hiboux : 194 pictures : | Ven 1 Mai - 16:43 | Daphné Salomé Greengrass Crin de Sombral Nom Greengrass – famille de Serpentard depuis des générations et des générations, les patriarches Malfoy et Greengrass s’opposaient pour savoir qui des deux étaient les vrais Verts. La répartition d’Astoria à Serdaigle avait fait grincer des dents. ; Prénoms Daphné, comme la fleur, mais surtout comme la nymphe poursuivie par Apollon. Pas poursuivie, ma douce, murmurait leur mère, il l’aimait. Un amour fou, un amour magique – et ses yeux d’enfant brillaient, alors, de cet amour que même les plus fortes des plantes ne pouvaient apaiser. Elle l’avait cherché, dans le coeur de Blaise, mais avait dû se rendre à l’évidence. Cupidon ne les avait pas choisis. Salomé – prénom biblique, important aux yeux de sa mère, qui jamais ne se serait doutée qu’un jour, sa fille aussi, demanderait une tête sur un plateau d’argent ; ge 24 ans à la fin du mois ; Date de naissance 28 février 1980 – les daphnés du jardin, fleurissant d’ordinaire au début du mois, avaient pris du retard cette année-là, tourmentées par le froid glacial des terres d’Exeter. À son premier cri, pourtant, quelques bourgeons s’ouvrirent ; le père Greengrass n'avait pu que s’incliner, elle sera nommée Daphné. ; Lieu de naissance Demeure Greengrass, terres familiales sur le domaine d’Exeter – le manoir fut vendu à Gringotts, après l’assassinat d’Astoria. Elle vit à présent dans un appartement londonien, à double niveau et incartable, où un atelier de distillation occupe l'étage ; Signe astrologique Poisson – femme sensible, femme rêveuse ; Nationalité Anglaise, née à Exeter ; Statut Civil célibataire, devait être promise au premier fils Flint, mais l'idée ne fit pas suite ; Préférences sexuelles Elle aime les hommes, évidemment. Comment pourrait-elle penser à autre chose qu’aux hommes ? ; Statut du sang Sang des plus purs, les Greengrass sont des 28 familles qui trônaient dans les hautes-sphères ; Tradition Hermétique de son père, bien que sa mère, française sang-pure, élevée parmi des Choeurs Célestes mais qui n’avait plus utilisé que sa baguette depuis de longues années, lui avait toutefois transmis la parole de Dieu ; Baguette ou autre focus 22 centimètres et demi, en bois de noisetier – sorcière empathique –, et coeur de plume de phénix ; Patronus n’avait jamais réussi à en formuler un qui soit matériel – peut-être n’avait-elle pas de souvenirs assez forts ; Dons aucun ; Pouvoirs aucun ; Particularités mezzo-soprano, Daphné chantait tous les Noël pour la paroisse de sa mère, jusqu’au début de la guerre – elle connaît par coeur le rôle de Angharad, amoureuse au coeur brisé dans l’opéra favori d’Astoria, The Damned Dancers – elle ne croit plus en Dieu, mais va chaque dimanche à la messe de la paroisse maternelle Activité Professionnelle, études, métier, autre Rentière, Daphné n’a pas le besoin de travailler. Elle s’est passionnée pour les plantes, pourtant, pour l’odeur florale qu’elles dégagent, et pendant sa septième année, passée loin des terres anglaises aux côtés d'un précepteur, elle a rencontré un maître parfumeur. Leur chemin se sont liés, quelques longs mois, jusqu'à l’été 99. Depuis le début du nouveau millénaire, elle a lancé ses propres produits, dont elle sélectionne de plus en plus la clientèle qui se déchire ses collections, exclusives. Son parfum de lancement, pensées., est sorti au printemps 2000, et affole toujours les ventes. CARACTÈRE / ANECDOTESEnfant sage, Daphné répétait patiemment les mots de français que sa mère leur apprenait, comptait avec agilité les jetons de bois, leur précepteur leur offrant des bases d’arithmancie, et récitait l’histoire de la magie sans broncher, y trouvant même, parfois, un intérêt. Elle ne devenait qu’un peu plus folle quand, lâchée aux heures creuses avec Astoria, elles allaient courir dans les jardins, plonger dans les fleurs, et faire des rondes de soeurs. Douceur glaciale, la jeune femme n’accordait ses sourires qu’à ceux qui savaient mériter son attention, laissant reposer sur ceux qui ne l’intéressaient pas des orbes méprisantes, d’un gris sévère. Elle se tenait avec droiture, ses gestes très doux, mais sa voix était dénuée des douceurs qu’on aurait aimé l’entendre susurrer. Ça lui donnait un côté inaccessible, reine maîtresse, dans lequel elle se complaisait bien, car il lui évitait des ennuis non-nécessaires. Innocente désillusionnée, Daphné avait longtemps tenté de conserver ses oeillères, sombrant dans une addiction cachée, philtres apaisants relaxant ses pensées. Elle ne voulait pas se confronter aux réalités, préférant la douceur des bras de Blaise, les rires de ses amis, ignorant les morts qui s’enchaînaient, les crimes qui s’accumulaient. Désillusionnée, toutefois, car basculée dans une famille politisée, elle avait senti les mots lui échapper, ses pensées se faire plus radicales, et s’était par conséquent vue confrontée à l’horreur dans sa plus belle forme. Le décès d’Astoria en faisait une femme à fleur de peau, contrôlant moins bien la froideur dans laquelle elle se réfugiait lorsqu’elle était mise nez à nez à ceux qui lui donnaient des sueurs. Il ne lui suffirait que d’une action, d’une parole, d’un camp ou de l’autre, pour que sa danse vengeresse ne se déclenche. Croyante en déni, Daphné aurait aimé se réfugier dans l’équilibre prôné par sa mère, aurait aimé s’abreuver des principes célestes, et si elle se rendait, chaque dimanche, à la messe sacrée, elle n’arrivait toutefois plus à mettre de la foi dans ses Amen. En discussion avec des hommes de la paroisse, elle aimerait pourtant se recentrer, pour oublier sa colère, oublier sa peine, puiser dans sa voix pour se pardonner ce que ses mots l’avaient menée à voir. Amoureuse des arts nobles, particulièrement de la musique, qui régnait toujours en maître dans son atelier – elle était persuadée qu’un juste choix de chanson l’aidait à affiner son nez, ses choix de parfums, et son humeur générale. Elle allait souvent à l’opéra, les étés, mais cette passion, qu’elle partageait avec Astoria, l’avait quittée depuis ce mois de Septembre. Elle n’avait pas non plus chanté d’airs italiens, les préférés de sa soeur, depuis cette date.
CURRICULUM VITAE
En effet dès qu'humidité et chaleur se sont mélangées, il y a conception : tout naît de ces deux éléments, et bien que feu et eau soient ennemis, la chaleur humide crée tout, et la concorde en désaccord avec elle-même est apte à procréer.
La voix de Mme Greengrass était douce, aussi légère que les brins d’herbe qui se glissaient sur la peau de ses filles, quand elles couraient dans les jardins. Chacun de ses mots semblaient emplis de l’amour qu’elle leur portait, de la tendresse qu’elle leur vouait. Ses paroles roulaient jusqu’au creux des oreilles des enfants, qui dormaient lovées l’une contre l’autre, cheveux bruns s’emmêlant dans cheveux blonds, alors qu’Ovide était conté, susurré en français. La voix de Mr Greengrass grinçait bien davantage ; elle retombait avec froideur contre les tempes des demoiselles, qui fléchissaient des genoux sous la mauvaise humeur paternelle. Ce n’est pas qu’il n’aimait pas, tout aussi tendrement que son épouse, les deux fleurs qui prenaient racines dans leur famille, c’était qu’il craignait pour elles. Ses mots étaient durs contre l’épouse, venant assécher la passion de ses mots contés, quand elle tentait d’inculquer les notions d’amour et de quêtes à ses toutes belles. Depuis le pas de la porte, Gareth, donc, grinçait des dents, et rappelait que Daphné se faisait pourchasser par Apollon, qu’elle finissait métamorphosée en arbre, vouée à accepter l’amour non souhaité du dieu. Il semblait lire, dans ce conte adoré des enfants, toute l’impossibilité d’échapper à leur condition. La flèche qui avait frappé Daphné en plein coeur, c’était celle qui liait leurs ancêtres à ce cycle maudit où, là encore, aucune herbe, aucune potion, aucun sortilège n’avait su soulager leur sang de ces maux. Quand sa mère avait cessé de les border, l'âge sage arrivé, elle se faufilait, Daphné, dès que son père détournait les yeux, contre le corps chaud de Madeleine, pour lui demander encore et encore l’histoire de Daphné et Apollon. Elle la connaissait par coeur, à cet âge-là, l’ayant suffisamment entendue pour que les mots lui restent gravés en tête. Rien ne valait, pourtant, la diction douce et chaleureuse de sa mère.
Le fils de Vénus lui répond : « Ton arc a beau tout transpercer, Phébus, mais le mien peut te transpercer, toi – »
Le murmure de ce conte fut expressément interdit, seulement, le jour où les daphnés du jardin fleurirent pour la septième fois depuis sa naissance – la jeune enfant s’était évanouie. Les bronches prises, le corps fiévreux, elle était restée des semaines alitée, et sa soeur cadette n’avait pu que garder silence, yeux dardés sur elle, tandis que foule d’hommes inquiets s’affairait aux côtés de la malade. Ils jugèrent que c’était son nez – elle était trop sensible, chaque odeur lui remplissait les narines, lui tournait la tête. Elle sentait l’amertume de l’orange pelée, la sueur derrière les oreilles du médicomage, le bois humide qui crépitait mal dans l’âtre. Tous les mois, après cette journée, un homme à la barbe grisonnante venait prendre des fioles de sang, des mèches de cheveux, et agiter sa longue baguette de bois foncé auprès de leurs tempes. Le père Greengrass restait droit, debout, à leurs côtés, tandis que la mère Greengrass quittait de moins en moins sa chambre. Mr et Mme Greengrass ne se parlaient plus, depuis. La panique absurde du père, héritier du sang Greengrass, qui traquait le moindre geste de leurs enfants, qui vérifiait chaque jour leurs constantes, qui s’assurait qu’elles soient des plus préparées. On leur apprenait le bon maintien, le bon parlé, les bonnes étiquettes, certes, pour briller parmi les leurs, mais Gareth n’y importait que peu d’importance. Il ne croyait pas en les délicatesses de sa fille – c’était leur sang, forcément. Leur sang maudit. Il s’acharnait alors plus particulièrement à ce que ses enfants soient dotées de notion de magie protective et offensive, au grand dam de Madeleine, qui confiait bien volontiers l’avenir de leur famille aux décisions de son Dieu. On ne peut échapper à une malédiction, répétait-elle, de plus en plus lasse, quand Gareth jurait par la vigilance constante. Peut-être Mme Greengrass aurait-elle dû écouter Mr Greengrass, car à l’aube des dix ans de son aînée, son coeur s’arrêta, et jamais plus Daphné ne put entendre les vers d’Ovide murmurés.
Vigilance constante. Ce sont ces mots qui guidèrent les moindres gestes de l’aînée Greengrass, quand elle s’aventura pour la première fois sur les terres écossaises. Daphné célébra ses onzes ans, lettre de Poudlard entre les mains, avec la pensée affolée qu’elle n’allait pas pouvoir contrôler sa santé aussi bien, là-bas. Il avait fallu l’agacement du patriarche Greengrass pour que son père la laisse rejoindre les dortoirs de Serpentard. Chaque soir, elle lui écrivait une missive, le rassurant de son état de santé. Ses premières lettres, expansives, notaient avec sincérité les chutes de tension, les quelques toux d’automne. Puis, l’âge la gagnant, elle se lassa de cette lubie paternelle, préférant la facilité des yeux détournés de sa mère, qui ne croyait plus en cette malédiction. Elle était tombée malade, une fois, jeune enfant – c’était tout. Son nez s’était accoutumé aux odeurs par millier, ou du moins son esprit s’y était fait. Quand Astoria avait rejoint l’établissement, ses pieds foulant les couloirs bleu et bronze, Daphné avait tout à fait cessé ses courriers.
Séparée de sa soeur, qui ne l’avait pas quittée d’un pas depuis sa naissance, et bien qu’elle moquait tout bas combien elle cherchait tant à l’imiter, se parant des mêmes robes pâles qu’elle, des mêmes rubans dans les nattes, la jeune Daphné réalisait pourtant combien elle dépendait de la présence rassurante d’Astoria. Leur vie à deux avait rythmé toute son enfance – des jeux partagés, des contes murmurés, aux rires enfantins face aux recommandations du paternel, à la douleur d'une mère perdue. Quand elle franchit le dortoir des Serpentards, se glissant d’un pas toujours aussi lent, toujours aussi contrôlé – vigilance constante, n’alertons pas le coeur pour rien – parmi les autres demoiselles, le sourire de Daphné était plein de l’innocence d’une enfant cherchant une amicalité sincère.
De son carquois empli de flèches, il tira deux traits aux effets opposés, l'un chassant l'amour, l'autre le faisant naître.
Cette tranquillité demeura le premier mot qui vint aux étudiants qui l'entouraient, pour décrire l’aînée Greengrass. Son corps s’était allongé, mais toujours elle conservait cette grâce tranquille lorsqu’elle se déplaçait. Ses gestes étaient mesurés, ses rires résonnaient clairs, et ses yeux bleus couvaient avec intérêt quiconque savait lui offrir une conversation un tant soit peu relevée. Ils tournaient au gris, quand la lassitude la prenait, ou que la colère lui montait. Sa colère était froide, de celle qui glace le sang, et sa voix s'élevait trop fort, dans ces moments-là, elle qui parlait si bas. Elle était douce, donc, l’aînée Greengrass, et se complaisait dans ce rôle d’innocente aveugle aux soucis du monde qui l’entourait. Elle soupirait, agacée, quand Drago suggérait une fois encore de moquer Granger – pas qu’elle ne le méritait pas, enfin, c’était une sang-de-bourbe, mais il fallait avouer que c’était lassant, toujours. Elle n’avait pas rejoint la Brigade, se refusant à cet exercice trop prenant, et qui l’aurait obligé à prendre conscience de choses. Elle s’y refusait, détournant volontairement les yeux.
Elle ne comprenait pas, non plus, toutes ces années durant, l’enthousiasme feint de Pansy, qui aurait bien pu hocher la tête à tout ce que proposait le fils de la famille Malefoy. Ils traînaient ensemble, tous, groupe royal des tables vertes et argents. Daphné la reine des glaces, trop tranquille, Pansy la tête forte aux mots qui cognent, Blaise le silencieux au regard trop railleur, et Drago, forcément, Drago Malefoy. Peut-être était-ce un héritage de leurs patriarches qui ne s’étaient jamais aimés, mais les deux sang-purs se vouaient une affection cordiale. Peut-être était-ce aussi parce qu’elle n’aimait pas voir son amie ainsi amourachée d’un homme qui ne la regardait pas. Devant ses yeux semblaient se tisser le mythe de Daphné et Apollon – Pansy chassant éternellement un homme qui ne la voulait pas – et malgré toutes les herbes qu’elle pouvait piler, tous les mots rassurants qu’elle pouvait lancer, rien n’arrivait à atténuer la tristesse de cette situation. Peut-être était-ce, aussi, parce qu’elle avait réalisé comme son ventre se nouait, quand Pansy se teignait en blonde pour plaire au prince des serpents.
Le bal de cette année-là, elle y avait été avec Blaise. Il n’y avait pas eu d’autres bals, après cette année, car tout n’avait fait qu’empirer, mais la jeune femme avait définitivement oublié ce noeud dans le ventre en fondant ses doigts contre ceux du basané. Il sentait fort, plus fort que les autres, et Daphné s’imaginait que c’était parce qu’elle l’aimait. Blaise avait l’avantage d’être tendre et semblait prendre plaisir à préserver ses oeillères. Il lui faisait oublier le corps mort de Cédric Diggory, ce héros de Poufsouffle, qui la réveillait en sursaut chaque nuit. Elle voyait sa peau livide, ses yeux révulsés, son père qui hurlait à la mort. Sa douceur les lui faisait oublier. Il distrayait Daphné, quand Drago se faisait de plus en plus irascible, de plus en plus odieux, se réfugiant en solitaire Dieu seul savait où. Il l’embrassait, au bout du nez, quand Drago parlait de Durmstrang, du Seigneur des Ténèbres, des choses qui se pressaient. Il lui attrapait les mains, lui attrapait le visage, et gommait toute traces d’inquiétude de ses traits. Daphné s’y laissait aller, pour oublier ces mots. Elle se complaisait, nous l’avions dit, dans ce rôle d’innocente aveugle. Elle ignorait les maux de corps de Pansy, elle ignorait les cernes effarantes sous les yeux de Drago. Plus tard, encore, quand le monde aura basculé, que son père lui enverra des courriers pour la conjurer de ne s’impliquer nulle part, Daphné mimera un désintérêt total. Des potions dégluties, négociées par tendres sourires auprès du Professeur Slughorn, lointain parent, permettaient d’apaiser son esprit, qui jamais n’arrivait à se focaliser sur les horreurs alentours.
Ça les inquiétait, cette volonté de rester muette face au monde qui se déchirait, cette fausse candeur qu’elle s’acharnait à afficher. Ils ne devinaient pas, cette habitude aux flacons engloutis, qui ne pouvaient que soulager tous les maux d’un esprit qui cherchait à s’aveugler, mais ils comprenaient l’absurdité de son comportement, et c’était bien assez pour les embêter. Astoria, Blaise, son père – tous fronçaient des sourcils. Au fil des mois, alors que les Carrow faisaient leurs lois, que les nés-moldus se tordaient sous les Endoloris, qu’Harry Potter n’était plus qu’une prière oubliée sur les lèvres des Résistants, Blaise ne put plus supporter cette naïveté insolente. Il y eut des cris, des épaules secouées, l’envie de lui ouvrir les yeux. Peut-être était-ce ces gestes, le sang maudit des Greengrass, ou toutes ces potions trop consommées, mais Daphné s’évanouit, encore. C’était sa deuxième grosse crise, et dix ans avaient passé.
Gareth Greengrass n’avait pas apprécié la disparition des lettres de sa fille, au fil des ans, rongé par cette paranoïa affreuse, qui ne semblait faire que grossir depuis la mort de son épouse. Peut-être se rassurait-il des courriers qu’envoyait parfois la cadette, ou des longues sessions près de médicomages spécialisés, à chaque retour de vacances, car il taisait ses angoisses à ses héritières. Quand elle s’écroula, pourtant, la douce Daphné, les courriers fusèrent. On retira la future adulte de Poudlard, peu après Noël, consignée à domicile. Son père, qui glissait sommes timides entre les mains des serviteurs du Seigneur des Ténèbres, repoussait les demandes plus pressantes, en prétendant l’inquiétude sévère pour sa fille. Il le sentait, Daphné était maudite, le mal la suivait. Jamais n’aurait-il pu s’imaginer que ce serait la cadette, fougueuse brune au regard pétillant, qui s’écroulerait assassinée. Il n’aura pas à subir cette désillusion, son corps à lui s’écroulant à l’aube du printemps de cette année. Daphné ne s’était jamais questionnée, concluant à une mort naturelle – l’âge, vous comprenez, vieillissait son pauvre père. Son corps rejoignit celui de Mme Greengrass, dans le caveau familial, et Daphné claqua des doigts, pour faire disparaître d’un ordre tous les spécialistes qui cherchaient en vain l’origine de son mal.
Elle ne regagna pas Poudlard, car déjà les hurlements retentissaient dans les couloirs de son école, les sortilèges fusaient, la guerre culminait. Daphné s’enferma au domicile familial, terrée dans sa verrière réchauffée, plongeant le nez dans les plantes qu’elle s’archarnait à y faire pousser, soupirant de leurs douceurs. C’est Blaise, qui revint la voir en premier, le Ministère était tombé. Elle s’en détourna, refusant de l’écouter. Elle n’avait pas pris parti, contrairement à lui, à eux tous, car elle s’y était refusée. Elle les savait se battre, se faire du mal, et s’était abrutie de potions pour ne pas le réaliser véritablement. Alors elle ne voulait rien savoir, rien entendre. Ce fut l’unique fois où elle se disputera avec Astoria, qui la traitera d’inconsciente. Blaise ne remettra plus les pieds chez elle. Ils ne comprenaient pas, comme cela l’angoissait. Ils ne saisissaient pas, combien elle ne pouvait que survivre comme cela, en oubliant tout ce qui n’allait pas. Elle ne voulait pas réfléchir à ce que deviendrait le monde, peu importait si Potter gagnait, ou s’il perdait – tout changerait, tout se compliquerait, et l’anxiété ne faisait que lui serrer la gorge quand elle y songeait. Alors elle retourna ses malles, retrouva des flacons, et pila des bouts de plantes pour créer ces élixirs apaisants, encore.
Bien des prétendants l'ont courtisée ; mais, sourde à leurs prières, ne supportant pas de connaître un époux, elle parcourt les bois profonds, et ne se soucie ni d'Hymen, ni d'Amour, ni d'union conjugale.
Astoria avait fait le choix de quitter le pays, mue d’un désir de s’éloigner de Daphné. L’aînée s’était sentie tomber, quand elle avait reçu son courrier. Sa cadette n’avait pas pris la peine de le lui dire de vive voix, et c’était un premier coup donné à l’écran de verre que Daphné s’acharnait à monter, pour se protéger. Elle était seule, dans la demeure familiale, et le silence était plus odieux encore que la peur qui lui nouait le ventre. Elle chantait, alors, pour occuper l’espace, pour soutenir les plantes, pour se dégager l’esprit. Des airs italiens, certains anglais, quelques uns français – elle chantait, pour oublier. Elle chantait encore, au milieu des champs de lavande, quand le maître parfumeur grondait qu’elle n’avait plus que quelques semaines, pour finaliser son projet. Elle chantait, car elle avait échappé à la société anglaise qui se déchirait, qui tentait de créer quelque chose. Elle ne voulait pas voir cela, alors elle avait fui, elle aussi. Loin de Blaise, loin de Pansy et loin, si loin, des Malefoy. Elle était représentante des Greengrass, à présent, et ils auraient aimé l’avoir près d’eux, pour lui faire prendre des décisions. Non, excusez-la – elle chantait, elle était confuse. Ils la voulaient près d’eux, pour puiser dans ses fonds. Les fonds Greengrass qui, gelés au Royaume-Uni, attendaient son retour. Elle avait payé moultes amendes déjà, mais son père n’avait jamais trop participé à l’effort de guerre, et déjà décédé, ils n’étaient pas des familles qui leur valaient le plus d’efforts. Elle s’était échappée, donc, des cursus traditionnels, de tout ce qui pouvait la relier au reste. Elle avait plaidé sa santé fragile, pour demander un précepteur. Plus d’écoles, plus de monde face à qui porter ses oeillères, trop prompt à la juger. Barricadée dans une vieille maison de vacances, sur le bord de plage méditerranéen, Daphné avait passé les mois suivants à humer les parfums des fleurs, à se ravir des fragrances nouvelles. Ses doigts, peu à peu hâlés, envoyaient mille courriers à sa cadette, la priant d’une réponse, une seule, pour apaiser son coeur. Elle restait tûe, pourtant, alors Daphné s’oublia plus fortement encore dans cette vie nouvelle. Entre apprentissage habituel, semblants de préparations aux ASPICs, et autres banalités de vie, son précepteur lui avait toutefois permis de s’engager vers un art nouveau, qui lui faisait tourner la tête. Il avait repéré son nez, et s’était moqué de son père qui n’y voyait qu’un reliquat de malédiction. Il n’avait rien compris – lui, si. Elle passa alors de longs mois aux côtés de ce maître parfumeur, rencontré par le biais du précepteur, à distiller les arômes qui enchantaient ses narines. Les matinées étaient dédiées aux études, le reste de ses journées aux dilutions et préparations. C’était si facile, de s’oublier dans un monde d’odeur. Elle pouvait y associer des souvenirs, des moments heureux, plutôt que de plonger dans l’angoisse du présent. Ça, l’odeur de la nuque de Blaise. Celui-ci, le parfum des fleurs quand elles allaient s’allonger dans l’herbe du parc, avec Pansy, à échanger tendresses amoureuses – concernant leurs amants, évidemment. Celui-là, l’odeur des pensées, pour tous les rires partagés – et ses regards à la dérobée. Elle goûta sa première fleur, cette année-là, mais la honte lui retourna le coeur.
Elle n’avait pas encore remis les pieds au Royaume-Uni, quand Astoria la recontacta. Reviens, maintenant, pouvait-elle lire. Sa soeur était rentrée, et la demeure vide lui avait pesé sur le coeur. Elle n’y resterait pas longtemps, reprenant le chemin de Poudlard dans quelques semaines, mais Daphné ne pouvait ignorer son appel. Pas enfin, pas quand contactée, après tous ces mois de silence. Alors, trop faible face à toutes ses demandes – toutes celles qui ne soient pas de guerre –, Daphné plia bagages, et rejoignit les terres ancestrales. On ne lui reprocha pas ouvertement de s’être enfuie – elle était une femme, elle était faible, mais elle était rentrée, maintenant, et son doigt attendait alliance. Elle les fit patienter, sourire tranquille, souhaitant mettre de l’ordre dans leurs affaires, vous comprenez.
ainsi le dieu s'est enflammé ; totalement embrasé, il espère et entretient dans son coeur un amour stérile.
La demeure Greengrass était enfumée, seulement, de mille distillations, de préparations dans lesquelles elle se plongeait toute entière. Elle ne frissonna qu’à peine, en apprenant le retour d’Harry Potter, et songea que l’ère des sangs-purs allait s’effondrer. Il n’en fit rien, pourtant, regagnant une tranquillité suspecte, et la jeune femme s’en contenta. Elle n’assista à aucun procès, détourna les yeux quand le nom de Zabini fut condamné, et se murmura des il n’était pas vraiment de sang-pur, de toute façon. Il n’était pas celui pour elle. Il était un il, aussi. Le souvenir de la fleur goûtée secouait ses pensées, alors que lettres de fiançailles pleuvaient. Elle était une jolie vierge, à leurs yeux, droite et froide, aux gestes emprunt de calme, et les comptes familiaux savaient lui donner de bien doux avantages encore. Des oeillères, toujours plus d’oeillères, et surtout, ces parfums qu’elle continuait de concocter. Elle fit tester des premiers flacons, et son pensées. eut un succès fou. La jeune femme dû faire quelques sacrifices, certaines nées-moldues s’octroyant le droit d’un parfum Greengrass. Quand Astoria remit les pieds à Exeter, notes brillantes en main, ce fut surtout un anneau fin qui attira le regard de la soeur aînée. Ses oeillères venaient de tomber, et elle manqua de tout faire valser.
Le fils Malefoy. Drago Malefoy. De tous les garçons, dont elle aurait pu se pâmer – le prince des verts. Daphné pinça les lèvres, voulut refuser. Comment l’aurait-elle pu ? Astoria déjà, ne quittait pas les bras de Drago. Elle s’était longtemps imaginée que Drago avait fait cela pour se venger, lui voler sa soeur pour la condamner d’avoir fui, d’avoir si longtemps tentée de ne rien voir. De ne pas voir, comme il se détruisait, pendant leur sixième année, comme ses yeux appelaient à l’aide. Elle avait détourné le regard, comme elle détournait les yeux des regards aimants qu’ils s’échangeaient, la bile lui gonflant la gorge. Plongée à présent aux côtés de cette famille trop politique, si investie, Daphné ne put que retirer ses oeillères, et darder un regard glacial sur le monde. Le ministre est mort ! Vive le Ministre ! Le Ministre est vivant ! Vive le Ministre !
Les endroits où tu passes sont difficiles ; cours moins vite, je t'en prie, refrène ta fuite ; moi-même, je suivrai plus lentement.
Les années qui suivirent furent une virevolte de tourmente. Ses collections s’enchaînaient, une par saison, l’union d’Astoria et Drago semblant avoir apaisé les hommes aventureux de l’épouser. S’unir à elle, finalement, c’était accepter des liens importants avec ces voix contestataires. Ces voix qui grondaient, aux propositions de réforme du ministre, des réformes qui lui donnaient le tourni, à elle aussi. Elle commença à parler, Daphné, à souffler combien c’était absurde. Elle commença à hocher de la tête, devant les murmures engagés de Drago. Elle ne détourna pas les yeux, cette fois-ci, des procès de Mangemorts, lèvres pincées. Astoria suivait cette transition, aussi abrupte qu’espérée, et priait toutefois que Daphné ne s’y perde pas. Elle n’avait pas touché à ses potions apaisantes, depuis l’union de sa soeur et Drago. Elle s’était acharnée à ouvrir les yeux, et sa bile se faisait de plus en plus amère. Les années passées à se détourner des horreurs lui remontaient à l’esprit, et elle débordait d’un trop plein de choses à dire. D’abord, ce fut à Astoria, des envolées plus extrémistes, qui déstabilisaient la cadette. Puis, à ceux qui voulaient bien l’entendre, singeant les décisions du Ministre, la catastrophe qu’il faisait courir sur leur ordre si bien établi. Elle sortit un parfum nommé Larmes Royales, à la douce odeur de fleur de lys, au printemps du code des sangs-purs, et joignit une copie de la lettre ouverte de Narcissa Malefoy à chaque envoi. Certaines ventes chutèrent, cette saison-là. Elles chutèrent un peu plus, quand la famille Malefoy déclara les Terres de Feux.
C’était une vie étrange, maintenant qu’elle s’ouvrait aux angoisses. Elle se souvenait murmurer à Blaise que ça ne serait que horreur, si elle se laissait aller à réaliser tout ce qui arrivait au monde. Peut-être aurait-elle dû continuer à suivre cette voie innocente, ce chemin bordé de barrières. Elle n’aurait pas vu, alors, le corps effondré de sa soeur, sur le sol du Ministère, visage tordu par l’horreur, mains prostrées sur son ventre. Elle n’aurait pas vu son corps descendre sous terre, enterrée parmi les siens, et les condoléances surfaites des gens de la haute. Elle n’aurait pas entendu ces cris, ces Potter ! qui fusaient, cet avada kedavra fatal. À la fin de la semaine, Daphné s’était volatilisée des terres de feux. La demeure familiale avait été vendue à Gringotts, gonflant plus encore les mornilles dans les coffres scellés. Ses phrases semblaient l’avoir abandonnée, sa force l’avait quittée, et peut-être Daphné aurait-elle pu se laisser partir, si la colère n’avait pas succédé à la torpeur.
La colère contre cette guerre, qui lui avait gâché tant d’années. Les années de jeunesse, abruties par les potions calmantes ; les années d’indépendance, loin des bras aimés ; les années présentes, qui lui ont ôté sa soeur. Sa petite soeur. La chair de son sang, l’enfant qui se lovait contre elle, quand leur mère contait sans fin Ovide. La colère, contre sa folie, à elle, d’avoir cherché à s’y mêler, d’avoir imaginé que cela aiderait sa soeur, sa famille, la vie nouvelle qu’elles devaient se créer. La colère, qui lui dévorait le ventre, lui nouait la gorge. La colère – et les pleurs, pour oublier. Elle collectait ses larmes, en remplissait des flacons, les entassait au-dessus de ses parfums. Larmes pour elle, larmes pour moi, larmes pour ma sixième année. Chacun d’eux collectaient ses souvenirs, ces morceaux de mémoire qu’elle ne voulait plus voir vivre en elle. Elle s’abandonna à cette naïveté nouvelle, cette ignorance artificielle, terrée dans son atelier, à l’étage de son appartement. Elle s’abandonna, encore, à ses plantes, aux odeurs qu’elle contenait. Elle cherchait l’odeur parfaite – celle qui rendrait hommage, à Astoria. Des fois, elle l’appelait encore – Astoria, Astoria, viens voir, viens sentir. Elle s’immobilisait, s’effondrait, mélange de colère et de larmes trop acides, et collectait les gouttes. Son sourire lui revenait, et elle tendait les doigts vers ses chaudrons, reprenant ses mélanges. Tout allait bien.
Je suis l'inventeur de la médecine et, dans le monde entier, je suis réputé secourable ; je possède la maîtrise des plantes. Hélas pour moi, puisqu'aucune herbe ne guérit l'amour, mon art, utile à tous, est inutile à son maître.
Elle trouvait Drago laid, à plaider qu’il n’y était pour rien, au décès de sa soeur. Ils étaient responsables – parce qu’engagés, parce que vocaux, parce que ses hommes voulaient tuer Potter, pour eux. Pour leur cause. La cause qu’ils avaient si hautement clamé qu’elle serait bien, combien elle assurerait l’équilibre souhaité aux sangs-purs. Ils lui avaient pris sa soeur. Elle trouvait les hommes laids, aussi, à écrire mille pages sur Astoria, alors qu’ils ne la connaissaient pas. Plus encore, après, elle trouva Narcissa laide, à célébrer aussi ouvertement l’anniversaire de son époux, son meurtrier d’époux, quand le cadavre d’Astoria, de son enfant mort, par sa faute, se liaient encore tout juste à la terre anglaise. Elle vomit, en voyant l’image de Potter dévorant les chairs enfantines quand c’était eux, eux tous, qui avaient mené un enfant jamais né au cimetière.
Elle les trouvait tous laids, et elle voulait leur dire. Daphné savait contrôler les odeurs, seulement les mots lui échappaient bien davantage. Elle avait tenté des versions, couchant sur parchemin des lignes froides de hargne. Elle les avait rayées, l'une après l'autre, effrayée par les émotions qu'elle sentait gonfler en elle. Cette colère, qui n'avait fait que s'étendre, jusqu'à lui donner cette rage insensée.
Sorcières, Combien de soeurs, assassinées ? Combien d’enfants, n’ayant jamais vu le jour ? Combien d’actes, faits en notre nom, pour nous défendre, quand ils nous poignardent si aisément ? Voilà des années que cela dure. Des années que nous sommes attrapées, par ces paroles qui nous promettent une société sur mesure. Des années, que nos gens souffrent. Alors, sorcières – soulevons nos oeillères. Essuyons nos larmes. Agissons. Il nous faut choisir. La pureté de notre sang nous paraissait primordial – mais que vaut tout cela, face aux morts que nous essuyons, depuis des années, sous couverts de justice, de cause noble ? Potter est moderne, mais Potter ne tue pas.
Le courrier reposait sur son bureau, de sa calligraphie serrée, depuis de longues semaines. Ce n’était pas assez. Ou c’était trop, finalement. Elle savait seulement que ses mots étaient trop bruts, trop pleins d'une hargne non-réfléchie. Elle réalisait bien trop que cette ligne, sur Potter, scellerait trop de son destin. Seulement, les pleurs enfermés ne suffisaient plus à éteindre le brasier qui la minait. Même les potions, avalées par habitude, ne semblaient plus lui apaiser l’âme – elle avait cessé de les boire. Elle ne pouvait pas détourner, plus longtemps encore, les yeux de ce monde qui s’enflammait. Il lui fallait sa tête, sur un plateau d’argent. Récompense d’une danse, dût-elle être pour Saint-Potter.
FT. Brit Marling ; Pseudonyme Julia ; ge 22 ; Comment as-tu trouvé le forum ? i mean ; Un petit mot à ajouter ? c’est la faute à Lou. ; Ta fréquence de connexion souvent |
|