jusqu’à ce que toutes ses craintes soient confiées à son frère de cœur. Les sourcils du professeur se froncent un instant alors qu’il semble à son tour se perdre dans ses pensées, et Moira le laisse faire, lui donne tout le temps dont il a besoin pour retrouver l’usage de la parole. Elle sait tout ce qui rendrait naturellement Camille plus à même de juger des intentions de @Lucius A. Malefoy qu’elle. Tous deux ont combattu, trompé, comploté ensemble pendant de nombreuses années, un avec bien plus de sincérité que l’autre. Camille a dû voir plus d’ombres chez le patriarche Malefoy qu’elle n’en a jamais soupçonné. Et pourtant, une part d’elle espère qu’il ne lui donne pas un portait de lui trop sombre, comme si elle espérait plus que tout avoir raison de croire en un désir de rédemption chez son lointain rival.
Les mots de l’ancien mangemort sont aussi pleins de méfiance qu’elle s’y attendait. Moira boit de nouveau tout en l’écoutant, sans le couper à son tour, avide de ces conseils qu’elle n’osait pas venir chercher depuis des semaines. Ses quelques tentatives pour la rassurer adoucissent légèrement l’anxiété de la juge, mais pas assez pour ralentir les pulsations saccadées de son cœur. Alors qu’il achève de lui conter ses réticences, Moira soupire, amenant une main à son front. Elle souffle en réponse, d’un ton toujours aussi bas : - Je sais… Je sais que tout cela paraît insensé. Et je n’ai pas la bêtise de croire qu’il vienne pour autre chose que pour sauver sa peau. Mais je vois dans son désespoir une faille dans laquelle m’engouffrer. S’il saurait trahir parents et amours pour tirer sa seule épingle du jeu, peut-être pourrions-nous obtenir de lui plus qu’il ne nous en coutera à le laisser filer. La chose est dite, enfin, formulée pour la première fois. Le laisser filer… En serait-elle vraiment capable ? Si oui, quand ? Quand ses actions lui paraîtront avoir assez de valeur pour le laisser fuir ? Les questions affluent dans sa tête si rapidement qu’elle doit clore un instant les paupières pour toutes les encaisser.
Mais les dernières réflexions de Camille la tirent soudain de ses songes. Rouvrant les yeux pour s’accrocher aux siens, elle l’écoute dévoiler ses suspicions concernant un nouveau professeur de Poudlard. Un jeune homme répondant au nom de Wilson. @Severus Rogue lui en a déjà parlé quelques fois au détour d’une conversation. Il ne semblait ne lui faire que des éloges. Le visage de la magistrate se penche quelque peu sur le côté alors qu’elle répond, pensive : - Je ne le connais pas personnellement, mais je n’en ai entendu que du bien. Mais je sais que tu as toujours eu un certain instinct… Peut-être est-ce chaque fois grâce à ta truffe ? Es-tu en train de me dire que tu penses avoir reconnu son odeur ? Voir une cavale si savamment menée pendant cinq ans arrêtée brusquement par l’odorat d’un hérisson, voilà qui ne manquerait pas de piquant – hehehe. La pensée glisse un sourire fugace sur les lèvres de Moira qui se reconcentre rapidement sur l’importance de l’information qu’il vient de lui donner. De tels doutes demandent nécessairement vérification.
- Je ne sais pas grand-chose sur ses activités. Pas plus que ce qu’il a bien voulu me confier, du moins. Je sais qu’il a développé une capacité d’infiltration hors du commun. Il s’est amusé à m’envoyer des papiers aux armoiries diverses, toutes provenant de lieux hautement protégés. Poudlard. Durmstrang. … Même mon bureau n’y a pas échappé. Nouvelle gorgée de bièraubeurre pour faire passer l’amertume de ce dernier aveu. - Je ne sais toujours pas comment il a fait pour franchir toutes mes protections sans se faire prendre. Il n’a apparemment rien dérobé ce jour-là, mais j’ai dû mettre en place un nouveau dispositif plus rudimentaire mais aussi plus difficile à contrer pour éviter qu’il ne puisse me rendre une seconde visite impromptue. J’ai installé une mandragore qu’un sortilège fait sortir de son pot si un intrus pénètre dans mon bureau dans y avoir été invité. Tu imagines ? Avec mes talents en botanique, me voilà contrainte à garder une mandragore dans mon bureau pour protéger mes dossiers ! Espérons que son cri soit aussi strident que ce qu’on nous a dit dans nos livres d’étudiants… La légèreté de ses dernières phrases flotte entre eux quelques secondes avant que son regard ne s’assombrisse de nouveau. Elle reprend, plus sérieuse : - Je sais aussi qu’il est entré en contact avec des Choristes Célestes, et notamment Kelly Abaigh qui se fait appeler la « grande ponte ». Je n’ai que peu été en contact avec des sorciers de cette tradition, mais tout cela ne me dit rien qui vaille, en particulier par les temps qui courent… La magistrate reprend son souffle un instant, se perd de nouveau dans ses pensées alors qu’elle tente d’organiser du mieux qu’elle le peut. Mais ses craintes et ses questionnements s’entremêlent, la laissant toujours dans ce même état de détresse dont elle peine à sortir depuis quelques semaines. - Sais-tu quoi que ce soit sur les sorciers de ce culte ? On les dit puissants, habités par une foi qui renforce leurs capacités au-delà de toute autre… On ne fait pas meilleurs fanatiques qu’une marée de croyants. S’il y a un risque qu’ils rejoignent Malefoy, nous devons nous atteler à le contrer dès aujourd’hui.
L’interlude de leur battement cardiaque renvoyait dans le réduit de leur causette le reflet d’un esprit critique. Les échos se bougnaient dans un grelot frileux, piétinés sous les jaspinages des soiffards attenants. Ingrats borborygmes se pénétraient dans un pouacre fumet. La truffe recoquillée, Camille mûrissait chacun des dessillements de son amie dans son caberlot. Il concevait de pied en cap le froissement intime qui rongeait son ordalie. ‘Le bât de l’imputabilité…’. Sa respectable affection au magenmagot était censément un diable flot, un mascaret de billebaude sous l’injonctif d’un adage. ‘Un véritable concentré de caquesangue…’ L’indigence d’être pourvu d’un pantagruélique ressort était canonique.
Le lapis-lazuli de ses prunelles ne formait plus qu’un gouffre d’imbroglio. Irrécusable engloutissement. Labres ventilaient muettement confusion. Jamais encore il ne l’avait vue dans une telle perdition.
Le rapprochement à son contour animalier lui lacérait les lèvres d’un rictus ébaudi. Il s’avérait que jusqu’à présentement, son flair ne l’avait oncques engeigné. Un aloi qu’il avait pétri dans l’acuité.
« Dis comme ça, je peux presque entendre le persifflage de @Severus Rogue nous discrédités en une fraction de seconde… » Son ronchonnement familier rabâcher ‘nous voilà bien avancés’, avec cette même contorsion agacée des lèvres, qui lui était si étroite.
Après une lampée mesurée de bièreaubeurre, les indigos se mêlaient au turquoise de son amie.
« Mhhh je ne sais pas … je pense que je me fourvoie car je le trouve juste suspicieux…Un instinct d’hérisson à la noix, laisse tomber… »
Dolent trismus des masséters. Les phalanges taquinaient le massif boiseux mangeotté par l’écaillement des soiffards.
« Son accent d’amerloque est agaçant… »
Oiseuse vacillation.
Le squelette s’acagnardait indolemment contre le siège, labres soupirant de fastidiosité, les jointures coudoyées et la gueule flétrie d’élucubration après les dernières allégations de Moira.
« Je n’ai jamais douté de ses capacités mais j’avoue qu’il se surpasse constamment… » Le temps d’une manducation, la taverne s’était gavée à foison. Le cornement ornemental s’était perverti en canard inharmonique, chatouillant les susceptibles pavillons du hérisson.
« Une mandragore ? Crois-moi, il n’y a pas plus efficace comme alarme…Mes oreilles en ont encore un dur souvenir… » Une des énièmes tribulations essuyées avec @’"Archibald Rosier". ‘L’idée de base était bonne pourtant…’ Que n’avait-il donc pas tâté avec ce grasset cornichon ? « Les choristes célestes ? Tu es sûre ? »
Ces sorciers illutaient de secret. Sa dérobade des rangs des diablotins l’avait éconduit au préambule de leur réalité. Stimulante trouvaille pour un dévot d’érudition comme lui. Avant-goût d’un climat frémissant. Lucrative, cette conjoncture s’était-elle esquissée.
« L’un d’eux s’était occupé de mes plaies lors de ma cavalcade avant la chute de Voldemort. Edward Dacre. Lui et ses confrères avaient quelque chose de très…immatériel et symbolique. Je n’en ai pas rencontré des dizaines mais du peu que j’en ai retenu, ils détiennent une profondeur dont nous sommes dépourvus. Ils peuvent être très…captivants ? Je n’ai pas l’impression qu’ils se laisseraient manipuler par n’importe qui, - Ils croient en quelque chose de fort - mais comme notre cher Lucius a démontré ces derniers laps une qualité qui nous surpasse, je pense qu’on peut chatouiller l’impudence de l’insinuer dans quelques tripotages avec eux. »
L’air préoccupé, lèvre supérieure mignotée par l’index, Camille se repliait dans le lacis de ses supputations. Le contour d’un remuement rudoyait l’éclat de ses prunelles. Ça poulopait dans sa carne.
« Cette canaille s’immisce dans tous les tréfonds. Il a pu contrarier tes défenses. Qui sait où il aurait pu encore laisser traîner son museau ? Je suis partagé… Avec tous ces éléments en main, il est difficile de ne pas s’en méfier…mais d’un côté, qu’est-ce que ce faquin prépare ? Je suis curieux de savoir…Titille-t-il ta confiance pour nourrir un douteux dessein ou par une insoupçonnée franchise ? Personnellement, mais peut-être ne suis-je pas assez objectif, je pencherais pour la première… Je me méfie toujours de Lucius, malgré toute la déférence que je lui attache. Je ne sais pas ce qu’il mijote, ‘sûrement un nouvel outrage qui le distingue si bien’, mais il mérite attention …»
Ce cher Lucius les engageait sur un layon anfractueux. ‘Qu’est-ce que ce coquin nous prépare donc ?’
« J’ai eu des contacts avec Mingjue Lin pour certaines de mes correspondances à l’étranger, et son fils est élève à Poudlard. Ils font tous deux partis des Choristes célestes… Peut-être Lucius les a-t-il contactés ? Je peux toujours me renseigner discrètement auprès d’eux ? Je pense que Severus serait plus amène d’en parler au jeune Lin. Je pourrais également contacter Edward ? Il vaut peut-être mieux se renseigner avant de se jeter dans la gueule du loup et enflammer le théâtre avant l’heure… »
Frivole perspective que d’espérer un quelconque poudroiement de @Narcissa Black-Malefoy. Il se serait bien enquis auprès de l’élégante sylphide s’il ne lui cultivait pas autant d’égards. Bien que sa prolixe mesure l’exposerait probablement à quelques rétorsions avec l’aristocrate. Promesses avilies.
« Je sais que tu as un bon instinct…celui-là même qui te pousse à lui faire confiance. Très sincèrement, je pense qu’une partie de toi pourrait nourrir ce sentiment…Lucius est tout ce que l’on pense, mais c’est un homme de parole…Mais voilà, après toutes ces révélations, je pense qu’on peut gratter en profondeur pour écarter tout risque potentiel… »
Les suspicions vrombissent de tous côtés comme un bourdonnement d’abeilles aux oreilles de la juge. Les regards lourds des tables avoisinantes refusent de cesser alors qu’elle et le professeur s’appliquent à baisser le ton pour garder les secrets de leur conversation. Un mangemort en fuite. Un enseignant étrange à Poudlard. Folie et instincts se répondent et s’embrouillent pour ne donner qu’un amas informe de suppositions douteuses. Les émotions de l’après-midi ajoutent leur lot de précipitations à leurs réflexions déjà chancelantes. Une nuit de sommeil aurait sans doute aidé à éclaircir leurs esprits, mais tous deux n’ont pas ce luxe. Une élève a été blessée. Moira doit rapidement rentrer à Londres. Et Camille se retrouve prisonnier d’une école où s’accumulent de trop vives tensions. Les prochaines semaines s’annoncent longues, et déjà trop chargées.
Les quelques réticences de @Camille Nott envers ce pauvre Wilson peinent pourtant à se justifier, comme issues d’un pressentiment difficile à décrire. L’origine de ses impressions demeurent mystérieuses et l’ami de la juge botte en touche, préférant arrêter là avant que ses paroles ne disent plus que sa pensée. Légèrement tendue, Moira se force à sourire, et glisse d’une voix qu’elle tente de garder douce : - Je ne sais pas quoi te dire, Camille… Je ne le connais pas assez pour avoir une véritable opinion sur le sujet. Mais je garde son nom dans un coin de ma tête, je te le promets.
Elle reprend une gorgée de bièraubeurre qui lui paraît étonnamment amère, comme toute cette journée qui n’aurait dû être que liesse et festivités. Les inquiétudes transparaissent dans leurs regards et sur leurs visages. Les rares indices dont ils disposent paraissent bien maigres face à l’urgence de la situation. - Certaine. Il est en contact avec eux. Je n’ai aucun doute là-dessus. Pourquoi mentirait-il ? Les choristes célestes ont toujours conservé une relative discrétion dans le monde de la magie. Moira n’en connaît d’ailleurs que très peu, si ce n’est Lord Fawley, bien entendu. Pourquoi Malefoy irait inventer une accointance avec un groupe si secret ? D’autres alliances seraient bien plus inquiétantes en apparences s’il ne souhaitait que s’en créer une pour l’effrayer. Le nom des euthanatoï il y a quelques mois a déjà fait frémir bien davantage le Ministère après la mort d’Astoria Greengrass.
Les impressions de Camille confirment cependant les siennes. Le rapprochement supposé entre Malefoy et les choristes célestes ne dit malgré tout rien qui vaille. Ces sorciers sont connus pour leur puissance qu’ils tirent d’une spiritualité toute dévouée à leur culte. Les avoir en alliés doterait l’Insurrection d’une forme de frappe inédite. Pourtant, il est difficile de croire que Lucius soit entré dans un tel groupe dans le but de les rallier à sa cause. Les choristes célestes ne sont pas connus pour se mêlés fréquemment des affaires du monde qui ne soient pas les leurs. Lucius aurait-il pu en revanche les approcher pour servir quête toute personnelle ? Le ton de ses lettres tend à lui faire préférer cette interprétation. Après tout, la religion n’est-elle pas des plus attractives en période de grands questionnements ? Si Malefoy s’est véritablement plongé dans l’introspection qu’il lui a décrite, Moira ne serait pas surprise de le voir chercher ses réponses dans les sages paroles d’Abaigh Kelly.
- Je ne sais pas jusqu’où va ma confiance, Camille. Je ne sais pas où mes espoirs prennent le pas sur ma raison. Je sais seulement qu’il est dans une position intenable depuis des années, qu’il semble épuisé, et qu’il montre tous les signes d’un homme prêt à tout pour mettre fin à la situation de laquelle il est prisonnier. Pourquoi se rapprocher des choristes célestes, mettre toute son éducation de famille traditionnaliste de côté pour se plonger dans une magie religieuse s’il n’était pas en plein questionnement sur lui-même ? Je n’arrive pas à croire qu’il ait inventé tout ça. Pourquoi l’aurait-il fait ? Ca ne colle pas, Camille… Ca ne colle pas. Une nouvelle gorgée de bièraubeurre lui fait ravaler ses craintes alors que son ami lui fait part des quelques connaissances qui pourraient les aider à percer les mystères des chœurs célestes et mieux comprendre ce que @Lucius A. Malefoy peut trouver dans leur sphère. - Tout ce que tu peux trouver nous servira, que Malefoy s’intéresse sincèrement à leur tradition ou non. Nous avons ignoré les choristes pendant trop longtemps. Si leur influence doit grandir dans les années à venir, je veux savoir à qui j’ai affaire. Contacte Dacre si tu le peux. Je suis plus réticente en revanche concernant Mingjue Lin. J’aimerais garder autant que possible les puissances étrangères loin de ce genre d’affaires. Nous parlons de l’ennemi public numéro un, Camille, et son nom a résonné bien au-delà de nos frontières. Je ne voudrais pas qu’il attire l’attention d’autres Etats qui pourraient être intéressés à l’idée de le supprimer au plus vite… ou de le recruter. Où s’arrête la paranoïa en temps de crise ? Les risques sont partout, les ennemis potentiels aussi. Moira ne peut rien laisser au hasard et trop peu d’hommes dans ce monde lui paraissent encore susceptibles de mériter sa pleine confiance. - Je crains que nous ne puissions bientôt compter que sur trop peu de monde. Les endroits sûrs ne sont plus qu’un lointain souvenir. Il nous faut prendre garde partout. Je sais que tu les protèges, Camille, mais si tu as un jour le moindre doute sur la sécurité des enfants à Poudlard, promets-moi que tu me le diras immédiatement. Je ne supporterai pas un seul incident qui ressemble à ce que nous avons subi aujourd’hui. Et je crois que le reste de ce pays non plus. Encore une attaque de ce genre et c’est toute la société qui peut perdre pied.
La juge jette alors un coup d’œil à sa montre. L’heure tourne si vite… On doit déjà l’attendre à Londres pour rapporter sa vision des faits de cet après-midi. La nuit est entièrement tombée dehors et l’ombre des ruelles de Pré-au-Lard rend leur désertion plus angoissante encore. Moira soupire, le regard toujours tourné sur l’extérieur à travers la vitre de la taverne. - Je crois que je devrais rentrer. Le Ministre doit déjà m’attendre, comme tous les hauts placés du Ministère. La nuit ne fait que commencer pour nous, je le crains… Relevant une dernière fois sa chope de bièraubeurre, Moira la vide d’un trait avant de se redresser et d’ajuster ses affaires. Les regards suspicieux des autres tables reviennent la fixer et elle feint de les ignorer. Sortant quelques noises de sa poche, la magistrate les dépose sur la table pour payer leurs deux consommations et revient croiser le regard du professeur. - Je te dirai si quoi que ce soit bouge à propos de ce que je t’ai confié ce soir. Tiens moi au courant de ce qu’il se passe à Poudlard et si jamais ce Ernst Wilson te donne de nouvelles raisons de le soupçonner. Puis, elle s’arrête quelques secondes, le temps de laisser la tendresse imprégner son regard et un sourire triste étirer ses lèvres fines. - Promets-moi de prendre soin de toi, Camille. Les temps n’ont jamais été aussi dangereux pour toi depuis la chute du Seigneur des Ténèbres, tu le sais… Les périodes de suspicions sont toujours les plus périlleuses et nous entrons dans l’une des pires, je le sens. Et ça ne risque pas de s’atténuer de sitôt. Alors je t’en prie, fais attention… Elle contourne alors la table et se penche pour embrasser son frère sur la tempe. - Embrasse Rémy pour moi. Puis, après un dernier sourire, elle s’envole. Mais si ses révélations ont quelque peu atténué le poids qui pesait sur son cœur, l’air dehors lui a rarement paru si froid.
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Hors rp:
Pardon pour mon affreux temps de réponse, dearie. J'espère que ça valait l'attente...
Du coup, je pense avoir fini l'action pour Moira. N'hésite pas à conclure au prochain post pour Camille également.
Si tu vois quoi que ce soit à changer, surtout tu n'hésites pas à me le dire.
L’ombre d’une confusion fardait sa conscience d’une rondelette nébulosité à l’évocation de Wilson. Il était infécond d’incriminer un quidam sans le résidu d’une quelconque preuve. S’arc-bouter sur de simples présomptions était aussi fructueux qu’agacer un feu sans flamme.
« Je comprends. J’imagine que je dois être un peu présomptueux d’insinuer quoique ce soit sans un soupçon de preuve »
L’ébauche d’un sourire élaguait la commissure droite alors qu’il ressassait l’ombre de quelques souvenirs.
« D’autant devant la présidente du magenmagot. J’ai l’air d’un arpète… »
La conviction avec laquelle elle imprégnait ses craintes à l’encontre de Malefoy rongeait sa tranquillité. Le diableteau semblait s’être bardé d’écu et matoiserie. Dans quelle cabale s’était-il donc glissé ? Des maigriottes ressources qu’il cultivait intimement dans le puisard d’omniscience qui léchait sa caboche, il n’en saillissait que d’équivoques déductions. Les Choristes Célestes n’étaient pas populaires pour leur accointance avec le gratin de la société. Une offensive lamba serait donc plutôt singulière de leur part. Alors pourquoi diable s’était-il acoquiné parmi eux ? Il brûlait sans nul doute d’un quelconque dessein. Assurément même.
Moult cogitations grattaient sa matière grise alors qu’il considérait avec application les dires de son amie.
« Je comprends ton trouble Moira. La confiance est délicate à féconder, surtout dans toute cette grisaille qui nous entoure. Je ne sais pas pourquoi il s’est engagé sur ce chemin mais tu sembles avoir raison sur le fait qu’il met tout en œuvre pour sortir la tête de l’eau. Après tout, il n’a presque plus rien à perdre, presque. »
Les lèvres s’acquittaient d’un caverneux soupir, l’esprit confondu dans tout ce brouillamini.
« Quelle pagaille… »
La gargue s’engorgeant des dernières gouttelettes capiteuses, il consignait son verre sur le bois moite et crapoteux sur lequel avaient sûrement déjà débordé moult pintes.
« Tu as raison. Inutile d’attiser la curiosité de nos voisins. Je vais contacter Dacre au plus vite et te tiendrai au courant de ce qu’il en sera ressorti… »
Il faudrait déjà qu’ils débouchent sur quelque chose d’un tant soit peu fertile sur leur propre glèbe avant d’asticoter les autres continents, surtout en cette crise ambiante qui semblait converger vers son apogée.
« Tu peux compter sur moi pour garder un œil attentif sur eux. Je pense qu’on est tous d’accord sur un point ; les protéger avant tout. Leur implication dans cet imbroglio est déjà trop grande ! »
L’œillade égarée sur sa montre annonçait la fin de leur cailletage. Lui aussi devait retourner à ses obligations et rabibocher avec l’aide de ses collègues le branle-bas ambiant.
« Bien. Je crois que l’on va avoir aussi pas mal de labeur à Poudlard, avec l’inquiétude des parents à gérer. Il serait étonnant que madame Skeeter n'ait pas glissé une attention parmi nos remparts. »
L’allouant d’un remerciement silencieux pour les bièreaubeurres, il s’arrachait à son tour de son siège, la colonne désarticulée dans un insaisissable craquètement. Douceur partagée. L’éclat indigo bienveillant, la bouche attendrie d’un amiteux sourire, il se repaissait de leurs tendres égards.
« Je te le promets. J’ai déjà été assez serré comme ça alors je préfère éviter un quelconque empêtrement. Toi aussi, sois prudente ! Et je n’y manquerai pas pour Remy. Elle sera sûrement jalouse que j’aie vu sa chère marraine et pas elle… » L’ombre d’un délassement mangeottait son mascaron alors qu’il se libérait à son tour de l’alcôve copieusement chargée d’effluves éthyliques.