« Et c’est pour ça qu’on ne peut pas vraiment se fier à Poudlard, Holmes. » avait conclu Arthur Weasley. Lizzie avait hérité – non, appris et difficilement de surcroît- de ses parents l’art subtil du hochement de tête. Sans cesser de boire discrètement son café, elle avait acquiescé sans mot dire. Leur département comptai pour une mornille dans l’escarcelle du Ministère, mais elle ne se séparait jamais de l’espoir que peut-être un jour, leurs mérites seraient reconnus. A défaut d’une prime (improbable), elle espérait n’importe quelle occasion. « Rendez-vous compte que Ron y a trouvé des araignées anthropophages, un chien à trois têtes et toutes sortes de menaces. Les jumeaux ont été renvoyés pat un gouvernement fantoche … » il s’était interrompu et son visage s’était orné d’une des deux couleurs de gryffondor. Arthur avait bredouillé, se souvenant qu’un renvoi était somme toute peu de choses en comparaison d’un séjour à Azkaban. Lizzie y avait vu une opportunité formidable, et d’un sourire, avait rappelé l’importance de leur mission et sa totale disponibilité pour aider leurs projets.

« Vous n’auriez pas de cas de conscience ? Il me semble que vous étiez camarades de promotion … » Brave Arthur, à la formulation franche. Elle avait écarté le sujet d’un revers de main. « Je mettrai toujours en premier lieu les intérêts du monde magique. » Il y avait vu quelque chose d’encourageant, sans doute parce qu’il n’aurait pas été rassuré qu’elle prétende penser d’abord à la sauvegarde du Ministère de la magie. L’employée, elle-même, était assez contente : elle n’avait pas eu à promettre le scalp de Lemony ou autre serment au Ministère. Arthur en saurait assez sur leurs travaux, et pour la paix des ménages, elle voulait bien cacher deux ou trois loupés éventuels.

Non pas qu’elle n’accorde pas confiance à son ami de Poudlard – mais enfin, on sait comment sont les inventeurs et les grands génies. Le célèbre détective qui porte son patronyme n’est rien de plus qu’un prétentieux si on exclut son fidèle Watson. Ainsi vont le fantasque Blake et Mortimer, et à l’évocation de ce duo de personnages, elle préféra arrêter les comparaisons qui flattaient si peu son ego. Encore que, ce serait intéressant de voir si Lemony parle des saintes culottes de Mc Gregor – ou de qui que ce soit d’ailleurs.

Arthur soupire en regardant la pendule et en espérant surprendre leur invité en flagrant délit de manque de ponctualité. Diplomate toujours, Lizzie feint de trouver passionnante une circulaire prise dans le tas de papiers sur son bureau qu’elle intitule pour elle-même « faute de mieux », paperasses qui passent après tout le reste et lui permettent de donner cette image de zèle attentif. L’image dont elle espère qu’elle lui attirera une promotion si que ce soit d’autre qu’Arthur vient dans ce bureau, ou qui lui permet de dire qu’elle est trop occupée à tout éventuel importun – le garçon avec de l’acné sur tout le visage du département des sports, Erin, tout le monde, quoi.

Elle se redresse en entendant les coups frappés à la porte, et déjà la voix grave d’Arthur invite leur visiteur à entrer. Un sourire discret à Lemony, accompagné d’un hochement de tête. Dans le dos du responsable du bureau, Lizzie a le temps de jeter un œil à son ami. Il semble en forme, mais elle jurerait qu’il est nerveux. La poignée de mains lui semble, au mieux, protocolaire. Un effort, messieurs. Elle aimerait ne pas assister à un combat de coqs. Surtout qu’elle n’a pris de paris avec personne.

Je ne pense pas que vous … manque de la faire lever. Lemony se reprend, peut-être a-t-il senti son regard noir. Elle lui en dira deux mots, mais le reste de l’échange lui semble s’étirer très désagréablement. Elle donnerait des gifles à Lemony pour brandir un livre scolaire comme à un de ses étudiants. Et quoi encore, il va se plaindre de n’avoir pas assez de vacances dans l’année ? Râler contre le programme scolaire ? Mais grand Dieu, y a-t-il plus  prof comme attitude que d’arriver avec un livre scolaire qu’on donne à un adulte ?

Il est insortable. Elle en touchera un mot à son père.

Pour la forme, Arthur lui glisse quelques mots pendant que Lemony (in-sor-ta-ble) a déjà le dos tourné. Elle se plie à l’exercice, les mains jointes devant elle, l’air grave. « Soyez assuré que je vous tiendrai au courant des développements. » promet-elle en récupérant la clé. Arthur lui indique le bureau A39. Elle sort en prenant soin de refermer la porte et lève déjà les yeux au ciel lorsque Lemony se plaint d’Arthur. « M. Weasley connaît son métier. » qu’il est d’ailleurs le seul à souhaiter exercer, mais elle est diplomate, neutre. Il y a des oreilles qui traînent dans ces couloirs, par exemple la belle brune de la salle des mystères qui traîne un peu trop autour des machines à café. D’un signe de tête, Lizzie invite son ami à la suivre -il ne s’y retrouverait pas dans le dédale de cet étage. Il lui faut d’ailleurs toute son énergie pour retrouver le chemin le plus court et écouter le flot de paroles qui semble se déverser sans interruption. Il était si bavard à Poudlard, déjà ?

« Tu sais, Lem, ça ne me dérange pas qu’on fasse un peu plus de contrôles sur la magie. Dommage que ça commence par-là, mais on ne me fera pas penser que confier des armes létales à des gamins prépubères est une brillante idée. »

A onze ans, elle choisissait encore des ensemble – avec un goût assuré – pour ses Barbies. Le chemisier blanc et le jean sans histoires qu’elle porte ne laissent rien deviner du goût qu’elle avait pour les habits des années soixante-dix. Une bonne chose en revanche qu’on leur ait fait porter l’uniforme. Elle s’écarte pour le laisser entrer, maintenant que la serrure s’est poliment inclinée. La décoration rouge lui semble dûe au même manque de goût criant des sorciers pour tout le reste – personne qui apprécie le velours côtelé à sa juste valeur, par exemple. Pas une surprise. Tandis que Lemony décide d’utiliser son appareil, elle retrousse ses manches pour lancer un sort de modification des couleurs. Le but : affadir ce rouge. Le résultat, bon, le résultat est ce qu’il est, et elle préfère s’intéresser à ce que fait Lemony. Sans gêne, elle prend même l’initiative d’examiner le sac dont il a tiré le premier bidule, là, la thérémine. « Ca te sert à quoi, tout ça ? Tu vas mesurer la magie dans le coin et ensuite ? Par quoi est-ce que tu commences ? J’ai appris que tu avais eu le feu vert de Granger, mais ça ne m’éclaire pas sur la suite. Tu sais, je ne compte pas cafter les déboires éventuels, mais je vais avoir besoin de connaître la direction de tout ça. Je peux utiliser ce truc ? » demanda-t-elle en agitant un objet.[/i]