A Keepsake from the past
Ils sont identiques. Ou presque. Chose rare pour les jumeaux. Souvent, d’infimes variations de caractère deviennent des torrents de différences par lesquelles reconnaître l’un ou l’autre. Oh, il est vrai que Fred est plus souvent dans les pattes de Charlie quand George préfère embêter William, mais les jumeaux cultivent si bien leur ressemblance et leur goût pour les plaisanteries que personne n’a jamais découvert cette particularité tant ils se font passer l’un pour l’autre. La vie au Terrier, dans leur enfance, est peuplée de plaisanteries douteuses – qui a foutu cette tarentule dans le lit de Ron ? – de blagues vaseuses – Tu sais ce qui est plus petit qu’un gobelin ? Un sorcier le suppliant pour un prêt – d’inventions dangereuses – mais non, Papa, ce salpêtre, c’est pas pour faire sauter la maison, c’est pour un feu d’artifice ! Parmi leurs farces les plus célèbres, on peut mentionner une bombabouse (piquée à Charlie) sous le fauteuil de tante Muriel, essayer de faire jurer un serment inviolable à Ron (bon, ok, elle était dangereuse celle-là, ils le reconnaissent volontiers aujourd’hui et ne sont pas certains que leur cadet leur ait pardonné totalement), transformer les possessions des uns et des autres en animaux terrifiants, qui un serpent, qui une tarentule, qui un alligator (à leur décharge, le sort a foiré et l’alligator faisait dix-sept centimètres de long), faire manger un suçacide à Ron (ça lui a fait un trou dans la langue, il a fallu aller à Sainte-Mangouste, c’est ce qui leur donnera l’idée de développer leurs propres gammes de confiseries ultérieurement, et toujours en vendant l’antidote avec, parce qu’ils sont responsables, eux ! … Quoiiiiiii ?)
C’est qu’ils tiennent de leur père, les jumeaux. Combien de fois ne l’ont-ils pas vu s’éclipser discrètement pour aller travailler sur cette vieille Ford Angelina afin de la faire voler. Parfaitement illégal, parfaitement fascinant. Avec un tel exemple à la maison, il ne fallait sans doute pas s’étonner de ce que les jumeaux aient une vision très personnelle des règles et de la légalité.

Silent Woodland
Leur vie commence à prendre des couleurs lorsque ces hiboux de Poudlard leur offrent un nouveau terrain de jeu : faire des blagues au Terrier, c’est bien, mais imaginez les possibilités dans une école ! Dès leur première année, ils finissent souvent, trop souvent, en colle chez Rusard. C’est à cette occasion là, après un magnifique tour de force qui leur donnerait l’idée ultérieure de l’invention du marais portable qu’ils ont réussi à chaparder dans les tiroirs du concierge ce vieux bout de parchemin dans le tiroir des objets confisqués, ainsi que ce qui leur restait de bombabouses modifiées pour faire apparaître un marais à l’endroit de leur impact pour accompagner l’odeur nauséabonde se dégageant du jouet. Oh, il leur a fallu un peu de temps pour comprendre comment fonctionnait la Carte du Maraudeur, mais une fois celle-ci en leur possession, ils sont devenus les rois du monde. Les rois de Poudlard, en tous cas. Dès leur première année, ils ont trouvé comment se faufiler chez Honeydukes pour acheter des confiseries avec l’argent gagné en vendant leurs bombabouses modifiées dont, il faut bien le dire aujourd’hui, le résultat était parfois un peu aléatoire. Les belles années, douces années de maraude, d’ignorance délibérée des lois internes de l’école et d’heures de colles auxquelles répondaient les beuglantes de leur mère. Juste assez chahuteurs pour être problématiques, juste assez sages pour n’être jamais inquiétés de renvois, même temporaires. Et puis ce bon vieux directeur a toujours joui d’une indulgence coupable pour les lions, les jumeaux ont toujours su qu’ils auraient eu une vie moins belle à Serpentard où le choixpeau se proposait d’envoyer Fred. Mais son frère était à Gryffondor, et il a voulu le rejoindre.

Falling from the clouds
Dès leur deuxième année, les voilà dans l’équipe de Quidditch. Il y en a bien qui ont hurlé au favoritisme, leur grand frère étant l’attrapeur de génie et le capitaine de l’équipe pour sa dernière année, mais c’est sans compter le premier match.Les jumeaux volent bien, ils ont quasiment grandi le cul vissé sur un balai, emportés par la passion tourbillonnante de toute la famille pour le sport sorcier. Et surtout, ils ont cette connivence qui les aide sur le terrain. Ils travaillent parfaitement en duo et sont assez casse-cou pour aller au contact des cognards. Un des postes de batteurs s’était libéré, le deuxième a changé de main tant la paire a su se montrer agile sur le terrain, au grand dam de l’ancien membre de l’équipe désormais relégué au rang de réserviste. Les jumeaux ont du surveiller leurs arrières quelques temps, après avoir rejoint l’équipe. Mais ils sont bons, et bientôt, leur légitimité est indiscutable : et puis ils ont l’occasion de rattraper au Quidditch tous les points qu’ils perdent en bêtises. Les années suivantes sont d’ailleurs un fouillis de farces, de cours, et d’accompagnement dans le monde magie de ce petit gars aux cheveux noirs et à la carcasse trop amaigrie. Potter. Un héros, paraît-il. Le meilleur ami de leur frère, surtout. Les jumeaux se sont souvent chamaillés pour savoir qui avait plus de courage : Ron qui s’aventurait dans les grandes épopées d’Harry, ou ce dernier qui supportait la présence de leur insupportable petit frère ? Quels souvenirs marquants ont-ils de ces années là ? Un voyage en Egypte suite à une tombola remportée au Ministère qui leur a permis de ramener des ingrédients rares, des gallions gagnés en trafics douteux et paris sur les matchs de Quidditch, des expérimentations le soir, dans le passage à demi-effondré derrière la statue de la Sorcière Borgne, leur cachette personnelle. Et la vie est alors une fête, bien qu’ils ne se doutent pas de la tourmente à venir.

Thundering in the mountains
C’est dans leur sixième année que le destin s’acharne à les prendre par la main : ils sont décidés, ils vont devenir inventeurs de farces et attrapes. Mais leur dossier scolaire est pour le moins lacunaire en raison d’une expérimentation qui a mal tournée l’année précédente : une de leurs potions, testée à quelques jours des BUSEs, leur a fait oublier une partie conséquente de l’année scolaire et de leurs révisions. Évidemment, lorsque leur mère a vu les résultats scolaires qui en ont découlé, ils ont été sévèrement tancés. Mais qu’à cela ne tienne : le travail scolaire ne les intéresse pas, c’est vrai, mais ils sont bien décidés à apprendre tout de même. Pas pour cette chose stupide qu’on appelle l’école, plutôt pour cette chose merveilleuse qu’on appelle l’ambition, la réussite, l’entreprise ! Ils ont su qu’il leur fallait des fonds et des sujets de tests pour éviter de se mettre à nouveau en danger : ils ont parié avec Ludo Verprey à la coupe du Monde et ont gagné leur pari, mais celui-ci s’est enfui au moment de payer. Ils ont aussi commencé, à Poudlard, à proposer aux jeunes élèves de tester leurs produits en échange d’un peu d’argent, et les premiers prototypes de leur produit phare d’alors, la boite à flemme, se perfectionnent à vive allure. Hermione, toujours droite dans ses bottes, n’a eu de cesse de les reprendre, menaçant même de tout dire à leur mère : un coup en dessous de la ceinture de l’avis des jumeaux. C’est à la fin de cette sixième année que deux éléments déterminants interviennent, toutefois : le retour de Voldepif (Harry leur a dit qu’il n’avait pas de nez) et l’obtention d’une grosse somme d’argent de ce même partenaire silencieux que deviendrait Harry. Lorsqu’il repense à cette période, le sang de George bouillonne : la main qui a donné est aussi celle qui lui a fauché ce qu’il avait de plus précieux.

The Pink Toad
Leur dernière année à Poudlard est paisible : ils ont peu de cours et tout le loisir de piller la bibliothèque pour se former. Les cours de Severus Rogue les aide, indirectement, à acquérir l’aisance nécessaire en potions pour concocter une partie de leur gamme de farces et attrapes tandis que les leçons de Flitwick et McGonagall leur offrent une source inépuisable d’inspiration pour tous les objets magiques auxquels leurs cerveaux en ébullition pourraient penser. Le sait-il, ce bon vieux Filius que l’idée du kit tunning Broom-broom pour balai volant naît pendant l’une de ses leçons sur les charmes de lévitation appliqués sur les balais et autres tapis volants – dont l’usage est prohibé en Grande Bretagne, on le rappelle – ? Le sait-elle, cette vieille chouette de Minerva que son cours leur a inspiré ce qui deviendrait une de leur meilleure vente à la suite de la guerre, le redoutable Spectrum Splasher, l’exploseur de spectres, qui est nulle autre que leur plus audacieuse création d’artificier ? Chaque cours est un prétexte au service de leur chapelle Sixtine personnelle : la boutique Farces pour sorciers facétieux, raccourcie en « Boutique Weasley » pour plus de commodité, ou « nouveau cauchemar d’Argus Rusard » pour plus de réalisme. En tous cas, la septième année qu’ils passent à Poudlard est aussi la plus bouleversée. Entre l’AD, Dolorès Ombrage et le retour de Voldepif… Sans oublier, naturellement, la brigade inquisitoriale, les expérimentations sauvages de produits, avec ou sans leurs consentements, sur les membres de ladite brigade (pas de preuve, pas de coupable… mais ça n’a pas empêché les deux jumeaux de côtoyer régulièrement ce bon vieux Rusard en heures de colles), sur des élèves presque volontaires, et un départ en feu d’artifice. Littéralement. Leur meilleur coup de pub, s’ils doivent être honnêtes. Les jumeaux ont fait parler d’eux, encore. Ont semé la plaisanterie et la désolation de cette brave Dolorès, encore. Ont fait exploser le ciel de Poudlard du chatoiement de leur détermination, encore. Ont mené leur grand coup, leur grand et utlime chambardement dans les murs de Poudlard où ils ne reviendraient tous deux qu’une fois. Une seule. Il semble au survivant que ce coup d’éclat est le dernier grand moment de lumière avant que ne se déchaînent les flots d’un déluge funeste.

A dream about wartime
Les jours s’enchaînent et se ressemblent. Le local commercial ouvre ses portes après des mois à vendre par correspondance leurs produits via un catalogue et des petites annonces publiées dans divers journaux, le bouche à oreille ayant fait le reste. Une fête de couleurs, de lumières, d’insouciance. Un ilot d’espoir dans les abysses de la guerre. Ils refusent de trembler. Cachés derrières des barrières magiques de facture gobelin qu’ils ont négocié à prix d’or auprès de Gringotts grâce au soutien de Bill, expert de la famille en matière de relations professionnelles avec les gobelins s’il en est ! Ils cumulent les provocations. U-no-poo, la gamme d’auto-défense contre les mangemorts et leurs attaques, des sortilèges de bouclier intégrés dans des chapeaux, la poudre d’obscurité instantanée du Pérou… Et ils vivent, ils survivent. La guerre passe sur le Chemin de Traverse et apporte un voile de mort et de désolation. Une année passe, un autre été lui succède. La guerre les marque physiquement immédiatement. George comme Fred ont rejoint l’Ordre du Phénix et font parti des Potter sous polynectar prêts à semer les mangemorts. Un Sectusempra fend le ciel et lui tranche l’oreille. Mieux vaut une oreille que la tête, comme il le dira, des années plus tard, le soir de son propre mariage, en levant son verre à son jumeau reposant sous terre. Et les joies des noces seront alors irrémédiablement emportées par la solennité du deuil. Mais l’oreille coupée n’est pas le plus lourd tribut que la guerre leur prend.
Ils luttent. Un présent, un avenir en lutte contre les ténèbres. Ils rejoignent Potterveille, la radio pirate contre l’oppresseur pour distiller un peu d’espoir et d’information à tous les sorciers en fuite, en lutte, en veille. Ils agissent dangereusement, avec courage. Avec provocation. La ligne est fine entre la folie et le désespoir. Mais ils sont là, tous deux. Ils se réconfortent au coin du feu de la seule certitude de la présence de l’autre. Deux faces d’une pièce. Deux corps abritant une même âme. Il est la lumière, Fred. Cette force vive et folle. Il est le pragmatique, George. Seuls ceux les connaissant vraiment savent que l’un était le moteur de leur duo lorsque l’autre était la force paisible suivant les cavalcades de son frère et finissant son œuvre lorsque ses poumons en feu, épuisés d’avoir trop couru, lui embrasaient la poitrine. L’un commençait, l’autre achevait. L’un s’enthousiasmait, l’autre songeait à la faisabilité. L’un proposait l’idée novatrice, l’autre envisageait les solutions techniques. Et tous deux renchérissaient sur les propositions de l’autre jusqu’à ce que du dialogue naisse la perfection de leur œuvre : un chaos joyeux.

The card without a name
Le corps est figé. Disloqué. L’esprit est hébété. Ils sont là, tous les deux, au milieu d’un champ de bataille en ruine où le silence est assourdissant après l’éclat des combats. Les gravas ensevelissent la moitié de leur être et ils se sentent mourir. Il est debout, pourtant, contemplant le corps froid, dissocié de lui désormais. Et ils se sentent mourir. La moitié de son âme s’envole, s’arrache, tourbillonne. Le choc lui lacère les entrailles. Ce n’est pas eux. Ce n’est pas eux, ce n’est pas la moitié d’eux que l’on dégage des décombres et que l’on couvre d’un linceul. Ce n’est pas eux. Ce ne peut pas être eux. Ils sont là. Toujours là. Un souffle dans les ténèbres. Ils sont là, toujours là. Deux faces d’une même pièce. Ils sont là, détachés en silence. Détachés lorsque crient leur mère qui s’affaisse sur cette carcasse vide de chair qui leur ressemble si fort. Ils touchent son épaule comme pour la rassurer mais s’efforce de se remémorer que ce n’est pas eux. Ce n’est pas eux que l’on enterrera demain.

They were here
Ils l’ont vu, encore, dans le regard de leur mère. Elle s’est crispé, son œil s’est voilé. Ils n’ont rien dit d’inhabituel pourtant. « On arrive, maman ». Elle a juste appelé George, mais elle n’a pas besoin d’appeler les deux. Si l’un est là, l’autre aussi. Tout le monde le sait. Tout le monde. Mais elle s’est crispée, et ils ont fait mine de ne rien voir. Ils savent bien que leur mère n’est plus vraiment la même depuis la guerre. Ils l’ont entendue s’inquiéter auprès de leur père de les entendre parler, à deux, de leur prochaine invention, et ils ont vu, aussi, les regards blessés, peinés, de la famille. Mais ils ne se sont pas arrêtés pour autant.
Et ils guerroient. Bien que Poudlard ait été repris, Kingsley a encore besoin de bras pour reprendre le Ministère. Leur mère a essayé de leur interdire d’y aller. « Ton frère est mort, George », qu’elle lui a dit. Mais ils savent qu’elle se trompe. Cette chair froide n’était qu’un leurre. Un des deux corps où vivent leur âme unie. Ils étaient deux corps pour un seul esprit, avant. Les voici un corps et un esprit. Une nouvelle configuration. Mais il faut du temps pour que les autres l’acceptent, pas vrai, Fred ? Oui, George. Tu sais bien, Gred et Forge, tout ça. Alors ils y vont sans l’avertir, au front. La famille a déjà été secouée, c’est vrai, mais ils sont prêts à faire leur part pour débarrasser ce monde du mal qui le ronge et se cache dans le coeur des hommes.

Fury in the dark
La solitude le terrasse. Ils se sont tus. Dans le silence, il sent sur ses épaules peser plus encore l’absence de l’autre. Ils pensaient que cela ne changerait rien qu’un corps s’en soit allé. Ils se sont trompés. Les procès défilent et la voix se raréfie. Ils ne parlent plus. Presque plus. Sa voix n’a survécu que dans sa tête, et ils passent tout le jour muré dans un mutisme obstiné, à la boutique. Les croquis ont volé dans la pièce et les boursouflets, ces petites bêtes qu’ils ont créées avec un peu de magie et beaucoup de croisements génétiques volent et vrombissent tout autour de lui, intrigués par le calme soudain après la tempête. La cage a explosé, les fioles coulent sur le sol, ne gardant qu’à grand peine de charme d’incassabilité leur contenu. Et ils roulent. Ils roulent ces silences après un nouvel éclat de fureur. Ils roulent ces désarrois et ces désespoirs. Ils roulent et se fracassent. Au coeur de la solitude naît le ressentiment. Au plus profond de ses entrailles, la voix du survivant crie vengeance.

Living dead
La tendresse papillonne sur sa peau, doigts enlacés près de l’autel. Ils se sont rapprochés et s’unissent à présent sous le regard des dieux. Elle est belle. Belle comme au premier jour. Ils la côtoient depuis l’enfance, dans l’équipe de Quidditch. Elle a d’abord papillonné autour de Fred avant que leur tristesse mutuelle ne les rapproche, ne les unisse. Et ils sont là avec elle, devant l’autel. Son coeur vibre, et il sait qu’il accompli le devoir de Fred. C’était lui qu’elle aimait. Lui qu’elle aimait bien plus que George. La lumière plutôt que la mesure. Et la mesure aurait sans doute trouvé un tempo contre lequel se glisser si la lumière n’avait été engluée par les ténèbres. Ils lèvent leur verre, scellent d’un baiser les lèvres de leur amante et épouse, dansent et chantent, portent des toasts et serrent des mains, enlacent et réconfortent, écoute et sourient. Et ils sont là, tous les deux, quelque part dans le coeur et le corps de celui qui vit sa vie comme un automate. Une partition dictée par le souvenir.

Just a letter
Ils sont partis sans laisser d’adresse. Ils ont laissé une lettre. Tous les deux, signés du nom seul de son mari officiel. Ils ont le même visage, le même corps, mais ils ont appris que personne ne comprenait qu’ils étaient deux. Encore deux. Toujours deux. Le silence répond à l’absence. Ils ont le coeur vide et morcelé. Ils le sentent. Alors ils ont décidé d’embrasser les dernières émotions survivantes à la guerre : la rage, la colère. Une soif de sang. Ils n’ont pas d’affinité pour Narcissa, mais ils ont la haine du parjure. Potter s’est parjuré et son aide pour lancer la boutique est devenu la lame par laquelle il a fauché la moitié d’eux-mêmes. Tel un Diable, il a collecté l’âme promise au bout du chemin. Alors ils ont décidé de prendre les armes, leurs armes. Le génie doit être mis à disposition des ennemis qu’il feront tomber sous leurs sabots. Ils se sont engagé. Et ils ont laissé cette lettre sur la table de la cuisine. Ils ont uni leur voix pour lui dire qu’il l’aimait. Lui. Son mari. Eux, ces deux âmes abritées par un seul corps. Et le masque se fissure.

Resentment and beautiful lies
Ils savent éviter les lapsus. Ils savent qu’il faut parler d’eux au singulier. Leur mère est persuadée qu’ils vont mieux, maintenant, cachés sur les Terres de Feu. Ron aussi. Il les aide à la boutique. Eux créent, lui s’occupe du managment courant. Eux vivent reclus, presque, dans ces vastes étendues du domaine Malefoy où s’affrontent les vents et les embruns. Ils profitent de la bibliothèque de leurs hôtes et des accointances douteuses de leur cercle social. Ils parlent, plaisantent, conspirent. Le catalogue de la boutique s’agrandit au gré des suggestions, des partenariats commerciaux, des coups de pub. Le souffre embaume bon l’atelier du Diable où se prépare la chute d’un monarque érigé en Dieu par ses hordes de fan. L’oreille lui gratte. Non pas l’oreille véritable, mais l’autre, celle qui, tombée au combat, a été remplacée par une oreille à rallonge dont il peut se servir de prothèse pour que son frère et lui perpétunt leur fâcheuse tradition de se mêler de tout. Alors ils se sont donné une nouvelle grande mission : n’avaient-ils pas pour Patronus une pie ? Peut-être pourraient-ils… juste comme ça ? Les voilà perdus, sur leur temps libre, dans des livres sur les animagi, juste au cas où. George est le plus méthodique des deux, cependant. Alors ils ne sont pas surpris qu’il soit le seul des deux à y parvenir.

A new day
Ils se sont tenu loin de la politique. Ils ont écrit à leur femme, souvent, mais n’ont pas souhaité eux-même faire plus que de continuer à inonder leurs étagères de nouvelles babioles. Mais il y a ce repas qui ébranle tout. Narcissa Malefoy en difficulté. Ils la voient perdre la face devant le petit dragon montrant les crocs. Ils entendent ce qui se murmure sur le bâtard qui menace la couronne du furet et se rêve déjà roi. Ils savent que le mangemort en fuite est désormais aux mains de la justice. Et ils tremblent de voir leur ennemi triompher à nouveau. Narcissa paraissait seule capable de leur apporter leur vengeance au prix de la ruine du monde, mais y a-t-il d’autres voies pour que meure le tyran ? Y a-t-il d’autres voix dissidentes pour faire un choeur d’accusation contre le héros dont les plumes ternissent le monde ? Y a-t-il un espoir pour eux ? Le doute les fait trembler, et pour la première fois, George ne sait plus où il en est.