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Dies iræ | Moira & Melchior
 :: Salon de Thé & Bar à chats :: SAISON 1 :: RP

Melchior C. Fawley

Melchior C. Fawley
MEMBRE
hiboux : 189
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Jeu 30 Avr - 19:41

Dies iræ
Il est bientôt l’heure de déjeuner alors que j’entre dans l’ascenseur pour me rendre au cinquième étage, et déjà une certaine agitation anime les différents bureaux devant lesquels je passe. Ça discute, ça échange, ça n’est plus concentré comme ça devrait l’être – l’heure de la pause approche, et elle va être nécessaire aux bureaucrates et autres grattes papiers. Loin de partager l’enthousiasme de mes pairs, ma mine est grise, et arrivé à destination, dans le couloir désert, je lâche un long soupir. Le Département de la Justice Magique, probablement l’étage que je connais le mieux avec celui où sont mes précieuses archives. J’ai travaillé ici, il y a si longtemps que cela fait bien une quinzaine d’années que plus personne ne peut s’en souvenir, j’y étais brigadier. Parfois je me demande si je n’aurais pas aimé le rester, ne pas sombrer dans la haine et l’alcool et faire ma vie à cet étage, gravir les échelons, traquer les criminels… Travailler ici, et revenir ici pour les séances du Magenmagot. Non, finalement, ce n’est probablement pas plus mal d’être ailleurs, ça aurait peut-être fini par devenir trop. Ce sont les nouvelles indications qui me font soupirer aujourd’hui, car cet étage a bien connu un changement majeur ces dernières années : il accueille maintenant les bureaux du Ministre. Dans la situation actuelle, c’est presque ironique. Il voulait faire de la justice la priorité de son mandat, et il n’y a pas une âme parmi ses opposants qui ne soit pas en train de maudire son injustice – dont je me suis fait le bras armé le temps d’un procès. Est-ce qu’ils ont raison ? Est-ce qu’il n’est pas temps de donner des leçons de subtilités au trop jeune et trop arrogant Potter ? Est-ce qu’il écouterait le vieil homme des archives, l’oncle de Narcissa ? La question est entière, et je ne sais pas trop si je veux lui trouver une réponse tout de suite. Il faut que je sois certain de moi, et des positions que je veux prendre avant cela. Si seulement leurs failles n’étaient pas si grandes, si les torts étaient un peu moins partagés… Mais il n’y a pas de raison que ce genre d’épreuves soit simple, et il est des dilemmes qui doivent être douloureux. Je chasse d’un signe de main mes réflexions, je ne suis pas venu ici pour parler au Ministre de toute façon, j’ai en tête une compagnie bien plus agréable et sage que ce dernier. Je frappe à la porte et la découvre seule alors que j’entre. « Bonjours, Mrs. Oaks. » Je lui souris, poli, droit, un peu froid. Elle doit bien se douter du respect et de l’amitié qu’elle m’inspire, mais je ne suis pas du genre à me montrer démonstratif avec mes collègues. Je m’appuie sur ma canne. « Dis moi, accepterais-tu de prendre ta pause déjeuner avec moi ? Je pensais commander quelque chose au Dragon Gourmet puis aller manger aux jardins couverts... J’ai à te parler. » J’insiste sur ma dernière phrase. Nous n’avons pas eu tellement le temps de nous croiser ces dernières semaines – le procès de Lestrange l’occupe bien sûr, ce doit être quelque chose d’épuisant à préparer. Mais j’estime qu’après avoir accepté sans poser de questions de conduire celui de Bauer, elle peut bien m’accorder une ou deux heures de son temps pour échanger un peu. « Maintenant ? Après tout le monde prendra sa pause et il faudra attendre pour être servi. » Je suis un vieil homme, j’ai mes habitudes et je suis ici depuis assez longtemps pour savoir à quelle heure précisément il vaut mieux descendre pour minimiser l’attente. C’est un jeu auquel je jouais plus jeune avec Millicent Bagnold, avant qu’elle ne devienne ministre : nous devions nous retrouver avec notre repas en main à une heure précise, celui qui était en avance ou en retard avait perdu, celui qui courait ou lambinait pour tricher devait payer le prochain déjeuner à l’autre. A peine devenue Ministre, les troubles qui s’étaient mis à secouer l’Angleterre l’avaient empêchée de continuer à s’amuser ainsi aussi légèrement avec son archiviste. Je l’aimais bien, Millicent, je me demande ce qu’elle dirait de tout cela, ce qu’elle dirait de Potter. Mais l’heure n’est pas à penser aux vieilles amitiés, et reposant mon attention sur la présidente du Magenmagot, je lui offre mon bras.

« Ce n’est pas un cadeau que tu m’as fait Moira. »
Je plonge mon regard acier dans le sien, calme, mais un peu accusateur. C’est mon nom qu’on associe à cette mascarade – parce que c’est bien le terme que certains utilisent pour parler du procès. Et elle ne me fera pas croire qu’elle aurait renoncé à siéger elle-même si elle n’avait pas soupçonné quelque chose. Bien sûr, qu’il y a une récupération – mais était-ce vraiment possible de l’éviter dans le contexte actuel ? Faut-il pour autant laisser libres les criminels sous prétexte qu’accuser et punir arrange ou dessert ma nièce ou le Ministre ? Je voulais être neutre, et ne prendre position qu’en ayant bien réfléchi, sans me laisser aller à un jugement hâtif, sans laisser mon cœur prendre la décision au lieu de ma raison – alors j’apprécie peu que l’on voit ici une volonté de ma part de soutenir l’un ou de diminuer l’autre. « Ils étaient coupables. Pas nécessairement de ce que Potter les accusaient, mais ils étaient coupables. Ils ont mis la communauté sorcière en danger, ils ont confondu liberté d’expression et liberté d’injure… Alors pourquoi tu n’as pas plutôt guidé le Ministre au lieu de te mettre en retrait, et pourquoi tu m’as laissé diriger ce procès ? » Je crois que ce qui me terrifie le plus, c’est qu’elle m’avoue les avoir pensé innocents, c’est d’avoir été injuste à cause de la colère, du mépris qu’ils m’inspirent. Et si c’est le cas ? Ai-je vraiment envoyé un innocent pourrir un mois à Azkaban ? J’ai vraiment essayé de faire de mon mieux, j’ai vraiment essayé… Mon regard vers elle est presque devenu suppliant. Ce n’est pas le Lord fier s’adresse à elle, c’est le vieil homme épris de justice et dont le cœur est empli de doutes.

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Moira A. Oaks

Moira A. Oaks
ADMINISTRATRICE & MJ
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Sam 30 Mai - 18:00





mi-février 2004

Depuis quelques jours, Moira ne sort plus de son bureau. L’atmosphère au Ministère est trop lourde et ses responsabilités sont trop grandes pour subir quotidiennement les regards de tous ses collaborateurs qui la supplient de leur expliquer pourquoi elle a refusé de présider. Depuis le procès de Reißen le 11 janvier, le département de la Justice palpite. Il vibre au gré des rumeurs, des questions et des attaques personnelles. On se demande quel dossier a pu tenir la Présidente-Sorcière loin de son siège lors d’un procès aussi capital que celui-là. On se répète qu’elle n’a jamais abandonné ainsi ses fonctions auparavant, même pour des affaires bien moins cruciales et on raconte enfin que son absence est bien plus politique que pragmatique. Dans les couloirs, les esprits s’échauffent. On s’offusque. On défend. On s’alarme. La cacophonie perce parfois jusqu’à l’intérieur de son bureau et la pauvre Holly fait barrage, en précieuse secrétaire, pour éviter à sa patronne de recevoir le gros des plaintes. Mais toutes ne peuvent être évitées et les sorties de Moira se font maintenant très rares, quand elles sont véritablement nécessaires, pour s’éviter le flot de questionnements et de reproches qui assombrit chaque fois les regards qui se posent sur elle.

Mais au fond de son cœur, elle ne peut regretter son geste.

Car la sentence décidée pour Reißen est la pire de toutes celles qu’on pouvait imaginer. Deux semaines de prison ferme pour les musiciens. Un mois entier pour Bauer. Quand un concert, même clandestin, a-t-il revêtu une telle gravité ? Comment peut-on justifier une sévérité si extrême quand tous ne prônent que la paix et le rapprochement des oppositions ? A quoi s’attendait Potter en mettant de simples rockeurs au pilori au nez et à la barbe de ceux qui le dépeignent déjà comme un tyran ? La condamnation de Reißen est un scandale, une erreur qui leur éclatera à la figure tôt ou tard car on ne peut se revendiquer conciliateur quand même la musique finit derrière les barreaux d’Azkaban. Les conditions du concert importent peu, de même que la violence des morceaux joués, jusqu’à la participation supposée d’élèves de Poudlard à la propagande la plus crasse. Répondre aux cris par le bâillon et le meilleur moyen d’attirer d’autres hurlements, toujours plus nombreux, de sorte qu’ils deviennent impossibles à faire taire et, Moira en est persuadée, Potter n’a pas fini d’entendre le peuple crier.

Holly est partie manger, épuisée, laissant sa patronne à la merci des curieux pendant quelques dizaines de minutes. Alors, le cœur de la Présidente-Sorcière rate un battement quand on vient frapper à sa porte. Elle craint de devoir affronter une nouvelle pluie de questions d’un juge quelconque ou les remontrances d’un auror déçu de voir qu’elle n’a pas annoncé elle-même une condamnation que les rockeurs avaient, d’après lui, amplement méritée. Mais elle laisse échapper un soupir soulagé quand elle reconnaît finalement Melchior Fawley. Son salut attire le sourire de la juge bien qu’elle sente quelques réserves dans le timbre de sa voix.
- Bonjour, Lord Fawley. Je suis heureuse de vous voir.
Et en cela, elle ne ment pas. Il y a longtemps qu’elle aurait dû prendre le temps d’échanger avec lui. Le service qu’elle lui a demandé a été lourd de conséquences, pour lui et pour tout le département. Il est temps de lever les interrogations qui demeurent dans le cœur du Lord. Aussi accepte-t-elle avec douceur quand il l’invite à déjeuner.
- Oui, avec plaisir.
D’un mouvement de baguette, elle range ses dossiers dans ses tiroirs sécurisés et réajuste son blaser en se levant. Elle sourit alors au vieil homme dont elle prend le bras quand il le lui tend et l’accompagne dans le dédale des couloirs.

Autour d’eux, les regards se font pesants, comme depuis des jours. Moira les sent tous comme autant de poids sur ses épaules. Mais la présence du vieux Lord la rassérène un temps, jusqu’à ce que sa première remarque perce soudain le silence ambiant. Les yeux de la Présidente-Sorcière s’abaissent.
- Je sais, murmure-t-elle.
Un aveu si simple et pourtant si lourd car Moira savait dès l’instant où elle a eu l’idée de demander à Melchior de la remplacer qu’elle l’affublerait d’un poids intolérable. Aucune excuse qu’elle lui ferait ne pourrait adoucir les conséquences de son choix et les découlés de celles-ci éclabousseront la réputation du Lord pendant des années, sans doute. Mais la honte qu’elle en retire ne parvient pas à lui faire regretter sa position car, on fond d’elle, elle demeure convaincue que cette décision était la seule qu’elle pouvait prendre.

Les paupières de la juge se ferment une seconde alors qu’un sourire las étire la commissure de ses lèvres quand Melchior lui pose ses questions. Elle ne peut prétendre ne pas s’être attendue à chacune d’entre elles. Mais les entendre enfin prononcées les rend plus coupantes encore. La gravité avec laquelle Melchior les lui pose est affreusement douloureuse car Moira sent que son comportement l’a déçu. Il n’a pas compris ce qu’elle voulait faire, n’a pas saisi combien cette décision était inévitable pour elle. Saura-t-elle le convaincre du contraire, lui expliquer au moins les raisons de son choix à défaut d’obtenir son soutien ?
- Je ne nie pas leurs torts, Melchior, ni le dégoût que m’a inspiré leur spectacle. Je crois que vous le savez au fond de vous. Vous me connaissez trop pour penser que je soutiens leurs agissements. Mais vous l’avez dit vous-mêmes : ce ne sont pas pour ces actes-là que nous les avons jugés et c’est bien là la bavure à laquelle le Magenmagot a consenti. Nous avons condamné ces hommes pour l’instrument politique qu’ils sont devenus et avons statué que de tels positionnements ne seraient pas tolérés en Angleterre. En faisant cela, nous avons usurpé notre rôle avec le consentement voire l’encouragement du Ministre. Ce n’est pas la Justice pour laquelle je me suis engagée toute ma vie.  
Son regard se pose sur des détails insignifiants du couloir. La magistrate est pensive, le pas toujours calqué sur celui du Lord.
- On leur a reproché la mise en danger du public, les rixes qui ont suivi leur message odieux. Mais est-on allé chercher les organisateurs de ce concert, ceux qui ont installé la scène, oublié d’organiser la sécurité qui devait accompagner un tel événement ? Que les musiciens soient complices est une certitude mais les désigner comme seuls responsables de ce fiasco est une faute grave, vous le savez. Or, je n’ai vu personne d’autre être inquiété devant la Cour et surtout pas les Malefoy. J’aimerais qu’on m’assure que Narcissa et sa famille soient interpelés et interrogés dès l’instant où on les reverra franchir la frontière des Terres de Feu mais personne n’est parvenu à me garantir cela. Qu’est-ce que cela dit de notre système juridique ? Quel symbole cela donne-t-il ?  
Elle revient croiser le regard du juge.
- J’ai honte, Melchior. Honte de cette sentence, honte de cette enquête expéditive, de cette arrestation musclée pour de simples artistes. Ils ne méritaient pas cela, quelle que soit leur offense. Ce sont des propagandistes, pas des criminels. Demandons-leur réparation pour les dégâts qu’ils ont causés. Condamnons leurs injures. Mais un mois de prison, Melchior… Un mois de prison ferme pour une chanson, pour un concert ! C’est de la folie et vous saviez que nous risquions d’en arriver là. Tout le monde le savait, Potter le premier, parce que la crispation actuelle ne permet plus de procès justes, parce que l’opinion publique s’est frayé un chemin jusque sur les bancs du Magenmagot et que nous oublions la Justice pour laisser parler l’affect et les allégeances. Vous savez à quoi mène ce genre de dérives, vous les avez vues à l’œuvre plus encore que moi…
Son regard bleu plonge dans le gris des iris du patriarche. L’inquiétude tremble dans les yeux de la juge, animé d’une sincérité poignante qui bannit tout mensonge. L’expérience de Melchior Fawley en matière de politique est une des plus grandes qu’elle connaisse. Le Lord a connu deux guerres au plus près, est intervenu en tant que brigadier, juge, archiviste… Il ne peut que comprendre la peur qui s’est emparé du cœur de la Présidente-Sorcière.
- Nous n’avons pas puni ces hommes pour la tenue de leur concert ni même l’appel à la haine qui a découlé de leur musique. Nous les avons écrasés sous une peine injuste, ignoble, dans l’espoir de les faire taire. Ce que nous avons produit, c’est une censure brutale et un message on ne peut plus clair : que le pouvoir du Ministre a infiltré les rouages de la Cour. Oh ! Ce n’est pas la première fois que cela arrive, me direz-vous, et vous aurez raison. Le Magenmagot n’a jamais brillé par son impartialité. Ce n’est toutefois pas la Justice à laquelle j’aspire et je tiens à ce que le Ministre le sache.  
Harry Potter et tous les autres, qu’ils soient Lords, juges, employés du Ministère ou simples citoyens.
- Je ne peux pas laisser cette institution devenir l’instrument d’un pouvoir despotique sans rien dire. Je suis incapable de savoir si ce procès était un faux-pas ou la première étape de l’assujettissement du Magenmagot. Mais que ce soit l’un ou l’autre, je ne peux me taire et prendre le risque d’être complice d’une instrumentalisation de la Justice. Si nous devenons le bras armé de la politique de sorte que même les artistes doivent surveiller leurs œuvres, je veux que tous puissent compter sur mon opposition constante et je veillerai à ce qu’elle soit publique.

La colère et l’appréhension font trembler le timbre de sa voix. Des jours durant, elle a hésité à refuser la présidence du procès de Reißen, à assumer ce refus et les foudres qu’elle subirait en retour. Mais maintenant cette première épreuve passée, ce sont toutes les autres qui la menacent à présent et elle ne peut que craindre la profondeur des coupures qu’elles lui infligeront. Le regard de Moira s’abaisse de nouveau alors qu’ils s’approchent du restaurant. Elle baisse légèrement la voix pour que les employés du Ministère, un peu plus nombreux autour d’eux, ne puissent l’entendre.  
- Je ne crois pas être capable d’infléchir les positions du Ministre. Je crois n’avoir sur lui aucune influence… J’ai essayé il y a quelque temps, lorsqu’il a décidé unilatéralement de créer sa réserve. Je croyais être parvenue à instaurer quelque chose, un contact, une confiance… Mais il continue d’agir sans me consulter. Je ne suis même pas sûre qu’il consulte qui que ce soit. Je crois qu’il est trop convaincu du bien-fondé de ses positions pour les mettre en doute d’une quelconque façon.  
Un discret soupir lui échappe. Elle ajoute en posant glissant un sourire délicat vers Melchior.
- Vous étiez le seul à qui je pouvais laisser ma place ce jour-là, Melchior, le seul qui avait les épaules pour porter ce fardeau et assez de patience pour prendre ces responsabilités dans l’urgence et venir me poser les questions qui vous taraudaient quand nous aurions le temps d’y répondre. Vous avez l’expérience des procès difficiles, assumé de lourdes responsabilités depuis des années à travers votre titre de Lord, et vous connaissez tout des sorciers que Bauer et ses comparses soutiennent. J’aurais voulu vous épargner un tel poids, mais je n’ai trouvé personne d’aussi qualifié que vous pour mener cette tâche à bien. Nous ne venons peut-être pas du même milieu, mais j’ai toujours trouvé nos conceptions étroitement liées. Je savais que vous dirigeriez ce procès de la façon la plus juste possible, en accord avec vos principes et votre vision de la justice. C’est ce que vous avez fait.
Son regard démontre encore toute sa sincérité alors qu’elle entre avec Melchior au Dragon Gourmet.
- La sentence qui a été décidée n’était pas la vôtre. Je la déplore. Je pense que vous aussi. Mais c’est le fardeau de la présidence : nous ne sommes que les médiateurs et les porte-voix. La décision finale se prend ailleurs, sur les bancs des juges qui nous entourent. J’aurais aimé qu’ils lisent la même chose que moi dans les véritables desseins de ce procès, qu’ils se montrent plus sages, choisissent une condamnation bien plus symbolique, à même de punir les abus pour ce qu’ils sont sans chercher à anéantir les fautifs. Croyez-moi, Melchior : cette erreur nous coûtera cher, et sur le long terme. Si personne n’a voulu le voir ce jour-là, je ferai en sorte que personne ne puisse prétendre ne pas avoir été alerté par la suite.  


Hrp:


(2082 mots)

Melchior C. Fawley

Melchior C. Fawley
MEMBRE
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Sam 5 Sep - 23:32

Dies iræ
Je suis meurtri. Cette histoire m’atteint plus que je ne l’aurais voulu, plus que ce n’est raisonnable. Je crois en la Justice, je veux être juste – et je me suis retrouvé l’instrument d’une folie, d’une parodie grotesque. Moira Oaks aussi, je le crois, se veut juste. Elle a cette vertu, au fond d’elle et je l’apprécie, je l’admire même, pour cela. J’aimerais trouver du réconfort dans ses mots, quelque chose pour calmer ce qui me révolte depuis ces derniers évènements – mais elle ne mentira pas pour épargner mon cœur. Sa voix est presque calme d’abord. Et pourtant son discours est terrible. « Ce n’est pas la Justice pour laquelle je me suis engagée toute ma vie. » Je sens mon cœur se pincer. C’est l’appel à la haine, la charge la plus problématique de cette affaire. Elle parle d’aller chercher les organisateurs, de condamner Narcissa. Je me sens soudain très las. Elle n’était pas au courant. Elle ne m’aurait pas menti, à moi, chez elle, avec autant d’aplomb tout de même ? Aucune charge sérieuse ne pourrait être retenue contre elle, un tel procès serait au moins aussi ridicule que celui dont Moira m’a laissé la charge – et elle ne peut l’ignorer. Je ne peux pourtant pas lui reprocher de vouloir punir les vrais coupables : les responsables de la guerre civile. Ma nièce, en premier lieu. Potter, je commence à le penser aussi. Moira dit avoir honte. Moi aussi, j’ai honte, d’avoir prononcé les mots, la sentence. Quel genre de nouvelle épreuve cela peut-il être ? « Vous savez à quoi mène ce genre de dérives, vous les avez vues à l’œuvre plus encore que moi… » Ses yeux se sont plongés dans les miens, et je tente de rester le calme et le plus égal face à l’azur du regard qui se pose sur moi. C’est une sincère inquiétude qu’elle exprime, mais à mon tour je serais bien incapable de la réconforter si je commentais maintenant. « Nous n’avons pas puni ces hommes pour la tenue de leur concert ni même l’appel à la haine qui a découlé de leur musique. Nous les avons écrasés sous une peine injuste, ignoble, dans l’espoir de les faire taire. » Je me pince les lèvres. Je les ai condamnés pour la tenue du concert et leur appel à la haine, bien que je voyais des motifs plus importants, mais ce n’est pas pour cela qu’on les a arrêtés, ce n’est pas pour cela que mes confrères ont voté coupables. Et je le savais déjà quelque part au moment d’accepter de prendre cette place. Aurais-je du refuser de participer, moi aussi, comme elle ? Aurais-je du me préserver de tout cela ? Ne pas donner une occasion aux autres de douter de ma probité ? « Je ne peux pas laisser cette institution devenir l’instrument d’un pouvoir despotique sans rien dire. » Oh Moira… C’est presque toujours le cas. En plusieurs décennies ici à siéger au Mangenmagot, je peux compter sur les doigts d’une main les procès où les membres ont été vraiment impartiaux, où l’on a rendu justice sans servir des fins politiques. Parce que c’est le Magenmagot, son existence, son organisation font de l’institution un outil, un levier. Je ne suis pas neutre. Aucun Lord ne peut l’être. Je chasse ces pensées et reporte mon attention sur la magistrate. L’opposition, nous y arrivons. Encore, toujours plus de querelles et de luttes. C’était inévitable. Ne peut-on le guider, cet enfant, agir avec lui, et non contre ou malgré lui ? « Je ne crois pas être capable d’infléchir les positions du Ministre. Je crois n’avoir sur lui aucune influence… J’ai essayé il y a quelque temps, lorsqu’il a décidé unilatéralement de créer sa réserve. Je croyais être parvenue à instaurer quelque chose, un contact, une confiance… Mais il continue d’agir sans me consulter. Je ne suis même pas sûre qu’il consulte qui que ce soit. Je crois qu’il est trop convaincu du bien-fondé de ses positions pour les mettre en doute d’une quelconque façon. » Mes sourcils se froncent. Il n’écoute personne, il ne consulte personne. C’est le genre de comportements qui annoncent les troubles. Fudge aussi, n’écoutait plus personne qui n’allait dans son sens, avant sa démission. Et j’en ai vus d’autres, qui n’étaient pas forcemment Ministre certes, foncer droit dans le mur parce qu’ils n’écoutaient plus, devenus trop confiants ou trop paranoïaques. La blonde continue en m’affirmant qu’elle n’aurait pas pu confier cette tache à quelqu’un d’autre. Je sens mes épaules s’affaisser, mais il y a quelque chose de doux, de presque tendre dans le sourire un peu triste que je m’efforce de lui adresser en réponse. Cela me touche, au moins, qu’elle se fasse cette idée de moi. Nous sommes arrivés alors que nous parlions, et je lui tiens la porte en l’écoutant alors que nous entrons. « Croyez-moi, Melchior : cette erreur nous coûtera cher, et sur le long terme. Si personne n’a voulu le voir ce jour-là, je ferai en sorte que personne ne puisse prétendre ne pas avoir été alerté par la suite. »

Je reste un instant silencieux, à mesurer ses paroles. « La même chose que d’habitude, s’il vous plaît. » J’adresse un sourire poli à la personne qui vient de prendre ma commande et, m’appuyant contre une table, pose ma canne et croise mes bras devant moi. Il me faut un moment pour sortir assez de mes pensées et me tourner vers la magistrate. Le restaurant est encore relativement vide, et elle a parlé sans sembler s’inquiéter que l’on entende son discours. « Le fait est que je ne pense pas que cette institution ait un jour été autre chose qu’une affaire de politique. Pas le Magenmagot. » Que Bauer écope d’une peine aussi forte votée à une si écrasante majorité est aussi le résultat des actions politiques menées pour limiter le pouvoir des Lords. Chacun d’entre nous sert au moins autant ses intérêts que la communauté quand il siège, chacun représentant alors une possible opposition face au Ministère. Mais notre Ministre nous a largement muselé, comme il a accepté, voir encouragé, que nous muselions ces musiciens. Il ne veut pas composer avec des voix qui ne vont pas dans son sens. Ça n’est pas bon. « Je suis navré, que les choses se soient passées ainsi. Que les choses se passent ainsi, en général, Moira. J’aspirais à plus de paix, pour cet âge de ma vie. Mais au lieu de cela nous sommes au bord de la guerre civile. » Si vis pacem, para bellum. C’est ma mère, qui m’a appris le latin, pour que je puisse comprendre les messes. Mon père ne le parlait pas, il ne connaissait que quelques phrases, quelques maximes. Celle-là devait être sa préférée. Qui veut la paix prépare la guerre. Beaucoup de choses m’ont opposées et m’opposent encore à mon paternel, mais c’était un animal politique fascinant. Et il faudrait peut-être que je m’inspire de lui cette fois encore. « Et ce procès a participé à échauffer les cœurs, de chaque côté. Je ne veux plus jeter de la braise sur ce feu. » Je me penche vers elle. « Je crois en la Justice, mais je crois qu’elle ne peut être obtenue qu’avec la paix. Et je comprends, crois moi, que tu veuilles t’opposer à ce que ce genre de choses puissent se reproduire, mais... » Mon regard qui est plongé dans le sien vagabonde un instant ailleurs. J’ai admiré Harry Potter et j’ai pour lui une immense gratitude – mais je ne lui ai jamais vraiment parlé plus que cela. Je ne sais pas quel genre d’homme il est réellement, et je ne connais pas ses ambitions et ses desseins. « Est-ce que tu penses vraiment qu’il n’y a aucune discussion possible avec le Ministre ? Est-ce qu’il n’y a pas au moins quelqu’un qu’il écoute ? Parce que si tu en es sûre, ça ne changera absolument rien, au contraire. Ça envenimera certaines choses qui mériteraient d’être apaisées. Il n’arrêtera pas d’encourager, de demander ce genre de procès pour autant, et les tensions seront trop fortes pour que la justice soit impartiale. Il faut arrêter cette guerre, et je ne crois pas que ni le Ministère ni l’Insurrection ne doit la gagner. » Alors qui ?

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HRP :C'est à mon tour d'être vraiment désolée pour mon temps de réponse. :kwua: J'espère que ça t'ira, hésite pas à me dire si tu veux que je modifie.

Moira A. Oaks

Moira A. Oaks
ADMINISTRATRICE & MJ
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Dim 3 Jan - 16:52





mi-février 2004

Il faut presque le retour du serveur pour rappeler à Moira l’endroit où elle se trouve tant le déluge d’idées et de considérations contraires dans sa tête obnubile toute son attention. Son discours a été long, trop sans doute, mais salvateur tant il a fallu pour elle attendre des jours interminables pour trouver une oreille à même d’entendre toutes ses colères et toutes ses craintes. Qui d’autre que Melchior, celui qu’elle a quasiment désigné pour la remplacer, le sage parmi les sages, pour percevoir tous ses troubles et, elle l’espère, les comprendre ?

Elle commande le plat du jour, bien peu intéressée par ce qu’il sera, alors que ses yeux clairs interrogent le Lord en face d’elle. Ils expriment à la fois toute son estime et le besoin sincère de conseils qui est le sien depuis qu’elle a décidé d’affirmer son désaccord avec le Ministre. Melchior prend le temps de la réflexion. C’est bien là sa qualité la plus précieuse en pareil instant. Alors Moira patiente, fais son possible pour paraître plus sereine qu’elle ne l’est et repousser l’angoisse qui lui fait triturer ses doigts.

Les premiers mots du patriarche sont teintés d’une résignation presque triste. L’œil du vieil homme ne craint plus de voir les choses pour ce qu’elles sont et c’est sans concession qu’il donne sa vision du Magenmagot, de son rôle et de son pouvoir depuis sa création, loin de l’idéalisme que Moira pouvait avoir en entrant en formation au Département de la Justice après avoir obtenu ses ASPICs. Jamais la Présidente-Sorcière n’a perdu ses objectifs de vue ni abandonné ses principes. Mais aujourd’hui, elle doute d’être parvenue à les suivre autant qu’elle le voulait et surtout, elle doute qu’on lui donne réellement les moyens de le faire.

Alors, vient le terme que Moira refusait de se laisser dire jusqu’alors. La guerre civile. Elle le sait pourtant, depuis de longues semaines, peut-être de longs mois : ce sont bien ces tensions qui naissent dans le peuple qu’elle sert, ces frustrations qui viennent vitrioler toutes les décisions politiques, motiver les nouvelles promulgations de lois, alourdir les peines des futurs condamnés. L’air se fait lourd en Angleterre, trop lourd pour ne pas rappeler celui qui les faisait tous suffoquer quand le Seigneur des Ténèbres vivait toujours. Se peut-il que l’homme qui les en a tous libérés vienne à son tour serrer ses mains blanches autour de leurs cous pour les étouffer ?

Ne pas jeter de braise sur le feu. Tel est donc le but sur lequel ils se rejoignent, le seul qui devrait compter en des temps si troublés. Retenir la bête. Tirer les rênes pour ralentir cette cadence infernale qui les fait se rapprocher toujours plus vite d’un nouveau conflit, de nouveaux morts. Le pays se relève à peine de la dernière guerre des sorciers. Moira n’ose pas imaginer ce qu’il adviendrait si la violence devait éclater de nouveau en Grande Bretagne.

Pourtant, la magistrate sent les peurs de son aîné, les réticences qui sont les siennes à la voir s’engager de plus en plus fermement contre Harry Potter. Les rivalités ne se font jamais sans une levée des voix. Les oppositions se feront naturellement plus franches entre elle et les soutiens indéfectibles de l’Elu. Risque-t-elle d’accélérer le déclenchement d’une guerre en cherchant à l’entraver de toute son âme ?

Un instant, les certitudes de la juge fléchissent sous les doutes de Melchior. Elle se demande si elle ne fait pas fausse route, si elle ne devait pas tout arrêter tant qu’il en est encore temps. Mais la pensée est fugace, rapidement repoussée par les heures interminables déjà passées à retourner dans sa tête toute la situation, tous les scénarios envisageables, toutes les possibilités qui sont les siennes pour servir la société magique anglaise. Harry Potter ne prend pas le bon chemin. Personne ne semble capable de le lui faire voir. Et son entêtement ne fait qu’aggraver de jour ne jour les rivalités qui opposent son progressisme flamboyant aux puissants sorciers qui faisaient frémir le monde quelques années seulement auparavant. On ne peut balayer un ennemi pareil d’un rictus et d’une succession de décrets. Si Narcissa Malefoy et ses comparses se retrouvent dos au mur, leur baroud d’honneur sera meurtrier.
- J’ai espéré pouvoir l’atteindre, Melchior. Je vous assure que j’ai essayé. Je pensais même y être parvenue quelque temps. Mais c’est peine perdue. Je ne peux rien lui faire entendre et je ne connais personne qui y parvienne, pas même Kingsley. Son obstination fait sa légende depuis qu’il est enfant. @Severus Rogue vous le dirait plus encore que moi. Mais ce qui n’était que des comportements adolescents sans grandes conséquences influe aujourd’hui sur l’équilibre d’un pays tout entier et vous savez comme moi que ses ennemis se multiplient et que Narcissa Malefoy est loin d’appeler au calme. L’un et l’autre excitent leurs rangs de jour en jour et je commence à me demander si notre Ministre lui-même n’appelle pas ce conflit ouvert que nous pressentons de ses vœux.  

L’accusation est grave mais nullement prise à la légère. Sont-ce les nuits trop courtes et trop nombreuses à ressasser les derniers événements qui ont donné à Moira des pensées aussi noires ? Sont-ce ses angoisses qui déteignent sur tout ce qui l’entoure, vitriolant son existence pour tout dépeindre dans des couleurs plus sombres qu’elle ne devrait les voir ? Ou bien, est-ce son orgueil meurtri qui lui fait voir un monstre sous les traits juvénile d’un politicien dont elle ne soutient pas tous les combats ? Ces questions, Moira se les est posées aussi. Elle serait bien prétentieuse si elle affirmait aujourd’hui en avoir trouvé toutes les réponses.

Alors, elle laisse Lord Fawley seul juge, détenteur de toutes ses craintes et des envies téméraires qui les accompagnent. Car, au milieu de leurs questionnements, ils se retrouvent également sur une autre opinion commune :
- Ni le Ministère, ni l’Insurrection, je le crains aussi.

Alors, qui ?

Il faut plusieurs longues secondes à Moira pour oser reprendre la parole, exprimer les mots qui s’entassent sur sa langue tant elle s’interdit encore de les prononcer. Elle craint la réaction du Lord et son inquiétude la tient au secret. Comment Melchior pourra-t-il réagir en apprenant ce qu’elle mijote avec son neveu ? Lui rira-t-il au nez ? Lui répondra-t-il par une colère sourde, bien plus violente encore que tous les cris scandalisés qui pourraient sortir de sa bouche de choriste ? Elle ne sait pas.

Le serveur réapparaît à leur table et dépose deux assiettes avant de les laisser promptement, comme s’il sentait que sa présence n’était pas bienvenue et que quelque chose de grave se passait entre la Présidente-Sorcière et le grand archiviste. Ce dernier sursis écoulé, Moira s’empare de son courage et revient planter ses iris dans celles du Lord. Sa voix se veut assurée. Elle ne l’est pourtant pas assez quand elle dit enfin :
- Il nous faut une troisième voie, Melchior. C’est celle que je tente d’ouvrir en ce moment même. Le jour où j’ai refusé de siéger est celui où j’ai décidé de ne plus me plier à ce choix impossible qu’on nous impose alors que ni l’un ni l’autre ne peut assurer d’avenir serein à ce pays. Ni Potter, ni Malefoy. Il nous faut une autre direction…
Une respiration encore, avant qu’elle n’achève.
- J’ai décidé de mettre sur pied un nouveau mouvement politique, un qui remettre au cœur des débats des valeurs qui me semblent trop souvent oubliées par les deux chefs de file que l’histoire nous a imposés. Je veux revenir aux bases de notre politique, à la consultation du peuple qui n’a que trop peu eu le droit à la parole depuis des décennies. Je veux que l’on cesse de vouloir revenir à un temps révolu et qu’on cesse également de détruire tout l’héritage de ceux qui ont construit ce pays. Je pense qu’il existe une autre voie, plus sage, capable de rassembler les âmes meurtries de Grande Bretagne que deux guerres ont trop mutilées. Je veux montrer qu’elle existe et me battre pour que les citoyens de ce pays puissent enfin l’emprunter.
Les mots se sont tous enfuis, trop passionnés, peut-être. Un sourire amusé, presque désolé étire la commissure des lèvres de la juge. Melchior doit la prendre pour une idéaliste folle à peine sortie des bancs de l’école.
- L’idée vient de Nigel, murmure-t-elle enfin. Je n’aurais pas eu le courage de croire en pareille entreprise sans lui. Mais j'ai confiance en lui, en son instinct. Et plus j’y réfléchis plus je pense qu’il a eu avant nous l’idée qu’il fallait avoir. Cette troisième voie, c’est notre espoir, Melchior. J'en suis convaincue


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